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26/02/2007

Deux idées sur l'accompagnement

Bruno, Quoique pour ses anciens lecteurs, a réagi à quelques reprises sur mon blog lorsqu’il m’est arrivé de parler de la notion d’aide. Il en a proposé une reformulation que j’aime bien : plus qu’une aide, c’est un accompagnement qu’il s’agit d’apporter aux personnes en difficulté. Cette façon d’envisager les choses me semblent effectivement apporter beaucoup à la relation que l’on entend alors nouer.

 

Cela permet d’abord de rester dans une relation d’égal à égal avec la personne accompagnée, ce qui est un des points qui me semblent les plus importants. J’avais indiqué dans mon étude sur ces questions qu’en effet la relation de dépendance, entre ce que j’appelais alors aidant et aidé, faisait prendre un double risque : celui d’humilier la personne aidée, et donc de prendre le risque qu’elle refuse cette aide qui l’abaisse, et également qu’en créant une dépendance trop forte on la privait de ces propres armes, de la maîtrise de son propre chemin qu’il lui faudra pourtant bien retrouver un jour si l’on entend que l’aide qu’on lui a apportée soit réellement efficace. Car au bout du compte ce sera bien à elle, dans la plus grande mesure possible, de reprendre les rennes.

 

La notion d’accompagnement donc, permet d’appréhender ces relations d’une façon probablement plus sereine pour les personnes y intervenant, plus riches aussi, car elle par de l’idée d’un échange entre les personnes.

 

Je voudrais aujourd’hui proposer deux idées qui me sont venues au sujet de l’accompagnement, et sur la façon dont il me semble possible de le mettre en place : d’abord ce que j’appelle l’exemplarité comportementale, puis une notion qui me tient de plus en plus à cœur, et sur laquelle je prévois d’ici quelques temps de revenir de façon approfondie sur ce site : la proximité humaine.

 

L’exemplarité comportementale est je crois une notion clé dans certaines démarches de psychothérapie. Elle signifie que le « patient » peut être plus secouru par le comportement du thérapeute que par ses mots. J’ai déjà dis une ou deux fois quelles peuvent être les limites des conseils adressés à une personne qui va mal. Les « tu verras ça ira mieux, «  les « si j’étais toi », tout cela est parfois non seulement inefficace, mais pire, contre productif dans la démarche que l’on entend avoir. Parce que l’on tente souvent, naturellement, par nos conseils d’enfermer l’autre dans la compréhension que nous avons de lui, ce qui non seulement l’humilie, mais le laisse surtout encore un peu plus seul, puisqu’encore un peu moins écouté, un peu moins compris.

 

En revanche, il est possible d’apporter beaucoup par son comportement. En vivant sa propre sérénité, on peut l’offrir en même temps à ceux qui nous entourent. On joue pleinement ici sur le jeu de miroir qui existe dans toute relation interpersonnelle, sur le mimétisme que nous avons tous appris depuis notre plus jeune âge. C’est désormais sans doute un poncif, mais ce mimétisme existe bel et bien. Il est en grande partie le reflet de notre besoin de reconnaissance et d’appartenance à un groupe. Et ainsi, en laissant s’exprimer notre paix intérieure, il nous est possible de l’insuffler un peu mieux à ceux que nous souhaitons soutenir. C’est une méthode qui me semble particulièrement faire ses preuves en psychothérapie car dans ce domaine le langage non verbal, corporel en particulier, joue un rôle primordial.

 

C’est cela pour moi l’exemplarité comportementale. Inviter librement l’autre dans un cadre serein et apaisé, en le créant soi-même par son attitude. Le terme est peut-être un peu mauvais d’ailleurs car la notion d’exemplarité peut faire croire à la prétention d’être un modèle, de se hisser au-dessus des autres pour distribuer la bonne parole. C’est tout le contraire.

 

La deuxième idée donc, c’est la proximité, celle exactement dont parlait Levinas dans le reportage que j’ai commenté ici il y a quelques mois. Cette proximité qui n’est surtout pas une façon de phagocyter et parasiter l’espace intime de l’autre, cette bulle qui nous entoure, qui  est plus ou moins grande chez les uns et les autres, et qui constitue les limites de notre espace vital, de notre intimité, qui dessine les contours de notre pudeur. Surtout pas une tentative de s’imposer donc, mais simplement l’expression d’une attention, d’une écoute sincère, d’une présence pour dire à l’autre que s’il le veut, il n’est pas seul.

 

C’est, pour reprendre les termes de Lévinas, donner la paix sans foutre la paix. En étant là, vraiment là, et pas simplement en docteur paternaliste qui s’oublie dans ses propres conseils. Et en laissant aussi l’autre être là, prendre la place qu’il souhaite, en l’aidant peut-être à l’agrandir un peu.

 

Cette proximité, on le comprend aisément, n’est pas qu’un outil thérapeutique. Elle est aussi à mon avis l’objectif que doit se donner une société si elle veut être unie, et ne pas se résumer à un pacte de non agression et à la régulation des échanges marchants. J’espère y revenir bientôt.

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