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17/03/2006

CPE/CNE et conditions de travail

Puisque je participe à un groupe de brillants tyrosémiophiles, et que le CPE est désormais LE sujet dont tout le monde parle, il faut bien que je l’aborde un peu sur mon blog.

 

Je ne vais pas faire un billet très long, notamment parce que mes autres camarades (à lire avec le poing levé) ont déjà tout dit ou presque sur le sujet, et mieux que je ne l’aurais fait. En fait je voudrais aborder cette question en faisant à nouveau un détour par celle du stress.

 

Il y a quelques temps déjà j’avais évoqué l’impact que le stress pouvait avoir sur l’efficacité des gens au travail. Perte de motivation, fatigue, etc. sont des facteurs qui entraînent une diminution de productivité, et donc représente un coût pour l’entreprise. Il me semblait donc, et c’est toujours le cas, qu’une réflexion approfondie sur la question du stress en entreprise, et d’une façon plus générale, sur les conditions de travail, serait une voie intéressante à suivre dans le débat de l’emploi.

 

En faisant quelques recherches ces derniers jours, j’ai d’ailleurs trouvé plusieurs rapports très intéressants qui analysent le sujet de façon détaillée. Vous pourrez notamment lire cet article de Studyrama qui rapporte les résultats d’une étude faite en 2005, et dont la principale conclusion est que 25% des salariés seraient trop stressés. Je signale également cette étude très riche de l’INRS, dont la dernière mise à jour date de novembre 2005.

 

J’en reprends notamment un tableau qui synthétise bien certains points importants :

 

Intensification du travail

Proportion de salariés qui déclarent ...

En 1991

En 1998

 

devoir fréquemment interrompre une tâche qu'ils sont en train de faire pour en effectuer une autre non prévue

48

56

 

devoir souvent ou toujours se dépêcher

-

52

 

ne pas avoir de collaborateurs en nombre suffisant

27

30

 

manquer de temps pour effectuer correctement leur travail

23

25

 

 

On voit bien l'augmentation sur chacun des points passés en revue. Ces symptômes me semblent clairement désigner des manques organisationnel dans les entreprises, celles-ci travaillant de plus en plus dans l’urgence et moins dans une vision stratégique à long terme, ce qui est à mon avis préjudiciable.

 

Pour en revenir sur la question du CNE et du CPE, je crains qu’ils ne fassent que renforcer cette tendance vers des conditions de travail qui se dégradent, générant ainsi un mauvais stress plus fort encore, avec la perte de productivité que cela suppose. On oublie que la période d’essai, pour la majorité des salariés, est une période de stress important, où l’on compte peu ses heures parce qu’il faut convaincre et se donner les garanties d’être confirmé à son poste au terme de celle-ci. On me rétorquera qu’elle est aussi une opportunité pour le salarié de prendre congé rapidement, pour profiter d’offres plus avantageuses. Certes. Mais cette logique ne me paraît vraie que pour une frange réduite des jeunes : ceux qui ont un bagage de diplômes et une formation qui leur permettent d’être en position de force. Et ceux-là sont minoritaires sur le marché. Les autres ont beaucoup moins cette possibilité. Alors bien sûr, il est difficile de chiffrer les coûts qu’engendre le stress, mais ils sont pourtant très réels, et surtout, ils représentent un vrai risque à long terme.

 

En gros c’est ça ma critique contre ces contrats : ils semblent s’inscrire dans une logique de court terme, et pas dans une vraie stratégie structurelle pour favoriser l’emploi. Juste pour l’anecdote, une intervention de Gilles de Robien attrapée au vol hier soir entre deux coups de zapette, m’a donné confirmation de l’orientation court-termiste de ces contrats. Il a dit à un moment (je cite en gros) : « Dans quelques mois, je retrouverais les partenaires sociaux assis ici à côté de moi et nous pourrons faire les comptes. Nous verrons alors si le CPE a créé des emplois, et nous saurons qui avait raison. » Mais si l’on se place dans le cas positif de créations d’emploi d’ici à quelques mois, cela ne serait pas moins ridicule de prétendre alors que donc le CPE était une bonne mesure.

 

Parce qu’il ne suffit pas pour créer une vraie dynamique que quelques milliers d’emplois soient créés d’ici à 6 mois. Encore faut-il que cela dessine une vraie tendance, et surtout, que ces emplois ne se trouvent pas détruits un an plus tard ! Il me semble que de Robien, qui a offert son plus beau sourire après cet appel au rendez-vous dans quelques mois, a en fait signé la logique à courte vue du projet soutenu par le gouvernement. L’objectif n’apparaît être que de pouvoir présenter dans quelques temps des chiffres satisfaisants sans se demander ce qui va se passer à long terme. Si c’est bien le cas, c’est une démarche tout à fait stérile, et même destructrice puisqu’elle fait perdre du temps au détriment de mesures plus solides.

Commentaires

Tiens, ça me fait songer que j'ai entendu François Dubet il y a quelques jours sur culture. Il a délaissé la sociologie scolaire pour celle du travail et des frustrations qui l'accompagnent et fait -semble-t-il - des développements sur le stress.

lien vers l'émission = http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/matins/fiche.php?diffusion_id=39624

avec les références de l'ouvrage ;-)

Écrit par : jules | 17/03/2006

Merci Jules :o)
J'essaierai d'écouter ça prochaînement.

Écrit par : pikipoki | 17/03/2006

Votre article me fait penser au livre de François Dupuy "la fatigue des élites" qui donne une autre explication à ce que certains appellent la fin de la valeur travail. En très raccourci, les nouvelles formes d'organisation du travail obligent les salariés à se confronter en permanence avec les autres ce qui crée de la souffrance. Le fait de développer des formes de rémunération individuelles sur objectifs également individuelles quand toute l'organisation pousse à la recherche de résultats collectifs participe également de cette souffrance

Écrit par : verel | 18/03/2006

Comment on fait pour lire un blog le point levé tout en ayant la main sur la souris ? (ok, je sors).

Écrit par : Paxatagore | 20/03/2006

@Verel
Encore un livre au sujet duquel il faudrait que je me renseigne plus. Merci pour l'info.

@Paxa
La méthode est décrite dans le manuel du parti, et en préface du Saint Capital ("Karl est son prophète, loué soit-il")

Écrit par : pikipoki | 20/03/2006

BON ANNIVERSAIRE POKOPOKO

Écrit par : Langui | 30/03/2006

Les commentaires sont fermés.