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04/12/2006

La crise émotionnelle

medium_Crise.jpgVendredi dernier au bureau, une collègue s’est effondrée en revenant d’une réunion de lancement de mission qui s’était mal passée. Rien n’est apparu dans les deux premières heures qui ont suivi son retour, mais ensuite, à partir de la première larme, il fut impossible de tirer quoi que ce soit de sa part durant toute l’après-midi. Désemparée, débordée par sa propre émotion, elle ne parvenait pas à reprendre le dessus, et nous qui assistions à sa crise, nous nous sentions tout à fait incapables de l’aider.

La difficulté de la crise émotionnelle, c’est évidemment qu’elle se traduit par une perte de contrôle. La personne devient elle-même incapable de se maîtriser, et son entourage également n’a souvent pas de réponse à apporter à la crise vécue. C’est d’ailleurs cette impuissance de tous qui fonde la crise, puisqu’elle met chaque intervenant (on comprend en fait qu’il faudrait plutôt utiliser le terme de spectateur) en situation d’inhibition de l’action, et qu’alors aucun ne se sent en mesure d’agir pour modifier la situation.

Cette impuissance renforce donc la détresse émotionnelle de la personne, puisqu’elle ajoute à son malheur le sentiment de ne pouvoir en sortir. Elle entre alors dans un véritable cercle vicieux, qui est le mode sur lequel la crise s’alimente elle-même. Je ne connais pas de remède simple à une crise émotionnelle. Et je serais bien surpris qu’il en existe. Mais on peut toutefois avancer une ou deux idées.

La première c’est que l’essentiel que peuvent apporter les personnes qui assistent éventuellement à la crise, c’est simplement d’être là. Etre là, c’est-à-dire offrir une vraie présence, témoigner de l’appui qu’elles offrent à l’autre. Mais cette présence, ne doit probablement pas se faire sur un mode pathologique (la personne qui pleure avec vous parce que vraiment c’est trop dur), mais plus sur un mode d’accompagnement. D’ailleurs, et je l’ai déjà noté à de nombreuses reprises dans mes premiers billets sur la gestion du stress dans ce blog, cette présence passe bien plus par un comportement, un regard stable et attentif à la fois, un corps serein mais mobilisé, etc., que par des mots, qui trop souvent enferment la douleur dans une interprétation trop subjective pour être juste.

La deuxième c’est que c’est souvent aussi la personne qui est en crise qui est la plus à même à s’aider elle-même. Mais là, toute la difficulté c’est que pour sortir de sa crise, il est nécessaire qu’elle parvienne à s’en détacher, à prendre du recul vis-à-vis de sa situation. Or la crise, par définition, se caractérise par l’absence de recul et, comme on l’a déjà indiqué, par l’entraînement dans un cercle vicieux qui alimente celle-ci.

Quelques idées toutefois peuvent être mises à profit. La première, c’est qu’il me semble tout à fait erroné de chercher à supprimer les émotions en cause. C’est comme en gestion du stress. Il ne s’agit pas de supprimer ces éléments, mais de les gérer, c’est-à-dire de savoir les intégrer en soi d’une façon saine et non destructive. Mais prétendre détruire ses propres émotions, c’est à mon avis une bêtise. D’ailleurs à bien y réfléchir, je ne crois pas que cela soit possible, et les gens qui prétendent y parvenir, ne font probablement que les maquiller. Est-il besoin d’expliquer que ce n’est pas ainsi qu’elles parviendront à retrouver leur équilibre ?

Ensuite, et là je vais être très pragmatique, il faut travailler sur les affects corporels de la crise, notamment sur la respiration. Le simple fait de parvenir à reprendre son souffle convenablement et à le poser lentement peut suffire à sortir de l’engrenage. On peut aussi travailler sur les muscles pour les détendre. La seule détente des muscles du visage est une source d’apaisement importante : surtout le front (penser à le rendre lisse, sans rides), et les joues (notamment en desserrant la mâchoire).

Enfin, le fait d’avoir déjà engagé une démarche de travail sur soi, de réflexion sur ses priorités, de connaissance de ses moyens et de ce qui ne dépend pas de soi, tout ceci peut être mis à profit (notez au passage que vous n’avez nullement besoin de moi, ni de quelque gourou que ce soit pour mener cette démarche, il vous suffit de vous intéresser à vos propres comportements pour cela). Souvenez-vous notamment de la petite phrase « que penserai-je de tout ceci dans un an ? Cela aura-t-il la même importance qu’aujourd’hui ? »

Et maintenant, passons à une forme répandue de crise : la colère.

 

P.S: et j'ajoute une petite référence, le guide des émotions de redpsy. Vraiment pas mal.

Commentaires

Hum, j'espère que cette personne sera licenciée. Merde alors, une crise émotionnelle ! Et en plein lancement de mission ! J'ten ficherai, moi, des crises émotionnelles ! De mon temps...

Écrit par : Hugues | 04/12/2006

Allons allons Hugues, tu n'es pas si vieux...

Puisque tu es là, je voulais te dire de faire attention. Je crois que tu as un belge non royaliste chez toi. Ca doit être un révolutionnaire.

Écrit par : pikipoki | 04/12/2006

Cela me rappelle un souvenir très ancien (je suis plus vieux que Hughes!). Je me trouvais en vacances et je suis tombé à un moment sur une jeune fille en pleurs, assise au bord du chemin. Je la connaissais assez bien et j'avais noté un début d'histoire d'amour avec un de mes amis, sans en savoir plus. Ne sachant pas quoi faire, je me suis assis à coté d'elle, et je ne sais pas pourquoi, j'ai commencé à commenter le paysage et à inventer une histoire. Elle n'a rien dit, mais un quart d'heure plus tard, quand j'ai eu fini, elle s'est levée et m'a dit merci. Nous sommes repartis chacun de notre coté. Des décennies plus tard, Pikipoki m'explique pourquoi j'ai eu le bon réflexe, une fois n'est pas coutume!

Écrit par : verel | 04/12/2006

Verel
Tu es un grand romantique dans le fond. C'est une jolie histoire.

Écrit par : pikipoki | 06/12/2006

Les commentaires sont fermés.