30/04/2007
Nostalgie d'enfance
Sous le nez de la maîtresse
on trafiquait en langage codé
On arpentait le monde
entre les pages de l'atlas;
on le redessinait
L'entaille à nos poignets
dénonçait l'alliance : à la vie à la mort.
Parfois le vent soufflait
ses sauvages secrets, de fauves violences.
L'aile morte nous effleurait :
- Jure que tu ne me laisseras jamais sans nouvelles !
- Si je mens, je vais en enfer.
Où marches-tu maintenant ?
Il fait froid de ce côté-ci du monde.
Dis-moi : qui es-tu devenu ?
Où sont les lisières d'Eden ?
Il fait très seul au pays des hommes
Un nouveau poème de Colette Nys Mazure, extrait de Feux dans la nuit, que j'ai lu aujourd'hui et que j'ai beaucoup aimé.
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27/04/2007
La légende des comportements : synthèse sur l’agressivité
Attention, billet très long
Après avoir abordé la question de l’agressivité en plusieurs billets, je souhaite conclure le travail effectué par un billet synthétique sur cette notion. L’objectif est ici de fournir au lecteur une base sérieuse de compréhension des ressorts de l’agressivité, envisagée d’une façon globale, mais également quelques pistes d’analyse pouvant être mises à profit pour appréhender les principaux exemples d’agressivité auxquels nos sociétés sont aujourd’hui confrontées : notamment l’agressivité intra-sociétale (émeutes des banlieues, révoltes sociales, etc.), et l’agressivité entre états (la guerre). Pour cela, je compte cette fois-ci faire un petit bilan biologique sur les fonctionnements neuronaux mis en jeu dans les comportements d’agression (plus pour fournir quelques mots clés pour ceux qui voudraient approfondir leurs recherches sur le sujet), puis étendre mon analyse sur un plan plus sociologique.
Là encore, je rappelle qu’une très grande partie du contenu de ce billet est directement inspirée de la lecture d’Henri Laborit, et notamment de La ColombeAssassinée. Ce billet est en quelque sorte l’aboutissement de ma très longue série consacrée à ses travaux. Si vous voulez poursuivre sur le sujet, je vous invite bien sûr à lire ses livres. Je n’entends ici qu’ajouter parfois mon éclairage personnel sur quelques points, et peut-être évoquer quelques menues critiques dont je n’ai pas encore fait part. Mais qu’il soit bien compris que cet article n’est en quelque sorte qu’un document de travail, qu’il convient de lire avec prudence, de comparer avec d’autres études, et de critiquer.
Quelques rappels biologiques :
Le faisceau de la récompense et du réenforcement : le MFB (Median Forebrain Bundle). Celui-ci fonctionne parce que l’individu a mémorisé des actions gratifiantes qu’il va souhaiter reproduire. En d’autres termes, il est directement lié à l’apprentissage fait par l’individu de ce qui participe à la conservation de son équilibre, au maintien de son homéostasie (Cannon), à la recherche de son plaisir (Freud). Cela signifie que le réenforcement est exclusivement un comportement appris, et qu’il n’est lié en rien à l’inné. C’est ce réenforcement qui est à la base de nombres de nos comportements de recherches de possessions et de domination. Les médiateurs chimiques du MFB sont les catécholamines : dopamine et norépinephrine.
Le PVS ou Periventricular System. Son médiateur chimique est l’acétylcholine (on dit encore qu’il est cholinergique). Il est le système cérébral mis en jeu dans les comportements de fuite ou d’agressivité défensive, en réponse à un stimulus nociceptif (une agression, prise au sens général du terme comme tout événement qui augmente l’entropie de l’individu, c’est-à-dire qui peut participer à sa destruction – la faim, par exemple, est un stimulus nociceptif). Son fonctionnement ne fait pas appel à la mémoire, et est donc exclusivement inné.
Note : toutefois, le caractère inné du comportement d’agressivité défensive n’est à mon sens valable que durant la phase d’alarme répondant au stimulus nociceptif. Dés après, et c’est à mon sens particulièrement vrai chez l’homme, intervient la mémoire dans l’établissement d’une stratégie pour vaincre, mémoire qui n’est que l’autre mot pour désigner l’apprentissage. C’est d’ailleurs cela, cette stratégie, qui rapproche tant l’agressivité défensive de l’agressivité de compétition. Or cette dernière n’est en rien liée à l’inné, mais est au contraire exclusivement issue de l’apprentissage que nous faisons des gratifications obtenues par des positions de domination.
Le SIA ou système inhibiteur de l’action. Lorsque ni la lutte ni la fuite ne sont possibles en réaction à un stimulus nociceptif, à une agression de l’organisme quelle que soit la forme de cette agression, le SIA entre en jeu. Son médiateur chimique, comme le PVS est l’acétylcholine, mais également la sérotonine dont quelques études ont montré qu’elle agissait en dépresseur de l’agressivité. Le SIA rappelons-le, agit en boucle, puisqu’il favorise la création de glucocorticoïdes dans l’organisme, ce qui agresse ce dernier et augmente donc en réaction l’activité du SIA. C’est un cercle vicieux. L’inhibition de l’action est donc d’abord liée à l’inné, comme l’agressivité défensive. En revanche, comme pour celle-ci, elle en vient également à faire appel à l’apprentissage après la phase d’alarme, ne serait-ce que parce qu’elle nécessite que l’individu sache, et ait donc appris, que l’action est parfois inefficace pour répondre à l’agression subie (face à un Golgoth, l’homme de tous les jours sait qu’il est inutile de se battre).
On retrouve dans la description de ces différents systèmes le cœur du fonctionnement des trois grands types de comportements intervenant lorsque l’individu est confronté à un stimulus nociceptif, à une agression : la lutte (l’agressivité défensive – qui fait intervenir le PVS), la fuite (qui fait intervenir le PVS), et l’inhibition de l’action (qui fait intervenir le SIA).
Tentatives de points de vue sociologiques :
L’agressivité de compétition, née de la nécessité de trouver des gratifications, et pour cela, d’obtenir une situation sociale dominante, donnant accès à un plus grand nombre de gratifications, apparaît comme la matrice première des autres formes d’agressivité, qu’il s’agisse de l’agressivité défensive ou de l’agressivité d’angoisse ou d’irritabilité. Cette agressivité naît notamment avec la notion de propriété qui, le rappelle Laborit, n’est pas un instinct, mais bien un élément appris à la suite de l’apprentissage du plaisir que procure telle ou telle gratification localisée sur le territoire à défendre. La notion de propriété génère la volonté de défendre la propriété, afin d’assurer la continuité d’accès aux gratifications.
Je voudrais donner trois exemples d’agressivité exercée dans le cadre d’une même société, pour illustrer un peu mon propos.
Le premier est assez simple : c’est celui des ouvertures des grandes surfaces lors des super promotions qu’elles organisent parfois pour vendre du matériel d’équipement technologique. On en voit parfois des images à la télévision : certains se couchent à terre juste en dessous des barrières lorsqu’elles s’ouvrent afin d’être les premiers à arriver sur les produits, une fois arrivés, on les voit se jeter alternativement vers tel ou tel ordinateur, certains n’hésitant pas à éjecter les autres pour avoir ce qu’ils veulent. On est là dans un cas très caricatural de course à la gratification, qui est en plus exacerbé par la rareté des produits convoités, les uns étant clairement prêts à marcher sur les autres pour avoir ce qu’ils veulent. Dans ce cas spécifique, le schéma gratification – compétition – agressivité se dessine très nettement.
Mon deuxième exemple est celui du milieu professionnel, que j’ai déjà rapporté dans d’autres billets, mais qui mérite encore un détour. Les situations de concurrence intra professionnelles, malgré les gorges chaudes que peuvent s’en faire parfois les directeurs, ne sont en général pas profitables du tout aux entreprises. Car les employés mis en concurrence, et qui recherchent donc les mêmes gratifications (primes, reconnaissance, félicitations, etc.) vont presque systématiquement entrer en conflit. Le meilleur exemple que j’en ai me vient d’un stage effectué par une connaissance dans une entreprise de crédit, dans laquelle le manager principal avait pour principe de mettre tous les employés en concurrence. Cette connaissance m’a rapporté à l’issue de son stage que l’ambiance de l’agence en question était exécrable, faite de coups bas, d’hypocrisie portée à son paroxysme, bref, il y régnait une agressivité professionnelle qui détruisait complètement l’entreprise.
Sur ces exemples d’agressivité interindividuelle, il me semble bon de s’arrêter quelques lignes sur le cas particulier des violences faites aux femmes, violences qui malgré toutes les belles intentions affichées par les sociétés dites civilisées, ne cessent d’horrifier par leur ampleur et leur fréquence. Celles-ci sont clairement un héritage de constructions sociales patriarcales, où la place de l’homme est celle du dominant, et où la femme est restée pendant des siècles en situation de soumission. Ces violences que subissent encore les femmes prennent des formes variées dont on pourrait dresser une liste tristement non exhaustive : pressions sociales autour de l’avortement, violences professionnelles exercées par des salaires inégaux, tandis que leurs charges de travail imposées par la société sont souvent plus fortes que celles des hommes (toutes les tâches liées aux soins du foyer et de la famille), violences physiques enfin, viols, coups subits, etc. Sans oublier bien sûrs les cas où l’islam extrémiste, voire parfois simplement « traditionnel », continue de les humilier socialement. Tout ceci vient du processus d’agressivité de compétition, dans lequel l’homme pendant plusieurs siècles s’est taillé la part du lion. Mais sur ce point, les femmes ont une petite revanche probablement, car on peut légitimement penser que c’est ce processus qui est pour une large part la cause de la plus faible espérance de vie des hommes par rapport à celles de femmes. Celles-ci en effet, ne sont pas encore autant inclues que les hommes dans le système de compétition sociale et économique qui met un si grand nombre d’entre eux en situation d’inhibition de l’action, phénomène dont on a démontré les impacts sur la santé des personnes.
Pour en finir enfin sur le point de l’agressivité exercée dans le cadre du travail, rappelons que l’employé se trouvant entre un responsable de service tyrannique et l’impossibilité de quitter son travail car il doit nourrir sa famille, se retrouve lui dans un cas typique d’inhibition de l’action. Beaucoup d’encre à récemment coulée suite aux suicides ayant eu lieu dans une usine de montage de Renault. Les conditions de travail des employés en question semblent en être les raisons principales. Celles-ci se traduisent d’une façon ou d’une autre par des situations d’inhibition de l’action, où l’employé n’a que peu d’opportunité de devenir acteur de son travail, et reste en position de soumission par rapport à ses tâches. Une des solutions de management pour résoudre ce type de problème, est de trouver un moyen convenable de donner une force d’initiative aux employés, de les intégrer notamment aux décisions prises, au moins au niveau de leur service.
Ce petit rappel me permet de faire le lien avec le troisième exemple que je voudrais aborder, celui qui nous a beaucoup intéressés en France lors des émeutes des banlieues : l’agressivité sociale qui s’exerce entre des groupes de niveau sociaux différents. Il s’agit principalement ici, en dépit des arguties avancées parfois sur l’agressivité congénitale des personnes en cause, d’une agressivité issue de l’inhibition de l’action. Cette agressivité est exercée par les dominés qui cherchent à sortir de leur situation d’inhibition de l’action et de se retrouver dans le mode de l’action afin d’obtenir leurs gratifications. Elle peut être rapprochée d’une forme de langage, ou d’une solution de remplacement au langage si l’on préfère.
En effet, les populations dont on parle ici sont le plus souvent celles qui maîtrisent mal le langage. Or celui-ci, dans nos sociétés modernes, est l’outil principal qui aujourd’hui permet d’avoir accès au pouvoir, et donc aux gratifications. Il est d’autant plus efficace qu’il est désormais utilisé de façon majoritairement inconsciente. Il ne dit pas le nom de ce qu’il recherche, et lorsqu’un cadre supérieur parade à la terrasse d’un café en argumentant sur les convictions profondes qui, déclame-t-il, fondent ses choix et l’ont portées là où il est, celui-ci ne sait pas qu’il ne fait souvent que construire à ce moment même la stratégie qui lui permet de conserver sa position dominante, qu’il renforce pourtant clairement par son langage non verbal, son port de tête, son costume, son appareillage électronique, etc. Lorsqu’il agit ainsi, il ne construit pas une argumentation logique sur ses inclinations, mais ils donnent plutôt des gages sur lui-même, qu’il attend que l’on prenne à la lettre et que l’on respecte. Il témoigne de son mimétisme avec un groupe social donné, auquel il entend qu’on l’assimile afin qu’il bénéficie des mêmes avantages que les autres membres de ce groupe.
L’agressivité des personnes en situations d’inhibition de l’action est le moyen qu’elles utilisent pour contourner leur manque de maîtrise du langage, leur manque d’habileté sociale. C’est le moyen qu’elles trouvent pour, elles aussi, participer au jeu de l’agressivité de compétition et obtenir les gratifications que celle-ci peut offrir. Cela me semble aussi valable pour le petit délinquant qui fait du vol de sac à l’arrachée dans le métro, que pour les bandes organisées qui foutent le bordel dans les manifestations. A la source, il y a ce même besoin d’accéder à un monde qui est sans cesse promis, mais seulement à ceux qui ont la chance d’être mis dans les conditions qui font qu’un jour ils en auront les moyens. L’éducation, l’accès à la culture, et bien évidemment l’emploi sont les solutions les plus efficaces à ces comportements, puisqu’ils annihilent l’intérêt d’exercer cette agressivité débridée faisant suite à l’inhibition de l’action. Tout simplement parce qu’ils font sortir l’individu de l’inhibition de l’action en lui offrant les moyens d’agir plus efficacement pour lui-même.
On comprend ici que cette agressivité issue de l’inhibition de l’action, née du manque de maîtrise du langage, permet également de comprendre, au moins en partie, la source du terrorisme. Celui-ci s’organise, il me semble, autour de deux populations types : la première, celle des terroristes dominants, des chefs, qui est parfois une population très éduquée (c’est le cas d’Oussama Ben Laden pour prendre l’exemple le plus marquant). Cette population là inscrit très clairement son action dans un processus d’agressivité compétitive : en d’autres mots, ce qu’ils cherchent avant tout, c’est l’influence, le pouvoir. La deuxième population des groupes terroristes est celle des kamikazes, des « opérationnels ». Cette population là est principalement composée d’individus dont le niveau d’éducation est faible, voir nul. Nombre de terroristes islamistes sont tout simplement analphabètes. L’agressivité de ces individus est elle principalement une agressivité d’irritation, issue de l’inhibition de l’action dont ils espèrent sortir en prenant le pouvoir par la violence. On voit donc clairement ici que l’objectif recherché par les terroristes n’est pas le même selon leur niveau dans l’échelle hiérarchique du terrorisme et que les dominants de ces groupes ne font que manipuler les autres, puisqu’en aucun cas ils ne cherchent à répondre aux attentes de ceux-là.
Je termine sur ce troisième exemple de l’agressivité sociale en notant qu’elle a également un rôle de renforcement des valeurs que s’est donné la classe dominante qui va pouvoir, en accusant les émeutiers, renouveler l’enracinement des valeurs sur lesquelles ils ont fondés « leur » société. Cet aspect est plus qu’un détail, car il montre la force d’inertie d’une société dont les règles sont établies depuis longtemps et dont les fondements théoriques sont élaborés. En revanche, en retour les situations d’inhibition de l’action qu’elle crée peuvent souvent être proportionnellement plus fortes, et donc faire peser un risque plus élevé. C’est ici une illustration de ce que donne le conformisme de soumission, les individus contribuant au maintien en l’état du groupe, parfois même lorsque celui-ci les oppresse, car ils perçoivent en lui le moyen privilégié d’accéder à des gratifications (le groupe notamment les protège, leur assure parfois une activité économique, les distrait, etc.)
J’en viens enfin à l’agressivité entre états, c’est-à-dire à l’exemple de la guerre. C’est très clairement, dans l’immense majorité des cas, pour ne pas dire dans tous les cas, un exemple majeur de l’agressivité de compétition. Dans l’histoire de l’humanité, l’agressivité entre état vient d’abord d’une tentative d’invasion de l’un envers l’autre, ce dernier réagissant alors en se défendant, et parfois en cherchant à envahir à son tour son adversaire. L’objectif là aussi est d’accéder à plus de gratifications que n’en contient le territoire national du pays qui envahit l’autre, et/ou d’obtenir une position de domination plus grande, dans le but ensuite d’accéder à plus de gratifications, etc. Il faut bien avoir à l’esprit cette matrice d’analyse de l’agressivité entre état pour comprendre toutes les guerres qui ont eu lieu et celles qui existent toujours aujourd’hui.
Au départ de la majeure partie des guerres, pendant des siècles, se trouve un problème d’accès aux ressources vitales se trouvant sur l’espace géographique sur lequel le groupe est établit. Afin d’augmenter ses ressources, il se met en quête d’un nouvel espace géographique qui en pourvoit, et déclare alors la guerre au groupe habitant sur ce nouveau territoire pour le conquérir. Et la plupart du temps, tout ceci est couvert par un discours théorique présentant l’affaire sous l’angle de bienfaits moraux apportés aux groupes attaqués. Ce fut le cas notamment des guerres de religion (on apportait la rédemption), des guerres de colonialisme (on apportait la civilisation), de la guerre froide (on apporte à l’autre sa vision idéologique de la société), pour ne citer que les exemples les plus évidents qui me viennent en tête.
Bien sûr, certaines guerres peuvent exister, au moins d’un point de vue théorique, mais à mon avis pas seulement, simplement en réponse à une menace d’agression, et non en agression directe. On se retrouve alors dans le cadre de l’agressivité défensive. On notera ici qu’il est alors nécessaire pour bien comprendre les véritables objectifs de celui qui entre en guerre, d’identifier s’il y entre en réponse à une menace, ou de façon directe sans qu’il existe de véritable menace. Ici, on va retrouver l’importance du rôle du langage dans les justifications diverses qu’il pourra donner pour expliquer son geste. Mais pour faire simple, distinguons simplement à l’avance qui des deux est le dominant. Si celui-ci est le premier à entrer en guerre, il y a fort à parier qu’il ne le fait que sur le mode de l’agressivité de compétition, soit pour accéder à plus de gratifications, soit pour devenir encore un peu plus dominant. Sinon, il se trouve probablement plutôt dans une situation d’agressivité défensive.
Mais d’une manière générale, les guerres sont très majoritairement le fait d’états dominants. Et c’est d’ailleurs bien évident si l’on songe qu’un état n’entrerait pas en guerre contre un autre s’il ne songeait pas qu’il est en mesure de l’emporter. S’il entre en guerre c’est qu’il sait sa supériorité sur l’autre état, ou en tout cas qu’il perçoit sa situation comme étant celle d’un futur vainqueur. Sur cette base, on pourrait séparer schématiquement terroristes et états guerriers, en notant que les premiers, agissant plutôt du fait d’une situation d’inhibition de l’action, exercent l’agressivité type des dominés, tandis que les seconds exercent eux l’agressivité type des dominants.
Il est intéressant de noter sur ce point que la guerre, elle aussi, remplit un rôle social au sein du groupe qui l’a fait, qui est très loin d’être négligeable. Elle détourne en effet l’agressivité interindividuelle qui peut exister au sein de la société, pour l’orienter vers un adversaire commun. Cela permet d’unir les personnes qui étaient hier adversaires personnels autour d’une même aversion contre un ennemi commun, et ainsi de créer ou de recréer une forme d’unité nationale. On en voit des versions light dans certains pays qui n’étant pas belliqueux n’en sont pas moins xénophobes. C’est ce qui m’a semblé être le cas en Australie lorsque j’y suis allé. J’y ai senti un sentiment national fort et un rassemblement net des personnes autour de certains symboles du pays, et à la fois un rejet réel des étrangers, même des touristes.
Maintenant que ce tour d’horizon est fait, la question qu’il reste à résoudre est évidemment : « comment diminuer les comportements d’agressivité, que ce soit dans le sphère privée ou dans la sphère publique ? » Vous comprendrez aisément que je n’ai pas la prétention de m’aventurer trop loin sur les réponses à donner à cette question. Mais à la lecture de cet article, quelques pistes peuvent toutefois être ébauchées.
J’ai déjà abordé quelques points qui me semblent donner des solutions. Dans les cas d’agressivité née de l’inhibition de l’action, permettre aux individus qui entrent dans ce schéma de se réorienter sur le mode de l’action me semble une idée pratique parfaitement exploitable. Cela se traduit par le fait de redonner une activité aux inactifs (« l’oisiveté, mère de tous les vices » ?), que ce soit par le tissu social proche (les associations de quartiers par exemple), ou mieux bien sûr, un emploi. En gros il faut donner à l’individu pris dans une situation d’inhibition de l’action, qui, j’espère qu’on l’aura clairement compris en me lisant, se rapproche fortement d’une inhibition du langage, c’est-à-dire de l’incapacité perçue de s’exprimer et d’être entendu, les moyens de s’exprimer à nouveau.
Redonner la voix aux jeunes des quartiers, par l’éducation entre autre ; à l’employé assommé par un travail abrutissant et qui le prive de toute initiative; à la femme battue par son mari et qui ne le dénonce pas par peur de perdre ses moyens de subsistance (peut-être le pire exemple de conformisme de soumission) ; aux pays pauvres qui restent trop peu écoutés dans la cacophonie des nations. Il faut que toutes ces personnes trouvent une voix d’expression efficace pour pouvoir émerger du brouillard dans lequel l’inhibition de l’action et du langage les laisse. Que ce moyen d’expression leur permette d’une certaine façon de dire qui elles sont, afin d’enfin exister.
Et surtout, il est important de bien saisir l’ampleur de l’influence des phénomènes de compétition dans les comportements d’agressivité. Au niveau individuel, les exemples sont multiples, et sont observables dés le plus jeune âge. A ce titre, pour en donner encore un dernier exemple, on peut relire le complexe d’Œdipe comme la compétition existant entre l’enfant et le père pour avoir la mère, compétition née du mimétisme que met en œuvre l’enfant dans ses jeunes années vis-à-vis du père, qu’il cherche à copier afin d’obtenir les mêmes gratifications que lui. Vraiment sur ce point, je crois qu’il faut prendre un peu le temps de réfléchir aux causes des comportements d’agressivité que l’on observe autour de soi. A bien y regarder je crois qu’on y trouve à chaque fois une notion de compétition qui intervient, même si c’est parfois de façon cachée.
Mais je crois qu’il faut analyser ce point de façon critique. Car ces comportements d’agressivité de compétition n’ont rien de spécifiquement humain. Ils existent partout dans la nature. Qu’est-ce donc que le principe de sélection naturelle sinon une autre expression pour désigner un principe de compétition ? Et qu’espère-t-on de l’homme dans ce domaine si l’on admet a priori qu’il est dans sa nature, comme dans celle de tous les autres êtres vivants, de rechercher les moyens de faire perdurer sa structure biologique, bref de survivre, et qu’il a découvert que cela peut se faire pour son plus grand profit par une compétition entre les individus pour déterminer qui sont les dominants et qui sont les dominés ? Dit autrement encore, pourquoi Laborit nous reprocherait-il d’être simplement ce que nous sommes ? Mettre à jour la responsabilité de la compétition dans nos comportements agressifs peut donc sembler au premier abord ne pas apporter grand-chose pour résoudre notre problème.
Mais l’objectif principal de Laborit est d’abord de provoquer une prise de conscience, un dégrisement vis-à-vis des éléments qui nous fondent. Tant que nous en resterons inconscients, aucune solution digne de ce nom ne pourra de toute façon émerger puisque nous ne saurons pas sur quoi nos efforts doivent porter. Alors bien sûr, parler uniquement de prise de conscience peut paraître dérisoire et en quelque sorte irresponsable, puisqu’on ne fait là que mine de s’élever au-dessus de la foule pour lui jeter l’anathème sans chercher vraiment à l’aider.
Mais pour ma part je ne suis pas si sûr que cette démarche soit inefficace. Car la prise de conscience dont il est véritablement question ici, n’est pas uniquement celle des fondements de nos comportements, mais aussi celle de ce qui nous lie à ceux auxquels nous nous confrontons et avec qui nous cherchons à entrer en compétition. Il s’agit d’ouvrir les yeux non seulement sur nous-mêmes, mais également sur les relations que nous entretenons avec les autres. Cette prise de conscience est donc le début de la relation à l’autre, d’une vraie relation, c’est-à-dire de la prise en compte de l’autre dans notre schéma d’action.
Sur ce point je crois beaucoup à une idée que j’ai déjà rapidement abordée ici et que je prévois de revoir de façon détaillée d’ici quelques temps, car elle me semble pouvoir occuper un rôle psychologique (pour l’individu donc) et sociologique (pour le groupe) majeur. Cette idée, c’est la proximité.
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24/04/2007
La grapho de Sarko
Mais puisqu’ils le souhaitent, et pour faire contrepoids à celle que j’avais produis ici il y a déjà quelques temps concernant Ségolène Royal, voici celle de Sarkozy. Malgré le second degré évident avec lequel j’espère que le lecteur abordera ce billet, je préfère être très clair sur le sérieux de cette démarche : elle n’en a aucun. La graphologie n’est pas une science, ce n’est qu’une technique très approximative, qui est loin, très loin de pouvoir réellement embrasser la personnalité de ceux qu’elle étudie. Et de surcroit, je ne garantis rien quant à ma faculté d’être « objectif » dans ce genre d’exercice, sachant souvent bien mal évaluer en quoi je suis objectif, et n'étant pas du tout graphologue moi-même.
Je n’ai comme base de travail pour cette graphologie qu’un court extrait écrit de la main de Sarkozy, qui figurait en bas du tract fourni avant le premier tour, et dont j’ai fait une photographie pour que vous puissiez juger sur pièce.
L’écriture de Sarkozy d’abord, est une écriture adulte. Les lettres sont bien dessinées, mais on voit qu’il s’est largement éloigné du modèle d’écriture qu’on nous apprend dans les écoles, des lettres bien liées entre elles et des petites arabesques qui finissent les o ou les a chez les enfants, ce que je m’étais étonné de retrouver dans l’écriture de Ségolène Royal.
Sarkozy a une écriture personnelle, témoignant d’un esprit indépendant, ce que montrent notamment ses lettres déliées au milieu de certains mots. Mais elle ne montre pas d’excès de ce caractère, puisque plusieurs lettres restent bien liées. Toutefois certaines lettres ne sont pas réellement terminées, comme certains ‘a’ qui restent très ouverts, ce qui indique une tendance à ne pas aller au bout des choses, à ne pas prendre le temps de terminer ce qui est entrepris.
Par ailleurs, Sarkozy n’écrit pas droit. Deux choses peuvent être remarquées à ce titre : la première est qu’il a tendance à écrire progressivement vers le bas. C’est presque imperceptible, mais on le voit notamment sur sa phrase « je ne me déroberai pas » dont la fin termine une demi-ligne en dessous du début de la phrase. C’est encore plus net sur le y de sa signature, qui descend très bas. C’est le signe d’un tempérament introverti, et même quelque peu mortifère.
La deuxième remarque sur ce point est que, au milieu de cette tendance générale à écrire vers le bas, Sarkozy écrit en zigzag, alternant les phases où il remonte ces lettres et celles où il les descend. Cela peut être interprété comme un signe d’instabilité, d’incohérence, voire même de malhonnêteté. Une écriture qui ondule ainsi montre que le contenu n’est pas assumé, qu'il y a une hésitation lorsqu’il est couché sur le papier. On le voit de façon très nette dans les passages « je ne vous trahirai pas », « je ne me déroberai pas », et encore lorsque Sarkozy écrit « Je vous demande votre confiance ».
Dernière remarque sur cette courte analyse graphologique, concernant sa signature. Les premières lettres de ses noms et prénoms sont d’une taille très supérieure à celle de toutes les autres lettres. C’est très classiquement analysé comme le fait d’une personnalité mégalomane, égocentrée et imbue d’elle-même. Ici le N de Nicolas et le S de Sarkozy font 5 à 10 fois la taille des autres lettres. C’est donc un caractère très marqué.
Voilà. C’était vraiment très intéressant, non ? (je me repose avec ces billets pseudo-politiques… aaaah)
P.S: j'ai hésité à commettre ce billet, suite au commentaire posté par Alaligne sous celui qui concernait Royal. Encore une fois donc, ceci est de ma part une blague de potache, une plaisanterie, qui ne vise évidemment pas à produire quelque chose d'exploitable. Mais après tout, il suffit de remarquer la catégorie dans laquelle je poste ces billets pour le savoir.
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23/04/2007
Ségolène Royal pense-t-elle avoir perdu ?
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22/04/2007
Deux victoires, au moins
Les résultats du premier tour présentent pour moi deux victoires. Au moins deux.
La première, c'est la victoire du taux de participation. Entre 83% et 85% en gros. Soit un taux similaire aux élections du début de la Vè république, largement au dessus de celui des dernières présidentielles, et bien sûr bien supérieur à celui de 2002 (pour rappel, un peu plus de 71%). Ce taux de participation est loin, très loin d'être un détail. Il montre une chose importante : les français se sentent concernés par la politique, ils s'y intéressent vraiment. Ce qui me marque là, c'est de faire ce constat, en sachant que parallèlement, plusieurs études montrent qu'environ les 2/3 d'entre eux, euh pardon d'entre nous, ne nous reconnaissons pourtant pas dans la manière dont elle est menée depuis des années. Il y a là le signe d'un essai qui ne demande qu'à être marqué, mais qui ne l'est toujours pas. Peut-on espérer?
La deuxième victoire, c'est le score faible de Le Pen, qui est certainement en partie le reflet du fort taux d'abstention. On sait qu'historiquement des taux de participation bas favorisent l'extrême droite, ce qu'on a vu en 2002. Cette année, le FN est enfoncé à un score très bas par rapport à ce qu'il espérait sans doute. Et voir ce soir le visage de Le Pen, si amer et fermé, et l'entendre dire qu'en gros, les français sont des cons parce qu'ils lui ont mis une claque, était particulièrement jouissif.
Aaah, dommage que je ne sois finalement pas à La république des blogs ce soir. J'aurai aimé partager ce plaisir avec mes camarades.
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21/04/2007
Mon pronostic
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19/04/2007
La légende des comportements: l'agressivité d'angoisse ou d'irritabilité
Dernier type d’agressivité dont je voudrais parler ici, avant probablement de revenir de façon synthétique sur tout ce que j’ai pu dire jusqu’à maintenant sur la notion d’agressivité : l’agressivité d’angoisse ou d’irritabilité.
Dans la situation où un individu est agressé par un autre, la lutte peut ne pas s’avérer être la meilleure solution. S’il perd, cela peut se faire par sa propre disparition. C’est la raison pour laquelle la fuite est souvent l’attitude privilégiée. Mais lorsque celle-ci n’est pas possible, et dans le milieu social, les cas d’impossibilité de fuite sont nombreux, il ne reste à l’individu comme seule possibilité que l’inhibition de l’action.
Nous avons vu que celle-ci stimule la production de glucocorticoïdes, qui elles-mêmes stimulent à leur tour le système inhibiteur de l’action (ou SIA). L’inhibition de l’action est donc un cercle vicieux dans lequel il est parfois bien difficile de sortir. Il en résulte une attente en tension de l’individu, un peu comme le hérisson qui s’arrête net au milieu du jardin lorsqu’on se fait entendre près de lui. Cette attente en tension, dans l’angoisse de l’instant d’après, crée un déséquilibre biologique important, dont j’ai déjà rapporté quelques unes des conséquences les plus importantes.
Pour sortir du comportement inhibiteur de l’action, l’individu n’a pas d’autre solution que de se mettre à nouveau en action, soit par la fuite, soit par la lutte. S’il choisit la lutte, c’est l’intensité de la tension d’attente dans laquelle il se trouvait précédemment, qui va souvent influencer l’intensité de l’agressivité qu’il va alors dégager. Certaines situations d’attente en tension peuvent ainsi aboutir à de véritables explosions de violence. C’est ce que l’on nomme familièrement un « pétage de plomb » lorsque cela intervient à un niveau individuel, et au niveau collectif cela se traduit par certaines émeutes ou révoltes.
Cette agressivité née d’une situation d’angoisse, n’est pas liée à l’inné. En effet, pour avoir lieu, elle suppose que l’individu ait préalablement appris quels « bénéfices » il peut tirer de l’inhibition de l’action, à savoir l’évitement du pire pouvant survenir dans un comportement de lutte : il faut qu’il ait compris que parfois l’action est inefficace voire nuisible. C’est donc un comportement acquis. Que l’agressivité en elle-même puisse être liée à l’inné ni change pas grand-chose, l’agressivité d’angoisse ou d’irritabilité ne pouvant intervenir que si l’individu perçoit qu’il perd moins en s’inhibant qu’en luttant.
Mais comme dans le cas de l’agressivité défensive, l’agressivité liée aux situations d’inhibition de l’action n’est elle aussi qu’un chapitre de l’agressivité de compétition. C’est en particulier le cas concernant l’expression sociale de cette agressivité, puisque l’inhibition de l’action en situation sociale provient quasiment exclusivement de l’ascendant exercé par les dominants sur les dominés.
L’exemple le plus simple, et nombreux sont ceux à l’avoir connu, intervient dans le cadre professionnel, lorsque l’individu est pris entre un responsable hiérarchique tyrannique et l’obligation de conserver son emploi afin de nourrir sa famille. Cette obligation interdit tout comportement de révolte et de lutte face au supérieur hiérarchique. Et puisque l’individu ne peut fuir (puisqu’il doit garder son travail), il entre alors bien souvent en inhibition de l’action. Ce n’est pas un hasard si ce sont les populations les plus pauvres qui remplissent le plus souvent les cabinets des médecins (enfin, oui, quand ils en ont les moyens, c’est vrai).
Il faut bien comprendre, encore une fois, que cette agressivité d’inhibition de l’action, n’est pas une agressivité gratuite. Elle ne sort pas d’elle-même, par un caractère inné chez les individus mis en situation de soumission, qui ne serait dans le fond que des agresseurs en puissance. Elle répond, comme les autres types d’agressivité que j’ai abordés ici, à un besoin de l’individu de sortir d’une position comportementale qui le mène à sa perte. Elle est une réponse. La lutte présente bien sûr un risque, mais lorsque ce risque semble moins fort qu’est sûre le malaise de la soumission, l’individu fait le choix de l’agressivité.
Je voudrais terminer ce billet par une rapide considération sur un phénomène qui me paraît grandissant dans les sociétés modernes : le développement des comportements auto-destructeurs. Lorsque l’agressivité de l’individu en situation d’angoisse ne peut s’orienter vers les autres individus, il va parfois choisir de l’orienter vers lui-même. Il me semble que c’est en partie le cas dans les comportements suicidaires. Je vois également un fondement similaire dans tous les comportements auto-destructeurs liés de près ou de loin à la toxicomanie. L’alcool, la cigarette, toutes les formes de drogues sont des produits dont le niveau de consommation constitue peut être un indicateur significatif de l’agressivité sociale générée dans une société donnée. Je ne veux pas être catégorique sur ce point, mais cela me semble être une piste pas tout à fait ridicule.
Désormais, pour clore cette série, il reste à étudier quelques exemples qui illustrent les points importants que j’ai relevé en m’appuyant sur Laborit. Cela nécessite toutefois un travail un peu conséquent et ce billet de synthèse pourrait ne pas arriver très vite. En tout cas il y a peu de chance que je le rédige demain.
00:50 Publié dans Un peu d'analyse comportementale | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook |
16/04/2007
La bonté gratuite rend plus heureux
Laurent a laissé un commentaire qui me rappelle un peu aux premières amours de ce blog, que j'ai, je dois le reconnaître,h un peu laissées de côté pour m'adonner de plus en plus à de l'analyse comportementale parfois un peu rude. Mon objectif initial était plus d'apporter aux lecteurs de ce blog quelques outils et quelques pistes fertiles pour être plus heureux, pour mieux gérer leur stress notamment.
Pour être tout à fait honnête, certains de mes textes récents ne sont en fait pas tellement éloignés de cette volonté première. Ceux sur Laborit notamment, car mon intention en les écrivant est, en débroussaillant tout ce qui fausse la vision que nous avons de nous-même, des autres et de nos relations avec eux, de revoir avec clarté qui nous sommes, d'où nous venons, où nous allons, et d'éviter en quelque sorte de se perdre en route. Mais tout cela prend beaucoup de temps, car certaines bases qui me semblent importantes méritent d'être posées avant de revenir aux éléments positifs que nous pouvons y trouver pour nous-mêmes.
Mais bref, revenons à nos moutons. Laurent donc, m'indique en lien un court article qui mentionne les résultats d'une étude menée par Sonja Lyubomirsky, selon lesquels il est en notre pouvoir d'augmenter notre bonheur, de devenir par nos actes plus heureux dans notre vie. Elle mentionne notamment le rôle des actes de bontés gratuits, effectués au hasard, dans cette démarche de recherche du bonheur. Je la cite moi aussi :
"it is possible to lastingly increase your happiness, but this takes work. Through consistent application of intentional activities, such as “random acts of kindness”, we can become happier and stay that way"
Je dois dire que lire cela comme le résultat d'une étude spécifique me réjouit particulièrement. Il est difficile de parfois faire ressentir combien ce type de démarche un peu atypique peut apporter aux gens qui s'y engage. Et nombres de personnes ayant la tête bien ordonnée ne le comprennent pas toujours bien, ou ont du mal à comprendre ces propositions. Pourtant pour ma part je sens intimement tout le bien que cela peut apporter. Agir avec bonté au petit bonheur la chance, de façon anonyme, en se dépossédant de tout ce que l'action peut contenir de soi en tant que tourné vers soi-même, et ne laissant en cette action que la démarche d'un pur don est probablement l'une des choses qui nous fait le plus nous sentir en harmonie avec nous-même, avec notre environnement, avec les autres hommes qui nous entourent.
On ne le fait pas parce qu'on se sentirait stupide, bizarre, un peu "drôle". Mais ces gestes ne coûtant littéralement rien, nous apportant autant, à nous et à ceux envers qui ils sont orientés, il est dommage de s'en priver. J'ai trop souvent le nez dans le guidon, sans doute comme beaucoup d'entres vous. Le travail malheureusement a parfois tendance à nous déposséder de nous-même, de nous écarter de la part de nous que nous aimerions le plus voir grandir. Ce ty pe de geste nous permet de nous recentrer sur ce que nous sommes et sur ces aspirations personnelles qui nous développent plus sûrement que bien d'autres choses.
Ce soir, grâce à Laurent, je sais un partie de ce à quoi mon prochain week-end sera occupé. Qu'il en soit remercié.
23:40 Publié dans Un peu de développement personnel | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook |
En gosse
J’étais tout furibond
Qu’il m’ait poussé dans l’herbe.
Plein d’insultes et jurons,
Rien n’arrêtait mon verbe
Il me poussa encore
Mais je résistai mieux.
Et la lutte des corps
Survint entre nous deux.
Un premier coup parti,
Un bruit sourd sur son crâne.
Un deuxième, puis un cri,
Le tambour et les larmes
Dés alors nous jurions
De ne nous plus parler.
Désormais nous serions
A jamais séparés.
Un instant, un regard
Un silence apaisé
Et le sel de nos larmes,
Sur nos joues, asséché,
Nous fit baisser les armes,
Nos colères calmer
Nous rappelons souvent
Ce souvenir d’enfance,
Regrettant maintenant
Notre tendre insouciance.
Nous étions deux gamins
Chamailleurs enfiévrés,
Lors nous faisions chemin
Vers une longue amitié.
Bon, bof, j'ai pas mal hésité avant de poster. En fait je m'aperçois que je ne suis plus très à l'aise avec les poèmes en rime. Je trouve que ça donne un côté mécanique qui nuit à la valeur poétique du texte, ce qui tout de même est plutôt dommage pour un poème. Je poste parce que je l'ai écris, mais je ne peux pas dire que j'en sois ravi...
15:04 Publié dans Un peu de poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook |
14/04/2007
La légende des comportements : l'agressivité défensive
L’agressivité défensive est mise en œuvre par l’individu afin de détruire l’agent agresseur qu’il subit. A bien y réfléchir, cette stratégie est, au moins à court terme, la plus efficace pour assurer la conservation de la stabilité de l’individu. En effet, fuir ne garantit pas dans l’absolu que l’agent agresseur ne refasse surface et nous oblige à nouveau à fuir. Alors qu’une fois détruit, il ne saurait à l’évidence plus nous créer aucun dommage. Mais évidemment, cela ne prend pas en compte les représailles qui peuvent parfois survenir par la suite.
Laborit indique que cette agressivité défensive est d’abord un comportement inné, puisqu’il met en jeu ce que l’on appelle le « periventricular system » ou PVS qui met en jeu une batterie de voies cérébrales faisant appel à l’acétylcholine comme médiateur chimique (on dit que le PVS est « cholinergique »). Elle ne devient une agressivité relevant d’un comportement appris que si son résultat a été bénéfique à l’individu qui aura alors mémorisé l’expérience positive vécue suite à cette l’utilisation de cette agressivité défensive. L’activité de sa mémoire pourra alors lui permettre d’effectuer du réenforcement, en faisant appel à la même stratégie pour obtenir le même résultat positif.
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Aparté : j’ai hésité à mentionner dans le court paragraphe qui précède le PVS et son fonctionnement cholinergique, car je ne pense pas que ce point puisse réellement être bien compris, et qu’il apporte quelque chose à la discussion. Finalement, je l’inclus pour expliquer un point comportemental auquel je tiens :
Si je le laissais tel quel, sans cet aparté, il ferait très bel effet dans mon billet, et lui donnerait un caractère savant qui en augmenterait très probablement la crédibilité aux yeux des lecteurs, et partant mon aura auprès de vous. Mais je trouve en fait ce procédé parfaitement factice et trompeur.
Que se passe-t-il à la lecture de ce passage ? Et bien en quelque sorte je donne des gages de ma crédibilité sur cette question, je balise le terrain en intimidant en partie le lecteur, ce qui inhibe la propension qu’il aura à répondre et notamment à s’opposer. En revanche, puisque je suscite son admiration par l’étalage d’un prétendu savoir, j’augmente les chances qu’il s’aligne sur mon discours, utilisant ici à plein le processus de miroir des valeurs qui existe chez chacun de nous : approuver le discours d’une personne savante et reconnue pour ses qualités, et augmenter ainsi sa propre valeur aux yeux des autres (du moins c’est ce qu’on espère). Vous comprenez qu’on est là en plein processus de manipulation. La difficulté est que celle-ci est particulièrement subtile, puisque cachée derrière un discours qui est peut-être réellement savant, et surtout qu’elle est quasiment une auto-manipulation, issue du besoin de reconnaissance que nous avons tous.
Mais ce processus me semble relativement répandu. On le voit notamment dans la propension de certains à constamment citer de grands noms pour exprimer des idées somme toute pas bien compliquées (franchement, citer Voltaire pour dire que quelqu’un qui n’a pas notre avis a tout de même le droit de s’exprimer, j’ai toujours trouvé ça étrange), parce que ces grands noms apportent une grandeur et un caractère inattaquable au discours tenu (« quoi, tu oses t’opposer à Voltaire ? tu te prends pour qui ? »).
Tout ce que je dis ici ne signifie pas que je pense qu’il faut se méfier des discours savants. Ce dont il faut se méfier c’est de nous-mêmes et de notre besoin de reconnaissance qui se traduit parfois par des prises de position à l’aveugle, uniquement faite sur l’aura, sur l’apparence du discours ou du comportement que nous observons. C’est là que le risque d’être trompé se situe. Et il est d’autant plus redoutable que puisque nous nous serons trompés nous-mêmes, il nous sera plus difficile de revenir dessus et de changer d’attitude.
Par exemple, pour ce qui concerne ce billet, je n’ai fait que recopier presque mot pour mot quelques lignes de la Colombeassassinée, déjà abondamment citée ici. Ne vous sentez donc pas en situation d’infériorité de savoir, vous auriez tranquillement pu en faire autant que moi.
Fin de l’aparté
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Cependant, plusieurs expériences montrent qu’en réalité c’est encore la place de l’acquis qui est la plus importante dans l’expression de l’agressivité défensive. Un bébé naissant dans un milieu apaisé montre rarement un comportement agressif. Ce n’est que par l’apprentissage et la mémorisation du succès de ses colères qu’il développera un comportement réellement agressif envers son entourage. Mais on retombe là dans les explications fournies par Xavier chez lui et que j’ai déjà évoquées.
La difficulté d’analyser l’agressivité défensive vient en fait de sa très grande proximité avec l’agressivité de compétition. En effet, il est bien peu aisé de distinguer entre eux les cas d’agressivité défensive, et ceux d’agressivité de compétition. Lorsque le peuple se soulève pour renverser ses maîtres dictateurs, on peut analyser cela comme l’expression d’une agressivité de défense en réponse au joug autoritaire subit, mais également comme l’expression d’une volonté de devenir soi-même dominant, ce qui revient alors à une agressivité de compétition. Pour soutenir ce deuxième angle de vue, je rappelle que ces braves gens mis en capacité à devenir eux-mêmes tyrans à la place des tyrans seraient bien peu nombreux à s’en priver.
C’est toute l’ambigüité du « jeu social » qui s’exprime dans la difficulté à établir cette séparation. Et une partie non négligeable de l’enjeu des réponses que l’on peut donner à l’agressivité des révoltes. Car si celle-ci est une agressivité défensive, l’analyse qui la déculpabilise détient alors une part de vérité qu’on aurait tort de négliger, tandis que dans le cas contraire, il apparaît plus difficile de défendre ces comportements, l’agressivité de compétition pouvant s’exprimer autrement que par des destructions physiques. Mais je compte revenir de façon plus spécifique sur ce point dans mon prochain billet sur l’agressivité d’angoisse et d’irritabilité, celle faisant suite notamment aux situations d’inhibition de l’action. Il me semble qu’une grande partie de l’enjeu social d’unité d’un peuple se trouve là.
P.S: il y a un article intéressant, ici, qui revient en détail sur le fonctionnement biologique du cerveau dans le cadre d'une réponse au stress et à l'agressivité.
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