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06/06/2006

Précipitation fraternelle

medium_Le grand frère.jpgHier soir, ne voulant pas dormir, j'ai prolongé ma présence devant la télé jusqu'à une heure un peu trop avancée. Ce qui m'a donné l'occasion de découvrir une émission que je ne connaissais pas : "le grand frère". Le concept en deux mots: un adolescent mal poli et rebelle pourrit la vie de sa famille et en particulier de ses parents, en rejetant toute forme d'autorité et en agissant en chef tyrannique. Mais heureusement, TF1 connaît un gars bodybuildé qui a les idées claires sur ce qu'est l'éducation, et qui est volontaire pour aller soulager ladite famille en remettant le rejeton dans le droit chemin.

 

Je ne veux pas ici faire une critique exhaustive de l'émission car ça n'aurait pas grand intérêt. Le sujet qu'elle propose est assez prenant, mais elle n'évite pas les caricatures et les simplifications un peu inhérentes à toutes émission de télé-réalité qui, si elle veut survivre, doit proposer de l'émotion, du "prêt-à-vivre" sans temps mort.

 

Oui mais voilà, cette nécessité si l'on peut dire crée son vice, et il n'est pas mince. Car pour justifier son existence, l'émission doit bien sûr donner l'impression de l'efficacité. Si le "grand frère" ne parvenait pas à résoudre le problème de la famille dont il est question, l'émission se détruirait d'elle-même. Du coup on assiste à la fin de l'émission à la résolution complète du problème: les parents découvrent qu'en fait ils s'étaient perdus de vue sans le savoir et qu'ils ne se faisaient plus confiance ce qui serait en fait la principale cause du comportement de leur fils, et celui-ci bien sûr redevient le gentil garçon qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être, avec en prime un contrat de stage d'un mois dans un garage près de chez lui pour retrouver enfin une activité qui ne le laisse pas désoeuvré.

 

Je ne voudrais pas remettre en cause les compétences du grand frère casté par TF1 pour résoudre les problèmes de relations parents-enfants, mais tout de même, je me permets d'émettre des doutes sur les résultats réels de la démarche suivie. Et au-delà de ses simplismes, ce qui me semble catastrophique dans un programme de cette sorte, c'est qu'on donne aux gens une vision complètement faussée du travail humain qui est à réaliser dans de telles circonstances. De plus, par ricochet, on déforme la façon dont les téléspectateurs vont par la suite appréhender ce type de sujets.

 

Alors disons-le, non il ne suffit pas d'une séance éclair de thérapie de couple pour que les amants perdus se retrouvent, il ne suffit pas de se laisser tomber une fois en arrière dans les bras de son conjoint pour retrouver une pleine et entière confiance en lui, il ne suffit pas de quelques jours à être talonné par un costaud pour retrouver le respect envers l'autorité, et encore moins d'un simple contrat de stage d'un mois (le énième si l'on en croyait l'émission) pour donner un sens à son avenir. C'est peut-être dur, mais c'est comme ça.

 

Une thérapie c'est long, ça prend du temps, ça demande un travail sur soi sérieux, conséquent, qui appelle souvent des prises de conscience difficile à accepter, qui soulève parfois des choses douloureuses. Bref, c'est bien loin de produire des résultats durables avec un simple claquement des doigts. C'est un vrai chemin, et je crois que précisément, l'une des premières choses qu'il est important que les personnes qui s'y engagent doivent accepter, c'est cette longueur de temps qu'est susceptible de nécessiter la thérapie, et les douleurs qu'elle risque de faire ressurgir. Sans cela, le risque est fort qu'elles laissent tomber en chemin, perdant ainsi tout le bénéfice de ce qui a été fait, juste parce qu'elles ne se seront pas assez préparées à la démarche.

 

Mes meilleurs lecteurs trouveront sans doute que ce billet est un peu vain, tant la profondeur d'un tel programme était jouée d'avance. Mais tout de même, je ne peux m'empêcher de penser à tous ceux qui regardent ce type d'émission et qui faute de n'avoir jamais abordé ce type de réflexion personnellement, n'ont pas les outils pour bien décrypter ce qui leur est montré. Et surtout qu'il est pour le moins étrange sinon paradoxal qu'une émission qui aborde ce thème adopte au final une démarche qui détruit ses fondements.

Commentaires

Est-ce que le grand frère était un ancien para ? L'émission aurait alors au moins eu le mérite de réconcilier TF1 avec la gauche sur l'autel de l'autorité !

Écrit par : GroM | 06/06/2006

;o)

Écrit par : pikipoki | 07/06/2006

Je suis d'accord avec toi sur une partie du fond que tu soulèves, essentiellement le rapport au temps pour une thérapie, quelqu'elle soit, rapport totalement nié dans ce type d'émission en particulier, mais dans notre société dans son ensemble, où tout doit aller vite, où le moindre effort est exclu, où la moindre difficulté est à banir (la dernière version de cette "philosophie" étant l'anecdote du "livre" autobigraphique d'Hervé Vilard proposé à des lycéens par des profs de français de Montpellier car plus accessible que les Confessions de Rousseau).

Cependant, concernant le comportement du "petit con" montré à l'écran (j'avoue, je n'avais moi aussi pas envie de dormir lundi soir et j'ai donc moi aussi regardé cette émission produite par Julien Courbet, c'est peu dire si elle doit être de qualité), je crois qu'il est en effet possible, avec un discours un peu ferme, de "recadrer" un ado de ce genre en très peu de temps. Le fameux Pascal n'est pas un ancien para (le site de TF1 nous indique qu'il est en fait "éducateur pour enfants à problèmes depuis une quinzaine d'années, troisième dan de Kung-Fu Wushu") mais je croyais sincérement qu'il était ancien militaire (il en a le physique il faut dire). Et quand on a fait un vrai service militaire comme c'est mon cas (j'aime bien faire l'ancien combattant), qu'on a été confronté à ce type d'ado en rupture par manque de repères et en fait en recherche de figures d'autorité, qu'on a vu l'effet de deux ou trois semaines de "classe" menées par un sergent sachant se confronter à ce type d'individus sur les plus têtes brulées, on change un peu d'avis sur l'approche musclée et virile pour ce type de "petits cons" (c'est le qualificatif qu'emploie le fameux Ghislain de l'émission de lundi dernier pour parler de lui à la fin de l'émission). C'est aussi une forme d'éducation: fixer des limites, rétablir une hiérarchie, faire preuve d'autorité y compris parfois physique, tout en faisant confiance, en valorisant les progrès.

Par contre, pour le couple, c'est une toute autre histoire, je te rejoins totalement sur ce point...

Écrit par : Krysztoff | 07/06/2006

Tiens welcome back here Krysztoff ! Et merci pour ces informations intéressantes.

Écrit par : pikipoki | 07/06/2006

il y a très longtemps, ils avaient fait cette émission avec... David Douillet.
C'était quelque chose d'assez édifiant: un enfant pleure, David va le voir, il apprend que l'enfant est la victime de ses petits camarades qui l'ennuient à longueur de journée. Ca ne se passera pas comme ça! David met son casque, enfourche sa moto et file dans le quartier où vivent les petits tyrans. Arrivé là bas (où la caméra l'attend, ils ont du prendre un raccourci) il choppe trois gamins et leur explique que si ils continuent à em-------- le petit, ils auront affaire à lui!
Le sentiment du devoir accompli, David part pour un ailleurs où l'injustice règne encore, mais plus pour longtemps! (il devait au moins régler trois ou quatre problèmes par émission...)

Écrit par : clic | 07/06/2006

peut on empècher l'être humain d'être sot et d'aimer ça ?

Écrit par : brigetoun | 07/06/2006

Les commentaires sont fermés.