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24/03/2006

Sociologie française et CPE

C’est un article très intéressant de The Observer découvert dans le Courrier International de la semaine dernière qui me ramène sur les rivages troublés du CPE. Dans cet article, Jason Burke, correspondant en France du journal anglais, aborde la question des manifestations actuelles contre le nouveau contrat proposé par le gouvernement d’un point de vue proche de la sociologie. Car désormais c’est assez clair, les manifestations qui ont lieu dépassent le seul cadre du CPE.

 

Il observe avec étonnement, et aussi un certain amusement, comment les jeunes qui défilaient sous sa fenêtre le samedi 12 mars semblaient loin des réactions qu’il aurait pu observer dans son propre pays dans le cadre d’une réforme similaire. Le faible impact prévisible de la réforme en cours ne devrait-il pas soulever que de maigres réactions au lieu de cette incroyable levée de boucliers où l’on sent se réveiller un parfum de mai 68 ?

 

D’où vient cet écart, si grand, entre les mouvements sociaux, si fréquents et si forts, constatés en France et ce qui se passerait dans tout autre pays d’Europe ? La France semble-t-il, devient de plus en plus difficile à comprendre pour les pays étrangers. Tant et si bien que Jason Burke égrène au fil de son article le lexique de base nécessaire à assimiler pour cerner notre réflexion politique et sociale.

 

L’analyse qu’il propose ensuite, a sans doute souvent été avancée, mais elle me semble néanmoins mériter d’être reprise pour comprendre la situation actuelle et mieux l’évaluer. L’essentiel écrit Burke, vient de ce que la France reste toujours plus ou moins en marge du mouvement de mondialisation qui gagne les autres pays.

 

« France is defiantly not part of the consumerist, capitalist, US-led economic and cultural wave that is engulfing the world. France is different.”

 

Or, cette différence, que je crois effectivement assez fortement revendiquée dans notre pays, notamment au travers de cette “exception culturelle” que nous affirmons souvent avec fierté, ne peut survivre aux forces de pression s’exerçant constamment par l’extérieur sur notre coque nationale que si un projet géopolitique mondial lui donne un appui solide qui en fasse autre chose qu’une revendication utopique. Ce projet, c’est le fameux monde multipolaire si cher à Chirac, et dont l’idée à probablement gagné la plupart des gens.

 

Et dans ce projet, la place que nous souhaitons pour la France n’est évidemment pas celle d’un simple participant à un pôle concurrent à celui des Etats-Unis. Il s’agit clairement d’en prendre le leadership afin que notre présumée différence puisse s’exprimer pleinement. Ainsi Burke note-t-il :

 

"[In their view] the leaders of the pole opposed to the Anglo-Saxons’ would be the French."

 

Il poursuit en décrivant ce que ce terme “Anglo-Saxon” recouvre en France et quelles en sont les connotations:

 

"Anglo-Saxon […] means anglophone, economically liberal, rampantly capitalist. It means the brutish British with their powerful economy and low taxes, their lower levels of unemployment but higher levels of poverty. It means the unsophisticated, insular, ignorant, crassly self-confident Americans […]”

 

L’analyse peut paraître simpliste, trop souvent rabâchée, mais elle contient un gros fond de vérité qu’on ne peut vraiment pas nier. Je crois comme Burke que LA grande peur française se situe bien là : dans le risque de voir notre identité disparaître, emportée par la vague culturelle américaine, et dans le risque qu’en suivant les autres pays dans la voie expresse de la mondialisation, sans avoir pu vraiment au préalable anticiper ce vers quoi elle nous menait réellement, on se retrouve à plus ou moins long terme dans une impasse sociale d’où on ne pourra plus sortir.

 

Cette crainte est probablement alimentée par une intuition collective : celle que le libéralisme sur lequel repose la mondialisation n’est que la traduction en idéologie économique de la tendance préoccupante de nos sociétés modernes vers l’individualisme. Le libéralisme économique fonctionne sur le principe de la concurrence libre, ce qui signifie au final que dans ce système c’est le meilleur qui gagne, avec le corollaire naturel et très fréquent du « chacun pour soi ».  Ce sont les excès de cette logique libérale, dont je crois nous avons peur en France, car, pensons-nous, ils peuvent toucher aussi bien nos emplois que notre mode de vie. Ne plus créer qu’une société jungle dans laquelle plus aucun projet collectif n’est envisageable.

 

« All is thus insecure, threatened, precarious, wether jobs or a way of life. » Ecrit encore Jason Burke.

 

Philosophiquement, cette crainte ne m’apparaît pas illégitime. J’ai déjà indiqué au détour d’une note se fondant sur la théorie de Laborit quel pouvait être le piège de la concurrence. Celle-ci institue une logique d’affrontement, même si celui-ci n’est qu’économique. Dans cet affrontement, les adversaires ont tous le même objectif, ils veulent tous obtenir la même gratification. Mais celle-ci n’est pas partageable en autant de part qu’il y a de concurrents, et certains vont donc nécessairement disparaître dans la bataille.

 

Avec la notion de propriété et l’émergence du besoin de gratification est née une tension naturelle qui nous pousse à nous affronter les uns les autres. Le principe de la concurrence participe pleinement à ce schéma, et c’est pourquoi je comprends qu’on puisse s’inquiéter de ce que ce principe s’étende de façon aussi généralisée à la planète. Je ne vais pas réécrire tout mon précédent billet sur le sujet, et vous y renvoie donc, surtout ceux qui jugeraient que ce n’est là que l’idée d’un nostalgique benêt du communisme (je ne suis pas communiste et j’espère ne pas être un benêt).

 

Maintenant qu’en est-il de la réalité de cette crainte française sur les plans économiques et sociaux ? Est-elle un pur fantasme ou s’appuie-t-elle sur quelques éléments tangibles ? Je ne vais pas m’engager ici dans une analyse très détaillée de la question à la manière de Ceteris Paribus, ne serait-ce que pour ne pas me couvrir de ridicule par rapport à ce qu’il serait capable de produire. Mais je voudrais tout de même relever quelques indicateurs qui m’apparaissent comme étant les plus pertinents pour juger la performance d’un système économique et social : le taux de croissance, le taux de chômage, le taux de pauvreté, l’espérance de vie, et le taux de mortalité infantile, les deux premiers indicateurs servant essentiellement à la mesure du système économique, et les trois suivants étant plus orientés vers la performance du système social. Basique, sans doute simpliste, mais ces chiffres sont à mon sens ceux qui parlent le plus, c’est pourquoi je n’ai retenu qu’eux.

 

Ces chiffres sont extraits de données de l’OCDE. Je ne présente volontairement que quelques pays afin d’éclaircir les tableaux et d’en rendre la lecture plus aisée. Pour voir l’intégralité des informations, suivre les liens.

Tout d’abord, voyons les chiffres de la croissance et du chômage pour les années 2004 et 2005. N.B : les taux de chômage du R-U, de la Norvège et de la Suède ne figuraient pas dans les données 2005 que j'ai récupérées. (j'espère que les tableaux sont lisibles ainsi car ils ne s'agrandissent pas quand on clique dessus...) :

medium_taux_de_croissance_ocde.jpgmedium_taux_de_chomage_ocde.jpg

 

Pas besoin de grandes explication : la France a affiché ces deux dernières années l’un des taux croissance les plus faibles des pays de l’OCDE, et inversement l’un des taux de chômage les plus élevé. Petite incise ici concernant le cas du Royaume-Uni où je renvoie à une ancienne note de Krysztoff qui avait montré que les chiffres du chômage anglais ne reflétaient pas la réalité. Sur ce point je n’ai encore rien lu qui vienne contredire son analyse de façon probante. Mais on comprend en lisant ces chiffres que les économistes soient nombreux à réprouver la voie suivie par la France et qu’ils conseillent plutôt de s’en remettre aux recettes libérales appliquées avec succès dans les pays Anglo-saxons. Les Etats-Unis pour ne citer qu’eux, présentent des taux de croissance supérieurs à la France depuis maintenant presque 15 ans ! Pourquoi n’applique-t-on donc pas leurs recettes ?

 

En fait, le défaut que je trouve dans les articles économiques que lis ici ou là, est qu’ils se restreignent trop souvent à leur seule discipline pour juger de questions qui nécessitent des enquêtes plus globales. L’analyse économique ne suffit pas à embrasser les enjeux de la croissance et du chômage, et je note qu’on semble souvent oublier que cette discipline n’est en aucun cas une fin en soi, pas plus que la performance économique d’un pays n’est une fin en soi.

 

L’économie n’est qu’un moyen, un outil, pour accéder à plus de bien-être, à une vie sociale plus harmonieuse. L’élevée au rang d’étalon suprême à l’aune de laquelle devrait être prise toute décision serait une grave erreur à mon sens, car elle ne peut pas prendre en compte tous les éléments qui contribuent à cet objectif final que j’ai indiqué.

 

Il faut donc évaluer aussi la performance sociale d’un pays pour bien évaluer son modèle. Voici les chiffres trouvés sur le site de l’OCDE en matière de pauvreté, d’espérance de vie et de mortalité infantile, indicateurs qui me semblent être parmi les plus pertinents pour évaluer ce qui nous intéresse ici (le graphique sur la pauvreté que je présente croise les taux de pauvreté avec les dépenses publiques, seul l'indication du taux de pauvreté m'intéresse ici -si vous trouvez plus clair, n'hésitez pas à me l'indiquer).

medium_graphique_pauvrete.2.jpg

medium_esperance_de_vie_ocde.4.jpgmedium_taux_de_mortalite_infantile_ocde.3.jpg

 

 

On constate à la lecture de ces tableaux que si la France semble bien en retrait sur le plan de la performance économique, elle reste toutefois plutôt en avance par rapport au Royaume-Uni et aux Etats-Unis concernant sa performance sociale. Le taux de pauvreté du Royaume-Uni est proche de 8%, celui des Etats-Unis culmine à près de 14%, tandis que celui de la France est parmi les plus faibles, s’établissant à près de 6% seulement. Ces éléments, et surtout le taux de pauvreté, sont souvent ceux qui sont mis en avant par les contempteurs du modèle anglo-saxon. Et je dois dire que sur ce point je m’associe à eux pour dire qu’à leur lecture, il s’en faut de loin que la performance économique soit un objectif prioritaire, et que la prudence est bien de mise quant à suivre les recettes anglaises et américaines.

 

Trois choses maintenant pour conclure ce billet.
La première c’est que finalement je ne fais ici que soulever des questions et que j’apporte peu de réponse. D’une manière générale je dois dire que je comprends l’inquiétude qu’ont certains face à la voie de la mondialisation libérale qu’on nous assène de plus en plus comme étant obligatoire, alors même que les résultats que l’on constate dans certains pays sont loin d’être probants. On avance un peu dans l’inconnu, et si la méfiance serait sans doute excessive, du moins la prudence me semble de mise quant à juger des effets à long terme des modèles économiques proposés.

 

La deuxième c’est que cette rébellion française à un intérêt, peut-être même à une échelle supérieure que celle de notre seul pays. Car elle crée une forme de dialectique, un débat qu’il me semble naturel et bon d’avoir sur des éléments aussi difficiles à évaluer, tant sur de longues durées qu’à l’échelle d’une planète entière. Cela évite d’avancer tout schuss avec un seul bâton en main pour se guider, et permet donc que des réajustements puissent se faire. A l’échelle mondiale bien sûr cela paraît inaccessible tant notre influence est devenue dérisoire, mais au moins dans notre pays, et peut-être encore un peu à l’échelle européenne cette dialectique n’est-elle pas inutile.

 

La dernière enfin, c’est que malgré tout cela, fonctionner sur la peur de l’avenir ne me paraît évidemment pas sain. Elle génère des réflexes défensifs stériles de repli sur soi, de recroquevillement. Elle pousse à ne réagir que par précaution et non par proposition, ce qui, au final, assèche le pays, et accroît notre sentiment de frustration. Rien de vraiment bon ne peut sortir de cette peur si on ne sait pas la transformer en une critique constructive qui nous sorte de l’immobilisme. Mais pour cela il faut des changements d’orientation politique importants, et beaucoup, beaucoup de communication, d’écoute, d’explications avec une population qui semble décidemment ne plus avoir confiance en grand-chose, et en ses représentants peut-être moins qu’en tout le reste.

Commentaires

Bonjour,
Promouvoir un monde multipolaire c'est bien joli mais c'est insuffisant. Il faut un projet collectif qui réhabilite l'humanisme au passage. Nous sommes tous des êtres humains sur cette planète AVANT d'être de telle nationalité, de telle religion, etc. Qui peut nier cette évidence ? Nous sommes en train de détruire la planète mais consacrons plus de temps encore à nous entredéchirer. Nous avons un destin collectif que nous le voulions ou non.
L'actuelle crise anti-CPE, tout comme les "émeutes de l'automne" ne sont que les avatars d'une crise bien plus profonde, celle du Sens. Les autres symptômes en sont l'augmentation de la violence dans tous les compartiments de la société, l'augmentation de la maladie mentale, des maladies liées au stress, etc. Ce sont en effet des réactions liées à la peur.
Quelles sont nos valeurs ? Aujourd'hui, chaque "commnauté" a les siennes.
Le jeu des cyniques met en avant ce qui divise au détriment de ce qui réunit. Il faut nous élever au-dessus de ces comportements contre-nature.
The Observer commente l'idée de multipolarité de J. Chirac en s'en tenant à l'évocation de la rivalité bipolaire Anglo-saxons/Français. C'est révélateur de notre difficulté à lire le monde. Quid de l'Afrique, de l'Asie..., ceux-là doivent-ils nécessairement s'inscrire dans cette alternative. C'est ridicule.
Multipolaire, oui. Mais avec une instance supranationale légitime et reconnue par tous. On peut rêver : un "conseil des sages" composé de scientifiques, d'hommes et femmes de culture..., qui propose des grandes orientations à l'ONU.
Pourquoi l'ONU a-t-elle perdu sa légitimité face aux Etats-Unis? Voilà la question à laquelle les médias devraient s'atteler à répondre, au lieu de faire de la pub aux casseurs.
A+

Écrit par : joss | 24/03/2006

Le CPE il faut l'enlever cela ne réduira pas le chomage ou tellement peu. Il faut une vrai flexibilité du travail et des entreprise.
Quand on voit la tache ardu à faire un dossier ACCRE. Je comprends pourquoi il y a tellement de chomage. C'est décourager des chomeurs à travailler. Il vaut mieux rester à la maison et à rien faire ou à être bénévole ou travailler au noir que faire sa propre affaire légualement.

Non au CNE non au CPE oui à une simplification administrative !

http://actocom.blogspot.com

Écrit par : actocom | 24/03/2006

Concernant la mesure de pauvreté, je ne parviens pas à retrouver ce graphique sur le site de l'OCDE, mais je me demande si ce n'est pas le nombre d'habitants ayant un revenu en dessous d'un certain pourcentage de la médiane. Que les experts me corrigent, mais cette pauvreté là serait plutot une mesure d'inégalité entre les plus pauvres et le reste de la population. Donc, cela ne voudrait pas nécessairement dire qu'un pauvre anglais soit plus mal loti qu'un pauvre français en pouvoir d'achat brut. Et cela expliquerait peut-etre que les migrations aillent plutot vers la GB que dans l'autre direction.

Écrit par : wavrill | 24/03/2006

j'aime beaucoup vos deux dernières conclusions. Maintenant nous n'avons pas su le faire (notre génération) et mes connaissances sont faiblissimes en économie (je me console avec Bernard Maris). A votre génération d'essayer, avec notre appui, de nourrir ce débât.
Et Joss un problème de sens bien sur mais aussi dans la pratique pour ceux qui constituent la masse croissante des travailleurs pauvres, sans parler des chômeurs ou des "bénéficiaires" des dispositifs sociaux

Écrit par : brigetoun | 24/03/2006

Bonjour Pikipoki,

Que les indicateurs strictement économiques ne soient pas les seuls pertinents pour estimer l’état d’une société est une évidence. Un article de Marc Fleurbaey il y a quelques mois (http://www.telos-eu.com/2006/01/la_competitivite_et_le_farnien.php) sur Telos-eu allait dans ce sens. Qu’il faille de temps en temps le rappeler me parait également sain la croissance n’étant pas, en effet, une fin en soi.
Pas une fin en soi, mais nécessaire tout de même. Comme le rappelait Alexandre Delaigue (http://econoclaste.org.free.fr/dotclear/index.php/?2006/02/22/385-inutile-debat-social) à propos des incessantes discussions sur les "modèles sociaux » : « Dans le domaine social, il y a trois problèmes principaux : l'adaptation des systèmes sociaux au vieillissement des populations, les conséquences et la maîtrise de la croissance des dépenses de santé, et améliorer le fonctionnement du marché du travail de façon à éviter que certaines catégories de la population n'en soient exclues. Vaste programme... Qui n'a strictement aucune chance d'être réalisé correctement sans une croissance économique forte. » Si la « performance sociale » de la France est encore appréciable comme vous le signaler elle le doit essentiellement à un système de redistribution très fort mais (je renverrai cette fois à l’article de Laurent Davezies et Pierre Veltz dans le Monde de Lundi) « vivre de redistribution protège à court terme, mais devient dangereux à moyen terme, surtout si les locomotives donnent des signes de faiblesse, ce qui est le cas de l'économie francilienne, lourdement obérée par la montée de la pauvreté, le manque de logements, les difficultés de la vie quotidienne et la propension croissante des Parisiens à dépenser leurs revenus ailleurs. Et la réduction incessante de la part de la population travaillant dans des entreprises confrontées à la concurrence internationale risque de faire oublier combien il est vital pour notre pays de disposer d'un tissu territorialement ramifié de PME industrielles et tertiaires compétitives. » J’ai peur que la crispation ambiante (je ne dis pas que l’inquiétude n’est pas motivée, toute réforme, même dans le sens de l’intérêt général fera nécessairement des perdants) bloque les choses jusqu’au pourrissement, que nous ne soyons en bref (si j’ose dire, car ce commentaire commence à devenir vraiment long, excusez moi) prêts à ces changements qu’une fois le point de rupture (le dépôt de bilan ?) atteint.

P.s. : je ne suis plus à quelques mots près… Concernant le début de votre note et le rêve de "grande nation" de la France face à l’hégémonie anglo-saxonne, nous en avons eu un exemple récemment avec la sortie toute théâtrale de notre (jamais ridicule) président au conseil européen.

Écrit par : aymeric | 24/03/2006

A mon humble avis, avec Bernard Maris, on ne se console pas, on s'enfonce. Heureusement, Econoclaste vient à la rescousse.

Écrit par : Denys | 24/03/2006

@Joss
Je suis assez d'accord sur le fait qu'il y a un problème de sens, qui vient du fait qu'on ne voit plus de vrai projet émerger et qu'il n'y a guère que des mesurettes qui sont proposées. Et il y a aussi une incompréhension grandissante entre dirigeants et population, en particulier avec les jeunes.
Ce point là me semble devenir l'un des plus grands enjeux pour l'avenir.

@actocom
Je ne saisi pas le lien entre le CPE et les difficultés à faire un dossier ACCRE. Y 'en a-t-il?

@wavril
Le graphique sur la pauvreté est extrait d'un article trouvé sur le site de l'OCDE. En voici le lien:
http://www.observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/1356/Combattre_la_pauvret%E9.html
Et pour voir directement le graphique
http://www.observateurocde.org/images//1355.photo.jpg

Je ne crois pas qu'il s'agisse comme vous l'indiquez d'une mesure d'inégalité, mais bien de la mesure du taux de pauvreté (je ne vois pas bien pourquoi il porterait ce nom sinon).

@Brigetoun
Merci encore pour vos encouragements. Je ne sais pas si j'aide beaucoup le débat, disons que j'essaie un peu avec ce blog. Sans doute une implication à d'autres niveaux serait-elle souhaitable ?

@Aymeric
Assez d'accord avec votre commentaire en fait, et merci pour le lien vers le billet d'econoclaste queje devrais lire plus souvent (ça devient de plus en plus dur de suivre tout ce qui se fait d'intéressant sur les blogs !). Mais pour reprendre encore des éléments simples mais qui, oui, méritent d'être rappelés, il faut toujours avoir en tête les différents angles d'approche des problèmes à résoudre pour apporter des réponses justes. Que l'économie puisse être l'un des angles principaux, sans doute, mais il ne doit pas rester seul à orienter notre réflexion.

Écrit par : pikipoki | 25/03/2006

Merci pour le lien. J'ai pu y trouver ceci sur le taux de pauvreté.

"La notion de pauvreté peut être abordée sous deux angles. Tout d’abord, certaines personnes ne peuvent même pas accéder aux biens ou aux services de première nécessité. C’est la pauvreté absolue, en net recul dans les pays de l’OCDE selon la plupart des indicateurs [..].
La pauvreté relative est plus problématique. Elle se calcule notamment en fonction du revenu moyen ou médian des ménages. Elle permet en substance de mesurer le degré de privation de biens et services couramment consommés. Au milieu des années 80, la proportion de la population de la zone OCDE ayant moins de la moitié du revenu disponible médian était d’environ 9 % en moyenne, et d’un peu plus de 10 % en 2000."

Il semble que le taux du graphique soit en pauvreté relative, c'est à dire la proportion de la population ayant moins de la moitié du revenu médian. Donc si, en Grande bretagne, le revenu médian est plus élevé qu'en France, on peut se retrouver à la moitié de ce revenu tout en étant plus riche qu'un français dans la même situation.

Écrit par : wavrill | 25/03/2006

@Wavril
En admettant que ce soit bien ça, de toute façon la notion de pauvreté relative me semble la plus juste pour évaluer la situation d'une personne. Un pauvre vivant en Angleterre n'a que faire de savoir qu'il serait un peu moins pauvre s'il vivait en France, et de toute façon, sa situation ne lui permettrait certainement pas de franchir la manche avecune grande facilité (sauf à supposer que le revenu médian anglais soit beaucoup plus relevé qu'en France, ce qui me semble tout de même plus que douteux, l'écart de ces deux économies n'étant pas immense).

Écrit par : pikipoki | 25/03/2006

Je dirais plutot qu'un pauvre vivant en Angleterre n'a que faire de savoir s'il est deux fois ou cent fois moins riche que l'individu médian. Si on met de coté le facteur "frustration",
ce qui lui importe c'est ce qu'il peut se payer. Hors cette mesure ne l'évalue pas.
Ceci dit, peut être que le salaire médian anglais n'est pas si élevé qu'il puisse compenser la différence de cout de la vie, mais c'est à vérifier.

Écrit par : wavrill | 25/03/2006

"Seul l'indication du taux de pauvreté m'intéresse ici -si vous trouvez plus clair, n'hésitez pas à me l'indiquer)."
Voir Eurostat : http://epp.eurostat.cec.eu.int/portal/page?_pageid=1996,39140985&_dad=portal&_schema=PORTAL&screen=detailref&language=fr&product=sdi_ps&root=sdi_ps/sdi_ps/sdi_ps1000
Les chiffres ne sont pas les mêmes, les définitions étant différentes (60% du revenu médiant, 50% pour les chiffres OCDE). Mais le classement reste le même (à peu près). Il manque cependant les chiffres pour les USA.

Écrit par : EL | 25/03/2006

@Wavrill
la remarque est pertinente, et occupe depuis longtemps les économistes et les sociologues, qui s'écharpent autour des notions de pauvreté relative et absolue, de parité de pouvoir d'achat, etc. Ce n'est d'ailleurs pas très nouveau (voir les travaux de Hacking sur l'histoire du seuil de pauvreét : "Façonner les gens : le seuil de pauvreté"). Ceci étant dit, 60% du revenu médian, même au RU c'est pas bezef : 600 livres par mois environ. Avec les prix de l'immobilier britannique...
PS : désolé pour les fautes ("médiant"), il commence à se faire tard...

Écrit par : EL | 26/03/2006

Merci à Wavril et EL pour leurs précisions.
Je crois à vous lire que nonobstant la définition que l'on pourrait donner à la pauvreté, nous tombons à peu près sur la même conclusion.

Écrit par : pikipoki | 27/03/2006

quelques remarques

- le taux de pauvrete est une image statique du pays
- il y a beaucoup d'immigration au uk, (beaucoup de plombier polonais par ex). Ils commencent pas en haut de l'echelle, mais restent ils en bas ?
- l'esperance de vie est certainement tres dependantes d'autres facteurs comme les habitudes alimentaires(Fish and chips, l'alcool).


et sur l'article de Krysztoff il y a beaucoup a dire sur la France avec les pre retraites et l'allongement de la duree des etudes ... Et au fait il existe un organisme qui donne des chiffres en utilisant la meme methodologie le BIT (ou ILO en anglais) non ?

Écrit par : arnaud | 27/03/2006

Arnaud
La pauvreté une image statique? que voulez-vous dire exactement? Que ce n'est qu'une photo? Si c'est le cas, il me semble que n'importe quel indicateur quantitatif (croissance, chomage, pauvreté, etc.) est aussi une image statique. Ca ne veut pas dire qu'il est dénué de sens, si?

Je n'ai pas les chiffres de l'immigration UK comparés à la France. Mais je ne vois pas là non plus ce que ça changerait sur le fond de la situation de pauvreté des pays en cause.

Concernant l'espérance de vie, oui, vous avez certainement raison. Mais est-ce que ces facteurs sont prépondérants? Et surtout, ne sont-ils pas en grande partie la résultante d'une souffrance sociale (les populations aisées n'étant pas celles qui remplissent les clubs d'AA ou les Mac Do). Ce que je veux dire c'est qu'on peut évidemment trouver des limites à ces indicateurs, et vous avez raison de les souligner. Mais pour autant je ne pense pas qu'il faille les rejeter et les informations qu'ils donnent me semblent raisonnablement comparables d'un pays à l'autre.

Sur l'article de Krysztoff, votre remarque est juste. Je ne sais pas en revanche évaluer l'impact de ces éléments sur le taux d'activité de la population. Et ça ne remet pas en cause l'idée que le modèle britannique présente une performance réelle sur l'emploi plus faible que celle affichée.

Enfin, vous auriez le nom de l'organisme dont vous parlez? Il présente des résultats sensiblement différents que ce que je montre dans mon billet?

Écrit par : pikipoki | 27/03/2006

Je veux dire pour moi si les pauvres annee n ne le sont peut etre plus annee n+1, et que les pauvres annee n+1 sont des nouveaux entrants(immigrants, jeunes, nouveaux divorces ....). c'est mieux que si les pauvres annee n et n+1 sont les memes et la pauvrete n'est plus une phase transitoire. (je pense notament au belle trappes a pauvrete qu'il y a en France).

La comparaison de 2 systemes est perilleuse, je souligne juste des limites. Le taux de pauvrete est un taux relatif quel est le seuil de pauvrete en Angleterre et en France ? Y-a-t'il de grande disparite dans sa distribution ?

pour les chiffres du BIT(Bureau Internationnal du Travail) ils sont dispo sur le site de l'ocde. c'est 9.4 en 2003 pour la France et 5 pour le UK. Ils sont certainement plus a jour sur http://www.ilo.org/


Sur l'esperance de vie, vivant a Londres et travaillant avec des gens qui gagnent pas trop mal leur vie je peu t'assurer que les soirees du vendredi soir apres le travail sont assez destructive pour l'organisme. Et que le regime alimentaire qui cause des problemes et plus Biere et Burger au pub que Mc Donald.

Les anglais que je rencontre sont aussi content que les francais voir plus (il me semble qu'il y a une enquete sur le bonheur des populations qui pourrait clore se point en attendant c'est bien sur que mon avis ...), et le management dans les entreprises et loin de la misere francaise ...

Écrit par : arnaud | 27/03/2006

Il est difficile de comparer la France et le RU en matiere d'immigration, parce que les donnees ne sont pas toujours equivalentes.

Voila une source qui pourra peut-etre vous aider a comprendre la situation au RU:

Une etude recente fournit des donnees economiques interessantes au sujet du lien entre l'immigration et la pauvrete:
http://news.bbc.co.uk/1/shared/spl/hi/uk/05/born_abroad/economics/html/overview.stm

Le taux de chomage est au dessus de la moyenne nationale, mais beaucoup travaillent au noir. En moyenne, les immigres, moi y compris, ne s'en sortent plutot bien. Les immigres du Bangladesh et du Pakistan sont les plus mal lotis. Comme les maghrebins en France, ils se sont venus au RU pour travailler comme ouvriers. Ils n'ont pas de diplomes et leurs enfants vivent desormais dans des banlieues defavorisees. Le racisme et la religion n'arrangent rien...

Il ne faut pas idealiser le RU, c'est loin d'etre un paradis. Beacoup de Britaniques, 'born and bred', vivent dans une precarite perpetuelle, parfois depuis des generations. Le RU est un pays ou les inegalites sont encore plus flagrantes qu'en France, en partie a cause du liberalisme economique et de la flexibilite dans le marche de l'emploi.

Je ne suis pas 'reac' non plus. Le marche de l'emploi en France est sclerose, mais je ne pense pas non plus que l'ultra liberalisme convienne a la France. L'Etat francais doit continuer de penser a ces plus pauvres autant qu'aux classes moyennes. Ce serait dommage que la France perde meme l'illusion d'etre une meritocratie et devienne, en pratique, une ploutocratie a la sauce anglaise (!).

Comme l'auteur de ce blog, je ne pense pas que le CPE changera les choses, en partie parce que l'attitude des employeurs ne changera pas et que le systeme educatif ne changera pas non plus. Toutefois, comme les emeutes le demontrent, il est grand temps d'agir. La colere des etudiants n'a rien d'etonnant.

Écrit par : Frog | 28/03/2006

Frog

Je suis d'accord que le RU n'est pas la panacee, mais le France est loin d'etre le paradis que certain semble decrire. La pauvrete y est aussi presentes. Et nous avons aucune etudes fiables sur les discriminations et les differentes communautes.
Quand au pauvre de generation en generation cela existe aussi en France, combien de famille ou toutes les generations sont au chomage ?

Il est clair que le CPE ne changera pas grand chose, il est criticable, et l'autisme du gvt n'arrange rien.

En tout cas entre une economie qui marche et ou il y a de l'avenir et une autre qui tousse moi j'ai choisi. Et pour mon cas personnel j'ai des conditions de travail equivalente voir meilleurs qu'en France. Bizarre pour un pays ultra liberal, au fait a combien est le smic UK ?

Écrit par : arnaud | 29/03/2006

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