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31/12/2008

Tenter l'impossible

 

bouteille_la_mer.jpg

Les bouteilles à la mer

Sont de bien frêles esquifs pour porter nos messages.

La raison les déconseille.

 

Mais celles qui arrivent à bon port

Sont pour ceux qui les trouvent

Leurs plus beaux trésors.

30/12/2008

Un peu de vie ?

Dans mon billet de ce matin j'ai indiqué que pour moi être heureux c'était me sentir plein de vie. La réaction de Vérel me fait comprendre que cette idée n'est pas forcément très compréhensible en soi. Je n'ai pas vraiment de réponse complète et bien formulée à proposer pour répondre, mais une ou deux choses me viennent en tête qui me plaisent bien et que j'ai envie d'aborder.

 

D'abord comment cette idée là m'est venue ? Et bien elle m'est venue progressivement durant ces dernières semaines, ces derniers mois même, depuis un jour où je cherchais un endroit dans Paris pour ... prier. Pour que vous compreniez bien ce que j'écris, je signale que c'était la première fois de ma vie que je cherchais un endroit pour prier. Je ne suis pas franchement ce qu'on peut appeler croyant (c'est un euphémisme), et je ne mets plus jamais les pieds à l'église, sauf à reculons pour quelques mariages de famille. J'ai eu une éducation catholique mais très jeune j'ai commencé à avoir des doutes sur la religion et la foi (j'en avais même parlé au prêtre de ma paroisse à 9 ans avant de faire ma première communion et il trouvait que je me posais un peu trop de question - comment est-ce seulement possible, de se poser un peu trop de questions sur un sujet pareil ?), doutes qui finirent par un éloignement définitif quelques années plus tard.

 

Une des choses qui me gêne particulièrement dans la religion, c'est le rite. J'en ai parlé ici il y a déjà bien longtemps. En revanche j'ai beaucoup de respect, et même plutôt d'affection pour la foi que manifestent les croyants (quand ils la manifestent), et aussi pour la prière, la vraie prière humble et pas tournée uniquement sur soi. Je trouve que ce geste, cette attitude, a quelque chose de vraiment beau, de très humain. Se lever le matin et démarrer sa journée par une prière pour les autres par exemple (ce que je ne fais pas mais que j'ai entendu chez quelqu'un) est une manifestation personnelle de son attention aux autres qui a un vrai sens à mes yeux.

 

Mais donc je cherchais un endroit où prier, et malin comme je suis je n'ai rien trouvé de mieux que me rendre à Notre-Dame (oui, malin). Le lieu est beau certes, mais en entrant je me suis vite dit qu'il faisait désormais plus office de bâtiment touristique que d'église. Et puis est arrivé quelque chose qui m'a définitivement fait sortir. J'étais assis me demandant si j'allais rester depuis seulement quelques minutes quand des messieurs habillés en hommes d'église sont entrés les uns derrière les autres, comme en procession (mais ils portaient tellement de couches et de couleurs qu'au début j'ai pensé pour moi qu'ils étaient plutôt déguisés, et je me demandais un peu en quoi). Il y avait là si j'ai bien compris, l'évêque de Notre-Dame, ainsi que des invités, orthodoxes, qui portaient donc des vêtements très différents mais pas moins originaux que les premiers. En les voyant s'avancer lentement vers l'autel je n'ai pu retenir en moi l'idée qu'il y avait dans ces manifestations extérieures de leurs religions respectives et de leurs rangs au sein de celles-ci quelque chose de terriblement ridicule. Un hors-sujet quasiment, une inadéquation profonde avec la profondeur des messages qu'ils prétendent porter.

 

Et ce sentiment n'a guère été amoindri lorsque l'évêque a commencé son discours d'accueil. Il a en effet entamé sur le ton d'un automate parfaitement huilé et au rythme cardiaque singulièrement plat par un : "Je suis très ému de vous recevoir" qui avait ses allures de réception à la salle de l'administration des dossiers 273B 3è escalier porte gauche. Tout le contraire donc du texte qu'il était en train d'ânnoner. Pas le plus petit début de commencement d'émotion dans sa voix (et ce n'est peut-être pas quelque chose qu'on couche facilement sur le papier mais à l'oral ça s'entend), pas la moindre aspérité qui eut marqué une hésitation ou une fébrilité quelconque. Non, il faisait froidement le boulot, et c'était à se demander s'il n'attendait pas déjà la fin pour retourner terminer ses mots croisés dans son salon.

 

Ce décalage profond entre son texte et son attitude, ce mensonge manifeste donc qui nous était donné à entendre m'a clairement poussé vers la sortie. Une minute plus tard j'étais dehors. Pas question de prier dans un endroit où visiblement tout cela n'avait plus aucun sens pour personne (à ce stade je précise que j'ai bien conscience du côté provocateur que certains trouveront à mon récit, mais je rapporte fidèlement la façon dont j'ai ressenti les choses, et je pourrais comprendre que d'autres les aient perçues autrement). Dans le fond ce qui m'apparaissait alors, c'était que le spectacle que je venais de voir était dépourvu de vie. Cette célébration qui débutait allait être expurgée de toute trace de vie, et n'y resterait que des récitations mornes, apprises par coeur depuis des lustres, et dont le seul objectif n'était plus que de témoigner une vague appartenance d'esprit (mais de coeur?) à une entité dont je ne discernais plus grand chose. De la vie ça aurait été une vraie manifestation de joie en recevant ces amis pratiquants d'une autre religion, ça aurait été un message qui sort de l'ordinaire à l'adresse des personnes présentes, un truc qui vient un peu du ventre, une spontanéité, quelque chose qui fait qu'on reconnait la personnalité de l'individu.

 

Du coup pour faire ma prière je me suis dit que ce qui conviendrait le mieux serait de trouver une façon de me rendre pleinement vivant. Une activité qui manifeste quelque chose de personnel et par laquelle j'ajouterais un peu de vie là où j'étais. Je me suis rendu sur les quais, en face de l'institut du monde arabe, et j'ai jonglé pendant une heure.

Qu'est-ce qu'une bonne année pour vous ?

bonne-annee.jpgChaque année à la même période les voeux de bonheur nous envahissent, et nous les rendons aussi largement. Mais que souhaite-t-on au juste ? D'être heureux, soit. Mais qu'entend-on par là ? C'est quoi être heureux ? Et on s'y prend comment ?

 

Avant de souhaiter à tous une bonne année 2009, je serais curieux d'avoir une idée de ce qu'est pour vous le bonheur, en quelques mots. Les commentaires vous sont donc largement ouverts.

 

Pour ma part j'ai bien une réponse qui me vient immédiatement en tête, mais je ne souhaite pas la dire. Je pense à autre chose qui me trotte dans la tête depuis quelques temps déjà, qui est sans doute incomplet mais qui me plaît beaucoup. Etre heureux pour moi, c'est me sentir plein de vie. Et vous ?

15/12/2008

Un décryptage du petit pont massacreur (Milgram et Zimbardo dans la cours d'école)

preau.jpgJ'ai regardé hier soir un reportage sur un récent fait divers, où un enfant de 12 ans avait été victime d'un "jeu" de ses camarades consistant à passer à tabac celui qui ne parvient pas à rattraper le ballon qu'on fait passer entre ses jambes. On appelle ça le petit pont massacreur. Il porte bien son nom. C'est la première fois que j'entends parler d'un tel jeu, mais je me souviens d'autres faits divers concernant le jeu du foulard où l'un des protagonistes se fait étrangler par un de ses camarades, aussi longtemps que possible. Evidemment, dans les deux cas ou comprend aisément que cela  termine parfois mal.

 

Et puisqu'on le comprend aisément, on ne comprend pas que des jeunes puissent se livrer à pareils divertissements entre eux. Comment peut-on à des âges aussi bas avoir l'idée de s'amuser en risquant sa vie aussi stupidement ? Cela choque clairement le sens commun et peut apparaître à juste titre comme le signe d'un mal à identifier.

 

En voyant ce reportage une idée m'est venue qui pourrait expliquer en partie l'existence de ces jeux. Je me suis souvenu de l'expérience de Stanley Milgram, rapportée brillamment dans le film I comme Icare. Cette expérience qu'on ne décrit plus démontre de façon éclatante la soumission potentielle de chacun d'entre nous à l'autorité. Une autre expérience intéressante est celle de Philip Zimbardo de l'université de Stanford. Zimbardo cherchait à expliquer le niveau d'agressivité particulièrement élevé qui régnait dans les prisons des Etats-Unis. Il construisit avec plusieurs collègues une prison dans les sous-sols de leur université et fit appel à des cobayes qui furent répartis en deux groupes : les gardiens, et les prisonniers. Dès la première nuit les mauvais traitements infligés aux prisonniers ont commencés. Ils étaient aspergés à l'aide d'extincteurs, on leur passait les menottes sans raison, ils devaient se déshabiller, etc. Au bout de six jours l'expérience fut arrêtée alors qu'elle devait initialement durer deux semaines, parce que certains prisonniers étaient en dépression nerveuse.

 

Ces deux expériences me semblent apporter des explications aux jeux destructeurs indiqués plus haut. L'expérience de Zimbardo montre que nous portons tous en nous une certaine dose de violence. Celle-ci est canalisée par la société (c'est son rôle premier), mais si elle ne l'est plus, elle s'exprime et d'une façon qui peut être extrême. L'expérience de Milgram complète cette vision en montrant que dans un cadre où la violence est en quelque sorte permise, c'est-à-dire définie par des règles et encadrée par une autorité alors elle peut également s'exprimer d'une façon choquante. Bien que la société soit là pour la réprouver.

 

Dans le cas des jeux qui nous intéressent, je crois qu'on retrouve ces mécanismes pour partie. Pour les suiveurs, ceux qui participent sans être leaders, voilà comment les choses peuvent se passer. Les individus les plus brutaux définissent les règles du jeu (par exemple du petit pont massacreur). Les autres agissent alors avec une culpabilité et un sentiment de responsabilité amoindris pour deux raisons : d'abord parce qu'ils ne sont pas leaders et n'ont pas défini les règles, et parce que justement en jouant, ils ne font que suivre les règles, exactement comme dans l'expérience de Milgram. Je me demande combien seraient prêts à dire après s'être fait arrêtés par la police : "mais j'ai respecté les règles!". Cet encadrement du comportement par des règles qui existent hors de soi soustrait une partie du sentiment de responsabilité : on ne tabasse plus quelqu'un, on joue à un jeu. La vision qu'on construit de ce que l'on fait s'en trouve modifiée.

Comment s'établissent nos convictions ?

carrefour-des-choix-de-societe.jpgLes Econoclastes ont proposé récemment un petit test de probabilité amusant. Il s'agit en gros de dire quelle est la probabilité qu'un magicien trouve parmi un paquet de 52 cartes celle qui a été choisie par une personne de son public. Le test révèle apparemment que dans la plupart des cas les personnes interrogées répondent 1 chance sur 52, c'est-à-dire qu'ils se réfèrent à la probabilité mathématique de trouver en effet la bonne carte. Mais ils négligent alors le contexte qui pourrait suggérer, notamment du fait qu'il s'agit d'un magicien, que la probabilité qu'il trouve la bonne carte est en réalité de 1. Et l'expérience semble montrer que même lorsque ce contexte est rappelé aux personnes interrogées elles rechignent à abandonner la réponse mathématique. Alexandre indique que cela révèle "la fascination qu'exerce le chiffre sur notre façon de raisonner".

 

J'y vois une autre explication plausible : dans la mesure du possible nous rejetons l'indétermination.  Nous préférons nous tourner vers des solutions simples et qui ne laissent pas de place au doute plutôt que vers des propositions incertaines qui nous obligent à rester dans une position intellectuelle instable. Les solutions proposées au test présenté par Alexandre sont très intéressantes lorsqu'elles prennent en compte le contexte. Le fait que ce soit un magicien qui fasse tirer la carte et que l'exercice soit en fait un tour de magie qu'il est en train de faire permet en effet d'imaginer qu'il a toutes les chances de trouver la bonne carte, même si un individu normal n'aurait qu'une chance sur 52 de trouver la bonne. Et l'idée de raffiner la réponse en évaluant le niveau de maîtrise du magicien pour minorer la probabilité qu'il trouve la bonne carte rajoute une complexité au problème. Mais cette démarche à un défaut évident : elle ne permet pas d'apporter une réponse claire à la question posée. En fait de réponse on ne fait ici que poser des hypothèses, toutes très intéressantes, mais qui nous laissent un peu au milieu du gué. La réponse mathématique, elle, a l'avantage majeur d'être compréhensible par tous et facile à argumenter. Elle est claire, nette et ne laisse pas place au doute.

 

Je crois que c'est la raison pour laquelle cette réponse est préférée : elle permet à notre esprit de fonctionner sur un élément bien déterminé, non mouvant. Au contraire la réponse prenant en compte le contexte nous laisse dans une situation non tranchée où l'esprit doit fonctionner sur un terrain meuble. Qui va évaluer la compétence du magicien ? Et s'il était simplement en mauvaise forme ce jour là ? Beaucoup de questions peuvent être posées pour préciser la réponse. On peut n'en jamais sortir. Mon idée est que cette indétermination est un inconfort pour notre cerveau et que nous allons naturellement chercher à l'éviter. J'insiste sur le terme naturellement car je crois en effet que cela relève en grande partie d'un processus biologique.

 

D'une manière générale nous recherchons la stabilité, l'équilibre tant physique que psychologique. Cela me semble correspondre exactement à notre recherche d'homéostasie qui est une démarche entièrement guidée vers notre sauvegarde personnelle, et à une échelle plus grande à notre perpétuation en tant qu'espèce. Pour nous maintenir en bonne santé nous avons besoin de cet équilibre biologique. C'est à mon sens exactement le même phénomène qui entre en jeu dans nos positions intellectuelles. Nous recherchons celles qui nous offrent une bonne stabilité émotionnelle car elles participent de notre équilibre psychologique (je crois qu'il ne s'agit ici que de stabilité émotionnelle recherchée et non de stabilité intellectuelle, car en tant que telle, je ne vois pas bien ce que serait une stabilité ou instabilité intellectuelle, les conséquences de nos pensées s'expriment en nous en termes d'émotions et de sentiments et c'est donc cela qui nous fait juger de notre équilibre intérieur).

 

Le fondement de nos convictions est donc probablement là. Nous concevons des convictions sur tel ou tel sujet parce que nous avons besoin de donner une stabilité à notre esprit sur les sujets qui nous concernent. Cela participe à notre recherche naturelle d'homéostasie.

 

Mais notre homéostasie ne peut pas être assurée en acquérant n'importe quelle conviction. Il ne suffit pas d'adopter un point de vue quelconque, aussi tranché soit-il, pour que nous nous sentions convenablement équilibré. Il faut encore choisir parmi les options possibles celles qui contribuent le plus à cet équilibre recherché. Et à mon avis nous les choisissons sur la base de deux critères très largement prépondérants sur les autres : notre intérêt personnel et notre souhait d'appartenir ou de renforcer notre appartenance à tel ou tel groupe social (très souvent celui dont on est issu). Ce qui signifie, et à bien y réfléchir cela peut apparaître presque tautologique, que nos convictions ne sont jamais objectives mais sont au contraire fondamentalement subjectives. Elles ne sont pas le résultat d'une réflexion pure et désincarnée à travers laquelle nous aurions aperçu la vérité nue, mais elles sont en quelque sorte la formalisation plus ou moins aboutie d'intérêts et d'orientations qui préexistaient en nous.

 

Je suis parfois gêné face aux convictions affichées par les uns ou les autres et aux argumentations parfois complexes qu'ils ont mises en place pour les justifier. J'ai souvent envie de leur demander comment il se fait que leurs opinions semblent si miraculeusement correspondre à leurs intérêts directs ou à ce que disent également les gens qui les entourent. Quel étonnement de voir ces amis élevés par des parents catholiques pratiquants reproduire si fidèlement les schémas de vie qu'on trouve traditionnellement dans ces familles : l'importance de la religion manifestée par la proximité de certaines idées avec celles de l'église, un modèle qui reste souvent patriarcal, les enfants qui deviennent scouts, etc. Qu'on me comprenne bien, je ne critique pas ces héritages. Ils sont parfaitement naturels et on les retrouverait à l'identique dans d'autres types d'éducation. Je ne fais que prendre un exemple, que j'ai un peu côtoyé et qu'il m'est donc plus aisé de décrire, pour indiquer une faiblesse qui m'apparaît ici : les personnes qui reproduisent ces schémas présentent toujours leurs convictions et leurs idées par des argumentations théoriques parfois évoluées, mais jamais comme l'héritage de leur milieu. On n'a jamais entendu son cousin bobo dire : je suis contre l'avortement parce que ma famille va à l'église depuis quatre générations et que je veux me montrer comme un fils digne d'eux. S'il le faisait le pauvre se trouverait directement discrédité.

 

Parmi les blogs, deux exemples simples me viennent en tête pour illustrer mon propos : Koztoujours et Eolas.  Le premier intervient régulièrement sur des sujets à caractère religieux en présentant fréquemment une position qui correspond de très près à celle de l'église. De telle sorte que lorsqu'un sujet de société quelconque pointe son nez dans l'actualité il est assez probable de lire chez lui une défense de la position catholique. Ce que je veux dire ici c'est que d'une certaine manière dans ces cas là je ne me dis plus en allant le lire "qu'en pense Koztoujours?" mais "Qu'elle est la position des catholiques?". Dans cette mesure je ne vois pas chez lui un positionnement équilibré pour moi son lecteur, malgré tout le talent dont il pourra faire preuve dans ses démonstrations, mais une présentation des choses biaisée par sa propre expérience et son milieu d'appartenance. De même pour Eolas, il montre un positionnement particulièrement marqué concernant la politique d'immigration de la France. Cela provient je pense de sa situation personnelle qui fait que ce sujet le concerne tout particulièrement. On est donc là probablement en partie dans l'expression d'un intérêt personnel. S'il était moins directement concerné je gage qu'il réagirait sans doute moins fortement

 

Je fais ces remarques en me positionnant comme lecteurs de ces deux blogueurs. Si je cherche à me faire une opinion objective sur l'euthanasie ou sur les méthodes de reconduite à la frontière utilisées actuellement (quoique sur ce second point, hum), il est nécessaire que je prenne en compte les biais de leurs argumentations afin de filtrer les informations qu'ils me donnent et de bien les évaluer. Cela m'oblige à une certaine prudence intellectuelle lorsque je les lis. Et ceci est particulièrement vrai du fait de leur grande force démonstrative et de l'éloignement qu'ils peuvent donc atteindre vis-à-vis de leurs intérêts personnels ou de leurs héritages.

 

Attention toutefois, ceci ne constitue en aucun cas une prime à l'analphabétisme. Ce que je dis ne signifie pas que les discours des personnes pourvues de grandes compétences rhétoriques soient a priori moins pertinents et moins fiables que ceux tenus par des personnes moins douées dans l'utilisation du langage. Les seconds ne sont pas moins affectés par ces biais personnels. Mais chez eux ils sont plus faciles à détecter et le tri est donc plus facile à faire.

 

Je trouve intéressant pour soi-même de savoir détecter ces biais de raisonnement qui influencent parfois sans que l'on s'en rende compte ses convictions et ses comportements. Et pour parvenir à faire ce tri et à y voir clair je crois qu'une piste peut être utilisée efficacement : détecter ses émotions propres et identifier leurs causes (qui en général sont simples), car elles fondent nos pensées pour une part encore trop ignorée.

12/12/2008

Entraves à dépasser

Doute.jpgLorsque j'ai entamé la rédaction de ce blog il y a maintenant 3 ans et demi (déjà...), j'avais en tête des sujets très précis sur lesquels je souhaitais écrire. Et suffisamment de contenu à l'époque pour ne pas connaître l'angoisse de la page blanche. Pendant environ 2 ans les idées que j'avais m'ont permis d'alimenter cet espace de façon assez régulière sans avoir de vrais trous d'air.  Clairement cette situation à changé depuis de nombreux mois, et je n'écris plus ici que très irrégulièrement. J'aimerais qu'il en soit autrement mais pour être honnête je doute de ma capacité à modifier cet état de fait.

 

Il y a plusieurs raisons à cela.

 

Une certaine lassitude d'abord, en particulier après avoir rédigé ma série sur l'agressivité qui m'a demandé beaucoup d'énergie et d'investissement à une époque où mon rythme de travail était intense. J'en suis sorti très fatigué et avec un besoin important de me reposer et de retrouver du temps pour moi. A cela s'est ajoutée une usure psychologique exacerbée en raison de certains événements (rien de vraiment grave toutefois), et qui m'a marqué pendant quelques mois. Et du coup s'ensuivit la perte de l'habitude d'écrire, ce réflexe du blogueur qui se demande chaque jour ou chaque semaine de quoi il va parler.

 

Des éléments plus conjoncturels aussi, qui me bloquent un peu aujourd'hui. D'abord le fait de savoir que je suis parfois lu par certaines personnes qui me connaissent et dont je préfèrerais qu'elles ne me lisent pas. Il m'arrive ici d'écrire des choses personnelles (et notamment je sais que mes poèmes sont quasi systématiquement vus comme des dévoilements intimes, ce qui est injustifié) que je ne veux pas avoir à développer avec ces personnes. Mais d'un autre côté, je ne conçois pas aborder des sujets d'analyse comportementale, de psychologie ou de développement personnel sans m'impliquer plus ou moins personnellement dans ces travaux. Si je ne le fais pas je pense que ce que je produirai aura moins d'intérêt et de pertinence, que ce sera moins efficace. Je suis donc un peu pris entre deux eaux.

Une autre entrave conjoncturelle concerne une série que j'envisage depuis quelques temps déjà, que je souhaitais initialement dédier à quelqu'un. Mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée en soi.

 

Et surtout, je reste encore aujourd'hui perclu de doutes sur ce que j'écris. Lorsque je rédige quelque chose ici je passe un temps fou à reprendre certains mots, certaines lignes, des paragraphes entiers parfois, en me demandant si j'ai vraiment bien compris le sujet, si ce que je dis est vrai ou pas. Le dernier exemple en date est un billet que j'ai déjà intégralement rédigé mais que je ne pense finalement pas publier la faute à un contenu qui m'apparaît à la relecture assez discutable (Samantdi, c'était une réaction à l'histoire de Daisy et Minnie). Produire des textes qui me semblent parfois peu fiables pose forcément souci, ce d'autant plus que les sujets que j'aborde me tiennent parfois à coeur. Je n'ai pas envie d'écrire des bêtises qui pourraient nuire aux lecteurs.

 

Une des questions principales que je me pose d'ailleurs est de savoir quel est le degré d'opportunisme dans ce que je présente comme étant mes convictions. Qu'est-ce que je parviens à présenter honnêtement, sans biais, et qu'est-ce qui risque de n'être en fait que la justification plus ou moins savante de mes préjugés ? J'ai parfois du mal à faire ce tri, à identifier clairement la qualité de mes opinions et isoler celles qui ne sont que des outils de beau parleur.

 

En revanche je crois comprendre une des raisons qui nous amène si souvent à construire ce type de convictions rhétoriques ... (to be followed in the next article - what a teaser !)

04/12/2008

Prud'hommes méconnus

Les élections prudhommales ont connu cette année un très faible intérêt avec un taux d'abstention record à 74,4%. Verel en a proposé 3 billets répartis avant et après les élections, , et . J'ai eu quelques échanges sous son premier billet avec lui et ses commentateurs sur le sujet et je voulais revenir rapidement dessus.

 

Je remarquai donc qu'autour de moi l'intérêt porté à ses élections semblait a peu près nul. Mes collègues, et en particulier les plus jeunes, se contrefichent de tout ça, je n'ai trouvé personne qui avait sa carte d'électeur avec lui, et ceux qui pensait l'avoir quelque part ne savaient pas où. La personne officiellement en charge de la partie RH dans mon entreprise n'était d'ailleurs dans ce domaine pas un exemple puisque comme les autres elle n'avait pas sa carte et ignorait où elle se trouvait, et elle n'avait aucune idée du lieu où notre vote pourrait être effectué. La petite taille de mon cabinet explique sans doute une partie de ces faits, néanmoins je trouve intéressant de les relever à titre d'exemple.

 

J'ai fini par pouvoir voter hier, après pas mal de recherches sur l'endroit où cela m'était possible. Mais la journée d'hier a selon moi jeté la lumière de façon assez crue sur une carence forte du monde de l'entreprise en France. Car je crois qu'en amont du désintérêt marqué pour les élections des prud'hommes il y a une culture redoutablement pauvre du droit du travail. Je le constate autour de moi, et pas que chez mes collègues, et j'ai dans l'idée que ce manque a des impacts non négligeables sur notre façon d'aborder les choses. Il est peut-être aussi issu d'une forme de fatalisme ou de passivité vis-à-vis du travail, comme si l'on subissait ce monde là.

 

Ca ne fait guère plus de 2 centimes tout ça, mais je compte revenir ici pour d'autres choses que j'ai en tête depuis pas mal de temps déjà. Je dois juste me mettre d'accord avec moi-même sur la façon de le présenter.