30/11/2006
De la juste utilité du vote blanc
[note un peu remaniée pour corriger quelques coquilles]
Découvert hier soir lors de la 4ème république des blogs : le parti blanc, et son représentant, Mehdi, avec qui j’ai pu discuter quelques instants, ainsi qu’avec l’ami Hugues.
Pour ma part l’initiative de ce groupe me plaît pas mal, car comme beaucoup d’autres, je regrette que les votes blancs ne soient pas comptabilisés lors des différents votes qui ont lieu. Cela donne une image un peu faussée des résultats sortant des urnes, et surtout, cela fait proprement disparaître des dizaines de milliers d’électeurs, qui manifestent par ce vote leur insatisfaction devant le choix qui leur est proposé.
C’est d’ailleurs d’autant plus regrettable que les personnes qui votent blancs, contrairement aux abstentionnistes, manifestent leur intérêt pour la chose publique et montrent par leur démarche qu’ils ont un vrai sens civique. Une démocratie qui déconsidère ces personnes là se tire un peu une balle dans le pied, non ?
Mais en revanche, le « programme » proposé par le parti blanc me semble un peu étrange et pour tout dire assez hors sujet. Pour moi la seule bataille qu’ils ont à livrer c’est celle de la reconnaissance et du comptage des votes blancs. C’est déjà pas mal, mais ça s’arrête là.
Dans son introduction, et Mehdi a d’ailleurs fortement plaidé hier soir en ce sens, le parti blanc se donne pour mission de rétablir la confiance entre les citoyens et la classe politique. Et, prétend-il, cette confiance viendra lorsque les votes blancs seront comptabilisés. Là, je dois dire que je ne comprends pas la logique.
Je crois que l’argument qui serait présenté par le parti blanc pour justifier cette idée, c’est que lorsque les votes blancs seront comptabilisés, on pourra établir une règle disant qu’à partir d’un certain niveau de ceux-ci, le vote qui a eu lieu devra être reconnu comme nul. Et là s’engagerait une procédure de dialogue pour que les personnes qui ont voté blanc indiquent les raisons de leur choix. Et donc on aboutirait à une nouvelle offre politique lors d’un vote ultérieur.
Il y a à mon avis plusieurs erreurs dans ce raisonnement. D’abord, je serais surpris que le pourcentage de vote blanc dépasse fréquemment un plafond raisonnable pour annuler des élections. Leur niveau a été indiqué une ou deux fois, grâce à des sondages, lorsqu’ils semblaient particulièrement élevés : ils ne dépassaient pas les 5%. On comprend bien que c’est très insuffisant pour annuler quelque élection que ce soit.
Ensuite, parce que je serais encore plus surpris que l’on puisse trouver une véritable unité dans la démarche des votes blancs, si ce n’est celle d’avoir voté blanc. Les raisons de ce type de vote sont naturellement très diverses, et leur réconciliation serait à mon avis bien difficile.
Et puis surtout, je trouve que cet un outil plutôt inefficace pour arriver à la fin, louable, que le parti blanc entend lui donner. Car tout de même, il existe d’autres façons, plus directe, pour réconcilier les gens avec la politique non ? Et le dialogue qu’on instaurerait après une annulation d’un vote, pourquoi on ne le fait pas avant ? Ce n’est pas parce qu’on va comptabiliser les votes blancs qu’on va réduire l’incompréhension qu’ont les gens de la politique ni les votes de sanctions.
Pour cela, il y a des démarches plus efficaces, de communication plus transparente des partis politiques, de participation plus facile des gens à la constitution des programmes, d’instauration de débats, que ce soit dans un espace public bien défini (les communes organisent souvent des débats dans les salles qu’elles ont à leur disposition), ou chez soi, via Internet et les blogs par exemple.
Et surtout, surtout, il y a la nécessaire implication de chacune et de chacun pour découvrir soi-même quelles sont les propositions des uns et des autres. Je l’avais déjà dis dans mon billet de synthèse sur le TCE (n’allez pas relire ça malheureux, c’est affreusement long, je ne l’indique que pour faire chic), on ne peut pas pester contre l’incompréhension que l’on a de telle ou telle position politique et de tel ou tel texte, si l’on ne fait pas déjà soi-même l’effort de s’informer et d’analyser les choses. C’est bien cela la démocratie, la responsabilité de chacun de la faire vivre en se donnant le maximum de chances de faire des choix éclairés. Et on ne peut pas attendre toujours que cet éclaircissement vienne des autres. Les politiques ont un devoir d’effort pour rendre leur démarche plus transparente. Les personnes qui se prétendent citoyennes ont un devoir d’effort pour s’informer de ces démarches.
10:10 Publié dans Un peu d'actualité et de politique | Lien permanent | Commentaires (6) | Facebook |
Commentaires
"si ce n’est celle d’avoir voter blanc"
"d'avoir voté", non ?
Écrit par : maitre capello | 30/11/2006
houla... oups. merci. Remarquez je crains que vous n'en trouviez d'autres ...
Écrit par : pikipoki | 30/11/2006
Ce n'est pas grave; c'est juste que cette faute là m'est insuportable.. je ne peux lutter, je dois la faire remarquer.
Écrit par : maitre capello | 30/11/2006
Ah mais faites, je suis moi-même fort contrarié de constater par la suite mes fautes d'orthographe. Mais quand j'écris, malheureusement, je n'ai souvent pas assez de temps pour tout relire attentivement.
Écrit par : pikipoki | 30/11/2006
Il n'est pas surprenant que, les votes blancs n'étant pas comptabilisés, ils n'aient jamais dépassé 5%; ne serait-ce pas le contraire qui le serait?...
En revanche, imaginons la situation suivante: dans un futur de science-fiction (ou un univers parallèle) les votes blancs sont comptabilisés, et une situation du type "21 avril 2002" se produit. Combien d'électeurs jugeraient alors qu'un vote blanc au second tour serait le moyen le plus adéquat d'exprimer leur position face au choix proposé? En particulier si un certain "plancher" de votes blancs pouvait conduire à l'annulation du scrutin?... Hasarder un chiffre précis serait frivole, mais on ne prend pas de risque à répondre "beaucoup"...
On pourrait objecter qu'une modification du mode de scrutin pour la présidentielle, ouvrant la possibilité d'un troisième tour, serait plus adaptée à la gestion de ce type de situation...
Dans le droit fil de la question que vous posez: "Et le dialogue qu’on instaurerait après une annulation d’un vote, pourquoi on ne le fait pas avant?" on pourrait aussi penser à institutionnaliser la tenue de "primaires": il me semble cependant que la longue histoire des primaires aux Etats-Unis - pour ne rien dire des dernières "primaires" du PS...- a suffisamment montré les limites de ce système...
(C'est mon premier commentaire sur ce blog: j'en profite donc pour y exprimer mon plaisir à le lire, et pour lui souhaiter longue vie!)
Écrit par : Géronimo | 20/04/2007
Bonsoir Geronimo
D'une certaine façon fixer un plancher à partir duquel le vote blanc remettrait en cause une élection présente peut-être le risque de susciter un ralliement à ce choix sur la seule base d'une volonté de nuire, ce qui n'est pas précisément une attitude responsable. Pourtant, par principe, je trouve bizarre que ces votes ne soient pas mieux pris en compte.
Sinon merci pour le compliment, c'est très sympathique !
Écrit par : pikipoki | 21/04/2007
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