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10/04/2006

La relation d'aide selon Carl Rogers

Je découvre un peu par hasard un texte très intéressant de Carl Rogers repris par l'association Expérience & Partage sur son site. Je conseille de lire l'intégralité du texte, mais pour susciter un peu l'envie, voici l'introduction, qui présente quelques unes des principales questions posées par Carl Rogers pour établir une relation d'aide (on se situe ici dans le cadre d'une aide psychologique).

 

"J'ai un peu peur de lui, de pénètrer ses pensées qui sont en lui, comme j'ai un peu peur des profondeurs qui sont en moi.
Pourtant, en l'écoutant, je commence à éprouver un certain respect pour lui, à sentir que nous sommes parents.
Je devine combien son univers lui paraît terrifiant, quelle tension il met à essayer de le contrôler.
Je voudrais sentir ses impressions, qu'il sache que je le comprends.
Je voudrais qu'il me sache près de lui, dans son petit univers compact et resséré, capable de regarder cet univers sans trop de frayeur.
Je puis peut-être le lui rendre moins dangereux.
J'aimerais que mes sentiments dans ce rapport avec lui soient aussi  clairs et évidents que possible, afin qu'il les reçoive comme une réalité discernable à laquelle il pourra retourner sans cesse.

Je voudrais entreprendre avec lui cet effrayant voyage en lui-même, au sein de la peur ancrée en lui, de la haine, de l'amour qu'il n'a jamais réussi à laisser l'envahir.
Je reconnais que c'est un voyage très humain, et imprévisible pour moi, aussi bien que pour lui, et je risque, sans même savoir que j'ai peur, de me rétracter en moi-même devant certains des sentiments qu'il découvre.
Je sais que celà imposera des limites dans ma capacité à l'aider.

Je me rends compte que ses propres craintes peuvent par moment l'amener à voir en moi un intrus, indifférent et repoussant, quelqu'un qui ne comprend pas.
Je veux accepter pleinement ses sentiments en lui, tout en espérant que mes propres sentiments éclateront si clairement dans leur réalité qu'avec le temps, il ne pourra manquer de les percevoir.
Et surtout, je veux qu'il rencontre en moi une personne réelle.
Je n'ai pas  à me demander avec gêne si mes propres sentiments sont "thérapeutiques".
Ce que je suis et ce que je sens peut parfaitement servir de base à une thérapie, si je sais "être" ce que je suis et ce que je sens, dans mes rapports avec lui de façon limpide.
Alors il arrivera peut-être à être ce qu'il est, ouvertement et sans crainte.
"

 

Il y a beaucoup de choses à glaner dans ce texte, qui est d'ailleurs peut-être un peu trop synthétique pour les lecteurs qui ne se sont jamais penchés sur ce type de problématique. Je retiens un point essentiel, qui est à mon sens le fondement de toute relation d'appui psychologique (tant qu'on n'est pas dans un démarche médicale en psychiatrie): on aide l'autre en travaillant sur soi.

 

Cela signifie que pour parvenir à véritablement aider l'autre, il n'y a rien de mieux que de lui montrer, par l'exemple de soi, la voie qu'il peut suivre. C'est cette phrase qui l'exprime le mieux dans le texte cité plus haut: "Ce que je suis et ce que je sens peut parfaitement servir de base à une thérapie". En effet, si l'on souhaite aider la personne à retrouver un état de sérénité et une bonne solidité psychologique, il n'y a rien de tel que de lui faire sentir ce que sont cette sérénité et cette solidité par son comportement.

 

Cette idée s'appuie à mon avis sur une observation que l'on peut faire assez souvent dans ses relations avec les autres: on agit toujours plus ou moins comme des miroirs les uns avec les autres. C'est pour cela que nous ne sommes pas tout à fait les mêmes avec notre famille, avec nos amis, avec nos collègues de bureau, etc, et que nous développons souvent des personnalités différentes pour nous adapter aux situations auxquelles nous sommes amenés à nous confronter.

 

Ce jeu de miroir peut être mis à profit dans le cadre de la relation d'aide, et c'est je crois là-dessus que l'on peut s'appuyer pour mettre en oeuvre ce que suggère ici Carl Rogers. C'est d'ailleurs un peu ce qui se passe lors d'une relaxation. En effet, une grande partie de la relaxation s'appuie sur le comportement de la personne qui parle. C'est sa voix monocorde, son ton chaud, calme et serein, qui est le premier agent de notre détente.

 

Et bien c'est un peu le même ressort que l'on peut utiliser dans le cadre d'une relation d'aide psychologique. En présentant à l'autre, par son visage, son regard, sa voix, son attitude corporelle, un comportement de sérénité, de solidité et d'attention, on lui ouvre la porte pour que lui-même emprunte le même chemin. En lui montrant ce qu'est ce chemin on l'aide à le suivre car on l'en rapproche.

 

Il ne s'agit évidemment pas d'imposer à l'autre de suivre les mêmes choix que soi, mais plutôt que celui-ci puisse suivre son propre chemin armé des mêmes atouts que soi. On y parvient notamment en éliminant les gestes parasites qui peuvent laisser croire à une ambiguité de sentiment, à une fausseté de comportement, en restant calme et concentré, sans être pertubateur ni intrusif, et surtout sans adopter une attitude supérieure. On dit beaucoup par ce langage corporel, on offre beaucoup, et l'on est parfois bien plus efficace qu'avec des mots.

Commentaires

Ce texte est saturé de "je" : quelle valeur argumentative peut-il avoir? Il me semble fonctionner comme une "litanie", un "mantra" qui consiste à répéter inlassablement la même chose, sans jamais rien démontrer ni confronter.

En plus, cette phrase me gêne beaucoup : "Je n'ai pas à me demander avec gêne si mes propres sentiments sont "thérapeutiques"." : mais si, il est drôlement important de se poser cette question !

Attention aux rapports de pouvoir : si on peut admettre que la relaxation à laquelle tu fais référence, repose sur l'acceptation d'un abandon, (c'est sa voix monocorde, son ton chaud, calme et serein, qui est le premier agent de notre détente, dis-tu) il n'en est pas de même dans une saine relation d'aide. La personne que tu es censée aider n'a pas à s'abandonner à toi, ni même à se livrer, à moins que tu ne sois psychiatre (or, ce ne semble pas être le cas envisagé ici).

Bref, ce texte me rend très méfiante sur les intentions de son auteur...

Écrit par : samantdi | 10/04/2006

ce texte me semble beau et bon pour son auteur. Mais sur quoi se fonde cette relation d'aide. Institutionnelle ? Demandée par l'autre ? parce que sinon n'est ce pas réellement une intrusion, et une auto thérapie

Écrit par : brigetoun | 11/04/2006

Pikipoki,on pourrait complèter avec cette sitation de Krishnamurti cité par André de Peretti " Êtes vous capable de regarder sans aucun sentiment de condamnation, d'évaluation "
Je ne pratique pas du tout la méditation ou la relaxation mais j'apprécie cette façon de concevoir le rapport à l'autre en général et qui peut être utilement utilisé dans une relation d'aide, d'accompagnement.

Écrit par : Quoique | 11/04/2006

Quoique
J'ai lu un peu Krishnamurti (même si à mon avis il devait être plus intéressant d'écouter une de ses conférences), c'est assez intéressant en effet, et cela rejoins en plusieurs points l'approche qui m'intéressait ici.

Brigetoun
Ma réponse sous le billet suivant

Écrit par : pikipoki | 12/04/2006

En 68 un amphi de Bordeaux III avait été rebaptisé "amphi Carl Rogers". Ses livres ont ensuite nourri l'idéologie qui a figé pour des années la pensée en sciences humaines. Relisez cette prose en regardant un peu de côté et retrouvez apparemment à propos de thérapie et de "centration sur le client" et de non-directivité (cette fois à propos de l'éducation ) une des sources de cette violence moralisatrice, intimidante (terrorisante ?) qui nous intime l'ordre de penser "bien"

Écrit par : phineus | 14/04/2006

Phineus
Je ne vois vraiment pas comment Carl Rogers pourrait être détourné pour établir le terrorisme intellectuel que vous indiquez. A moins de faire subir bien des distorsions à ses idées. Remarquez, le procédé ne serait pas nouveau.

Écrit par : pikipoki | 14/04/2006

Effectivement, formée comme thérapeute en relation d'aide, à une approche humaniste et non-directive, basée sur les enseignements de C.Rogers et de G.Lozanov, j'ai eu l'impression à l'occasion pendant ma formation, et plus tard dans ma pratique de me sentir contraint à des normes qui parfois m'apparaissaient comme très castrantes. EN plus, il règnent parfois un sentiment de super-puissance chez ces humanistes purs, dont lequel j'ai appris à me protéger. Je

Par contre les enseignements, le travail sur moi que j'ai fait avec ces mêmes approches qui m'ont formées, m'ont appris je dois bien le dire à devenir moi-même et à vivre constamment mieux mon unicité à chaque jour. Dans toutes les disciplines les extrémistes favorise la rigidité et le terrorismes intellectuels

Écrit par : Lucie Bélanger | 29/01/2007

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