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03/11/2006

Mariage gay et équilibre social

François, du Swissroll a relayé hier un article intéressant sur l’impact qu’a le mariage gay sur le mariage hétérosexuel, et sur la famille. Pour faire très court, l’idée est que, loin de remettre en cause la sacro-sainte organisation de la famille avec le père, la mère et les enfants, le mariage gay est en fait un facteur de renforcement de la valeur du mariage et de la notion de famille.

Les commentaires à l’article de François sont assez intéressants aussi, notamment celui d’Authueil, qui dit en substance que c’est parfaitement logique puisque les gays en se mariant, montrent l’attrait que le mariage (tout court) représente pour un couple, quelque soit son orientation sexuelle, et un autre commentateur (au nom trop long) indique qu’il s’agit en fait là de l’illustration de la démarche mimétique des gays vis-à-vis de ce qu’il appelle « l’esthétisme bourgeois ».

Ces deux commentaires m’intéressent beaucoup, j’adhère complètement à celui d’Authueil, et le second, bien qu’un peu dur, voit quelque chose d’assez juste. Mais ils ne vont pas assez loin dans leur idée pour tout dire, et il passe à côté de l’analyse la plus intéressante qu’on peut faire de ce phénomène (enfin ce n’est que mon avis remarquez…). Je ne vais pas faire un billet trop long ici, mais plus tracer quelques lignes de réflexion qui méritent à mon avis plus d’attention.

La première, et ici j’avance prudemment car pour produire quelque chose d’un peu clair je suis obligé de caricaturer, rejoins une idée que j’ai déjà évoquée il y a quelques temps sur ce blog. En gros cette tendance provient de la nécessité d’équilibrage de la position sociale que les gays pensent avoir.

Ils ont encore bien malheureusement raison lorsqu’ils disent qu’ils font encore l’objet de discriminations. Par discrimination j’entends le fait qu’une personne, en parlant d’eux, ou encore plus simplement en pensant à eux, va inclure dans les éléments de sa réflexion l’orientation sexuelle des gays comme un élément d’analyse parmi d’autres. Je remarque sur ce point que ce processus est plus ou moins conscient chez la personne, et surtout, plus ou moins assumé. La discrimination naît dés cet instant où ce paramètre entre en jeu dans « l’évaluation » de la personne homosexuelle et de ses actes.

Je crois moi aussi que ce type de réaction reste très répandu, et pour être franc je ne suis pas surpris que l’évolution soit lente dans les sociétés de tradition patriarcale. Mais donc, cela génère un sentiment de discrimination bien compréhensible chez les gays. Cette discrimination peut d’ailleurs prendre des détours très sinueux. Il me semble assez évident qu’il existe une discrimination passive non négligeable qui est elle aussi une source de mal-être chez les gays. On la désigne couramment sous l’expression « la pression de la société », mais c’est plus précisément l’ensemble des apprentissages fait par un individu, qui vont à l’encontre de l’expression de sa sexualité comme une expression neutre d’un point de vue moral.

Pour être plus clair, c’est le gosse dont le père exerce une autorité mâle et virile sur la famille et qui ne s’abstient pas de quelques rires sarcastiques lorsqu’il croise un homme peut-être efféminé. L’enfant grandit avec une image salie de l’homosexualité, comme s’il s’agissait là d’une anormalité, d’une déviance à laquelle il aura rattaché une valeur sociale, et plus généralement, morale, négative. Le dilemme de la sortie de l’adolescence et de la découverte de sa sexualité dans un cadre sain est alors immense. Nombreux sont ceux qui adoptent alors une attitude de déni, afin de ne pas « tromper » l’image « saine » que leur entourage a construit d’eux. Le drame de l’étiquette collée au front et dont on ne veut pas soi-même prendre le risque de se séparer.

Mais je bifurque là. Revenons à nos moutons (…). La difficulté, face à cette situation, est de rétablir une situation d’équilibre social. Je l’ai déjà indiqué dans le billet référencé plus haut, nous cherchons tous à tout moment à maintenir notre équilibre, notre homéostasie, on pourrait même dire : nous cherchons tous à maintenir à tout moment l’image de normalité que pensons-nous les autres se sont fait de nous (je remarque rapidement ici, que dans le fond, on se sent « normal » lorsqu’on se sait accepté).

Les gays font face à une situation particulière. Leur orientation sexuelle dit-on, ne leur ouvre pas de voix « naturelle » au mariage. Ce serait contre nature. Ce raisonnement est évidemment une erreur profonde. Car en quoi le mariage procède-t-il d’un quelconque processus « naturel » ? Peut-on me dire ce que l’établissement d’un contrat moral entre deux personnes (tu me seras fidèle, je te serais fidèle) et d’un contrat civil a à faire avec la nature ? Le mariage est exclusivement affaire de culture sociale. Rien d’autre. Et une culture sociale comme son nom l’indique, n’est pas naturelle, elle est culturelle, c'est-à-dire construite, fabriquée sur la base de jugements de valeur valables pour un groupe donné, à une époque donnée, dans un environnement donné. Si le mariage était réellement d’essence naturelle, alors son mécanisme pourrait avoir valeur d’universalité. On se rend bien compte à la lueur de la courte analyse qu’on vient de produire (et qui est bien suffisante) qu’il n’en est rien.

Mais je bifurque encore. Pour répondre donc à ce déséquilibre, les gays ont besoin de compenser d’une certaine façon. Je n’aime pas beaucoup ce terme parce qu’il est souvent accompagné de mauvais sous-entendus, mais je n’en trouve pas vraiment d’autres. Afin donc de rétablir leur orientation sexuelle dans le champ d’une orientation « normale », les gays font comme beaucoup d’entre nous dans d’autres situation : ne pouvant agir sur la substance de la chose (et pour cause, on ne peut pas demander à quelqu’un de « décider » de changer d’orientation sexuelle !), ils agissent sur les signes extérieurs qui, aux yeux de trop nombreuses personnes, et ça va durer encore des siècles comme ça, rendent compte de la substance. Dans cette démarche, vouloir accéder au mariage est évidemment une étape reine. C’est un des signes de normalité sociale les plus forts. Et ce n’est pas qu’une question pour les homosexuels d’ailleurs, les célibataires endurcis, quelque soit leur sexe, ressentent très certainement une « pression sociale » assez proche.

Je voulais poursuivre ce billet avec une deuxième réflexion sur la notion de conformisme, mais je ne vais malheureusement pas avoir le temps. La semaine prochaine, promis.

Un mauvais logo fait un mauvais logos

medium_logo_UE.jpgComme à mon habitude, je découvre en retard le logo qui a été sélectionné à Bruxelles pour illustrer les cérémonies du 50ème anniversaire de la signature du traité de Rome, cérémonies qui auront lieu l'an prochain.

 

Comme M.le maudit je trouve que le choix du vainqueur (logo en haut à gauche) n'est pas formidable. Mais pas vraiment pour les mêmes raisons. Que le terme choisi soit anglais ne me dérange pas, d'ailleurs il y a un petit effort pour intégrer d'autres langues, ce que montre le tréma sur le o, et l'accent sur le e. Le R du registered ne m'interpelle pas non plus beaucoup, et pour ma part je trouve le since 1957 plutôt rigolo.

 

Mais ce que je reproche le plus à ce logo, c'est qu'il est en fait parfait pour illustrer les meilleures fondements de l'euroscepticisme. Il est d'abord à peu près illisible. J'ai mis plusieurs secondes à comprendre de quoi il s'agissait, le logo poussant il me semble plus à le regarder lettre à lettre qu'à le lire réellement. De là à dire qu'il illustre bien l'opacité tant du projet que des méthodes européennes, il n'y a qu'un pas, que certains ne s'empêcheront pas de franchir.

 

Et puis surtout, comme le fait remarquer un commentateur chez M.le maudit, ce logo est trop hétérogène. Il n'a aucune uniformité, aucune unité. Ce qui pour un regroupement qui s'appelle Union Européenne pose tout de même un petit problème. Ce logo rend trop une impression de fouilli, d'agrégation d'éléments qui ne vont pas entre eux (ils sont illisibles mis bout à bout) parce qu'ils n'ont pas d'homogénéité.

 

medium_Zane.3.jpgEn regardant la liste des 10 "meilleures" contributions, on trouve quelques exemples qui font mieux passer l'idée d'unité. Pour ma part je ne trouve rien de très emballant dans les autres participations, mais le logo gagnant me semble tout de même le plus mauvais de la liste, car le plus hétérogène. J'aurai peut-être sélectionné celui de Zane Jekabsone, avec ses briques multicolores qui semblent progressivement construire un mur. On aurait eu l'idée d'unité, et aussi de construction et de différences des composants. Peut-être pas formidable, mais mieux en tout cas que ce Tögethér étrange.

27/10/2006

Bloguer diminue le stress

Il y a quelques temps déjà, j’ai reçu un mail d’Edgar dans lequel, parmi d’autres sujets, il indiquait que le blog était un outil de gestion du stress. Je n’y ai pas vraiment fait attention sur le moment, mais à bien y réfléchir, je me demande s’il n’a pas trouvé là une des raisons du succès des blogs.

 

En effet, et c’est désormais un poncif de le dire, le blog permet une modification de comportement, notamment vis-à-vis de l’information. Les blogs qui traitent de l’actualité en particulier, permettent à ceux qui les écrivent de ne plus subir crûment l’information, mais de s’exprimer à son sujet, de faire sortir le ressenti qu’ils en ont. Dans cette mesure, le blog est un outil de catharsis, qui permet de mettre des mots sur les maux.

 

On peut comprendre ce mécanisme de façon plus fine encore grâce à Laborit. Je l’ai déjà évoqué dans certains billets plus anciens, lorsqu’une personne se retrouve en inhibition de l’action, sans moyen de lutter ou de fuir face à l’événement qui l’angoisse, cela devient vite source de stress et de déséquilibre pour la personne. Son corps réagit alors en diminuant notablement sa capacité de se défendre, ce qui peut résulter in fine par la maladie.

 

Pour sortir de l’inhibition de l’action, il faut donc être en mesure d’agir. C’est en agissant que bien souvent on peut diminuer le stress ressenti dans une situation donnée. Un exemple très simple pourra illustrer ceci : un soldat non expérimenté sera probablement stressé avant d’aller à son premier combat, notamment parce qu’il va expérimenter quelque chose qui reste encore inconnu pour lui. Mais dés qu’il sera dans le feu de l’action, son stress disparaîtra. Parce qu’il aura mobilisé ses facultés pour se rendre efficace, et que cette mobilisation, qui se traduira notamment par une poussée d’adrénaline dans le cerveau, va diminuer l’attention qu’il portait sur cette situation inconnue.

 

Un autre exemple clair est celui des examens, sujet sur lequel la littérature est aussi développée que l’inquiétude est répandue. J’ai entendu parfois autour de moi des étudiants demander ce qu’ils pouvaient faire pour diminuer leur stress, dans l’attente fiévreuse d’une formule magique qui ne se contenterait pas seulement de faire disparaître leur stress, mais leur assurerait aussi de réussir leurs examens. D’ailleurs, on peut, lors d’une relaxation, ou lors de toute démarche qui crée un état de conscience modifiée chez la personne, suggérer le succès, et ainsi le faciliter.

 

Mais quelle erreur de croire qu’un simple murmure de thérapeute peut résoudre ses équations et rédiger sa dissertation de philosophie à sa place ! En réalité, et en s’appuyant sur l’idée que l’action est la meilleure méthode pour diminuer son stress, le seul vrai bon conseil que l’on peut donner à un étudiant qui est stressé par ses examens, c’est de les préparer ! Il doit bosser, se rendre actif pour s’apporter lui-même la solution à son problème. Si son stress est tel qu’il n’arrive pas à se mettre à son travail, on peut certes l’aider autrement, mais s’il ne révise pas, le jour de l’examen il sera pétrifié. Et il se plantera.

 

Agir donc, et pourquoi pas sur le mode de la rédaction d’un blog, est effectivement un très bon moyen pour diminuer son stress. Les blogueurs d’actualités peuvent ainsi évacuer l’angoisse que peut générer en eux l’information, et mieux que ça même, cela peut leur permettre, parce qu’ils émettent des jugements de valeur sur les événements, qu’ils se positionnent en faveur de ceci ou de cela, de penser qu’ils agissent réellement pour modifier le cours des choses. Informer, analyser, relayer, prendre parti, c’est déjà agir pour que les choses changent pense-t-on. Probablement n’est-ce pas tout à fait faux, mais ne nous leurrons pas trop tout de même sur ce point. La différence d’efficacité est forte entre dire et faire.

 

(et là je stresse tout le monde)

26/10/2006

République des blogs Première ! (troisième?)

Soirée très sympathique hier à la République des blogs. A peine arrivé je reconnais déjà deux camarades communards, Koz et Jules, à qui je serre rapidement la main pour m’en aller chercher Emmanuel que j’ai entre-aperçu sortir de la salle par l’arrière. A vrai dire j’espère qu’il est accompagné de Phersu, que je n’ai encore jamais croisé. Mais non, il est avec un autre blogueur que je souhaitais également rencontrer, puisqu’il s’agit de Laurent Guerby. Petit détail très amusant, Laurent a collé une étiquette sur sa chemise indiquant ses noms et prénoms, et juste en dessous, il a noté : anonyme.

 

Mais décidemment peu enclin à me comporter poliment, je les quitte rapidement pour aller saluer Vérel qui est assis à la table d’à côté, avec Authueil, que je rencontre pour la première fois. La discussion commence très agréablement, et Authueil se révèle être quelqu’un de très sympathique. Mais celui-ci nous quitte après quelques minutes pour aller saluer le maître qui trône à deux pas. Je me retrouve avec Vérel et un autre blogueur économiste, Denis Castel, et nous entamons une discussion fort intéressante sur la liberté et la conduite du changement, Vérel nous promettant alors quelques futurs billets certainement passionnants sur la question.

 

Mais il est tard pour moi, je dois aller prendre le train pour rejoindre ma banlieue. En repassant par la salle, je croise Versac qui met quelques secondes à me reconnaître, et j'en profite pour serrer la main de Laurent Gloaguen, qui a un mot gentil. Je repars avec une seule petite déception : ne pas avoir vu Guillermo et Raveline, et ce n’est pourtant pas faute de les avoir cherché. Malgré cela, l’expérience est une vraie réussite. Bravo à son créateur !

25/10/2006

Animaux sociaux et débit de boissons

Les éthologues vous le diront tous, les animaux se rencontrent de façon privilégiée autour de points d'eau, parfois même dans des conditions de cohabitation surprenantes. Nous avons tous vu ces étonnantes photos du peuple de la savanne, lions, girafes, zèbres, antilopes, éléphants, buvant quelques gorgées, tous rassemblés autour de la mare locale. On les voyaient se courser deux minutes avant pour savoir qui allait manger l'autre (un jeu un peu stupide d'ailleurs, puisqu'à la fin, c'est toujours le lyon qui gagne), mais là, stop, pouce, chacun s'installe tranquille et sirote son liquide en paix à côté de son prédateur.
 
Et bien figurez-vous que les hommes, dont nous redécouvrons l'animalité grâce à quelques-uns, procède exactement de la même façon. Il suffit de leur tendre une chopine pour qu'ils cessent durant quelques instants de vilipender les camarades situés à leur gauche, ou à leur droite, et que tous fassent ami-ami. Et comme je suis tout pareil, je me rendrai volontiers ce soir à la République des blogs pour observer in situ ce curieux phénomène.
 
J'ai même lu ici ou là que certains tapaient déjà dans le coude des autres pour se faire offrir la boisson. Mon approche est bien plus altruiste puisque je compte venir avec mon rhume, et j'en ferai cadeau à qui voudra. Il y a tout de même quelques personnes vers lesquelles va ma préférence pour ce don du coeur (et des poumons): Raveline, Authueil, Guillermo, Aymeric, Polluxe, Laurent et évidemment mes petits camarades.
 
 
Quand j'y pense, c'est pas croyable ce que je suis sympa.

19/10/2006

De retour ?

Non, non, je ne parlerai pas de Jospin dans ce billet. De toute façon ce serait ridicule puisqu'on est désormais fixés sur son ex-futur retour aux affaires, et mon détour antécodal (c'est bien ça Aymeric?) ne m'a tout de même pas suffisamment déconnecté de la notion de temps pour que je m'y perde.
 
Non, c'est de mon retour à moi que je vous parle. Il va probablement attendre encore quelques jours, à mon grand dam. Je n'ai toujours pas Internet chez moi, à cause de quelques, hum, longueurs chez le fournisseur que j'ai contacté. Et mon nouveau boulot ne me permet absolument pas de produire les longs et lourds billets auxquels je vous ai habitués et dont vous êtes devenus si friands (vous m'étonnez parfois).
 
Et c'est franchement frustrant, car j'ai pas mal de choses à écrire. D'abord, il faudrait quand même que je vous entretienne un peu de mes échanges avec les ornithorynques (je suis tout content, j'écris ce mot de plus en plus vite, et sans faute d'orthographe), ensuite il faut absolument que je poursuive ma recherche concernant les travaux de Laborit, et que j'y apporte un peu plus de structure et d'organisation qu'avant mon départ. Ce projet là va prendre encore pas mal de temps. Il y a un boulot important à faire pour produire des billets que je voudrais plus pédagogiques, et auxquels je voudrais aussi joindre quelques réflexions personnelles.
 
D'ailleurs je peux vous le dire, allez, je suis désormais consultant. Et bien je peux vous assurer que travailler dans le conseil, un métier bien dans la lignée de ma formation d'école de commerce, où on brasse et on facture du mot-clé à tire-larigot, de façon aussi assumée que l'utilisation de ces mots-clés est nécessaire à donner une image crédible au cabinet (au fait, vous saviez qu'en langage consultant, "organisation des tâches" se disait "ré-engineering de processus" vous?), tout cela alors même que je suis au beau milieu d'une recherche approfondie sur les travaux de Laborit, c'est TRES dur. Ca rend vaguement schizophrène, car je suis obligé, alors que je suis conscient de tout le background d'autojustification qui génère ce vocabulaire, de l'utiliser moi aussi, face à des gens qui l'utilisent eux de façon aussi inconsciente qu'ils sont de bonne foi.
 
Je me demande combien de consultants ont lu, et compris, Laborit. 

15/09/2006

Fly me to the moon ...

... and let me play among the stars ...

 

Quand j'étais parti au Canada il y a deux ans, et l'an dernier aux Etats-Unis, j'avais entendu cette petite chanson que j'aime bien juste avant le décollage, à chaque fois. Je me demande s'ils proposent la même chanson sur les vols à destination de l'Australie ? :o)

 

medium_planisphere.2.jpg

Je serais de retour dans trois semaines, avec un nouveau boulot à la clé. Je laisse tout ouvert, tant pis pour les spams qu'il y aura, j'espère que ça n'empêchera pas ceux qui voudraient venir faire une pause chez moi et discuter de le faire. A bientôt ! A moi les ornithorynques !

Sa raison d'être

medium_Manpower.gifLe point de départ, me semble-t-il, de toute la réflexion de Laborit, tient en une phrase synthétique : l’être n’a pas d’autre raison d’être que d’être. Ce que cela veut dire, c’est que l’activité de notre organisme est toute entière dédiée à assurer sa propre conservation dans le temps. Il travaille à tout moment à maintenir ou à retrouver son équilibre, et à faire en sorte qu’il se maintienne dans le temps. Cannon parlait pour désigner cet état que nous recherchons d’homéostasie, Freud évoquait le principe de plaisir, et Claude Bernard indiquait qu’il s’agissait là d’assurer « la constance des conditions de vie dans notre milieu intérieur ».

 

J’aime bien cette dernière formulation, car elle permet d’envisager les choses de façon très globale. On comprend effectivement à travers elle, que l’équilibre recherché ne concerne pas simplement nos cellules ou nos organes considéré chacun isolément, mais qu’il est un état global qui concerne chaque élément qui nous constitue en tant qu’il participe au tout, à l’ensemble, au système pourrait-on dire, que nous sommes.

 

On comprend qu’il ne s’agit donc pas que d’un équilibre physiologique, mais également psychologique, ou pour dire cela de façon plus juste, que cet équilibre dépend autant du physiologique que du psychologique. L’un ne va pas sans l’autre. Cela permet de mieux saisir l’importance de notre construction psychologique dans le maintien de notre santé. Nos croyances, nos valeurs, affectent notre ressenti et nos sentiments à chaque moment de notre vie, et nous avons besoin de conserver dans ces aspects la même stabilité que celle recherchée par nos cellules.

 

C’est pour cela qu’il est fondamentalement mauvais d’agir à l’encontre de ses propres valeurs. Une des sources de stress en entreprise est notamment le fait d’exercer une activité qui nous amène à aller contre nos valeurs. Travailler dans une entreprise d’armement si l’on est pacifiste, chez un producteur de tabac si l’on est anti-tabac, ou, quelque soit le secteur, travailler pour un patron malhonnête. Celui qui se trouve obligé de poursuivre chez un tel employeur allant ainsi à l’encontre de ses propres valeurs génère en lui un déséquilibre qui nuit à l’équilibre de l’ensemble, et est donc susceptible d’aboutir à la maladie.

 

C’est aussi exactement ça qui intervient dans le déni. Afin de préserver son équilibre psychologique, la personne qui a mal agit finit par nier la réalité de ce qu’elle fait. Elle ne le nie pas de façon mensongère, ce qui signifierait qu’elle resterait consciente de son mensonge, et donc qu’elle n’apporterait pas de solution à son déséquilibre, mais bien de façon parfaitement sincère, c’est-à-dire qu’elle est elle-même persuadée de n’avoir rien fait de mal, ce qui est la seule possibilité de faire perdurer son harmonie intérieure.

 

Il y a quelques temps, j’avais indiqué chez clic (malheureusement son blog, tentative, n’existe plus) qu’on pouvait trouver là une idée permettant d’expliquer, en partie, le syndrome de Stockholm. Les personnes séquestrées sont mises en situation de très fort déséquilibre. Elles sont l’objet d’une agressivité très forte qui les met en péril. Leur psychisme notamment est attaqué et fait que même si elles ne sont pas brutalisées, elles se sentent mal. Elles ont alors besoin de rétablir l’équilibre psychologique perdu.

 

medium_balance.gifPour cela elles ont besoin de s’auto-persuader qu’elles ne vivent pas une expérience « anormale », mais que d’une certaine façon, tout est dans l’ordre. C’est cette perception d’anormalité qui crée le déséquilibre. Dés lors les victimes vont entrer dans un processus de déni de la réalité, et vont construire une représentation qui redonnera à celle-ci les apparences de la normalité. Pour ce faire, les victimes prennent le contre-pied de la réalité de l’action de leur persécuteur, et se persuader que celui-ci est dans le fond un homme bien. Ils procèdent comme avec une balance de Roberval et mettent sur un plateau un poids similaire à celui qu’il y a sur l’autre, mais qui s’oppose à lui. Et ainsi ils obtiennent l’équilibre.

 

Mais revenons-en à notre propos initial. Ce qui est intéressant à observer dans les organismes vivants, c’est donc qu’on constate la profonde interdépendance qu’entretient chaque partie avec le tout, et le tout avec chaque partie. Si l’un défaille, il remet en cause l’équilibre des autres et de l’ensemble. Laborit, pour bien en rendre compte, compare l’homme à la machine. Un ordinateur, fonctionne grâce au courant électrique, et à l’information qu’il contient. S’il ne contient pas d’information, il n’a pas de fonctionnement, et s’il n’a pas de courant, il s’arrête. Mais dans ce cas, il ne perd pas les informations qu’il a pu stocker avant. Et il suffit de le rebrancher pour qu’il fonctionne à nouveau.

 

Chez l’homme, cela est impossible. Toute sa structure fonctionnant comme un tout qui assure à chaque moment la pérennité de l’ensemble et celle de chaque élément qui la constitue, il est inenvisageable de lui couper sa source d’énergie (qui est l’énergie solaire). On remarquera toutefois, que notre organisme change au cours du temps : nous grandissons, nos cheveux changent de couleurs, nos cellules se renouvellent, etc. Mais ce qui reste invariable, c’est la structure qui soutien l’ensemble, c’est-à-dire les relations qu’entretiennent entre elles les parties de l’ensemble. La finalité d’un organisme vivant, dit Laborit, est le maintien de sa structure. On comprend bien avec cette formulation que l’équilibre de l’organisme vivant ne peut donc qu’être atteint que si chaque partie assure son équilibre, contribuant ainsi à assurer l’équilibre de l’ensemble, et si l’ensemble agit pour contribuer à l’équilibre de ses parties.

 

Il faut bien mesurer l’importance de cette idée, et l’impact qu’elle a sur la compréhension de nos comportements. Notre propre finalité est d’abord de maintenir notre homéostasie. Ce n’est pas de devenir avocat, médecin, mère, de voyager en Australie, d’offrir la soupe populaire, etc. Préalablement à toutes nos actions, quel qu’elles soient, il y a ce besoin auquel nous répondons de maintenir notre équilibre interne. Quand on a bien compris ce que cela implique, on se dégrise de pas mal de fausses idées sur soi-même.

 

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14/09/2006

Automatismes acquis, mes chéris

Le dernier commentaire de DG me donne l’occasion de revenir sur la question des comportements inconscients de façon plus détaillée que précédemment. Je n’entends pas répondre au début de son commentaire, qui me semble plus devoir être adressé à Koz qu’à moi, mais sur son étonnement devant le chiffre de 90% que j’ai indiqué comme étant la part de nos comportements inconscients.

 

En préambule, je voudrais faire deux remarques sur ce point. La première, c’est que ce chiffre ne constitue pas le résultat d’une quelconque mesure scientifique précise suite à une étude spécifique sur le sujet. Il est celui qui fut indiqué lors de l’émission Rayon X qui portait sur la question du cerveau, et que j’ai indiqué dans mon billet, et je note que ce chiffre ne fut remis en cause par aucun des scientifiques présents sur le plateau de l’émission, tous venant d’horizons relativement variés bien que leurs disciplines soient toutes en relation avec le cerveau.

 

Laborit de son côté, avance le chiffre de 99%. Je ne saurai dire lequel est le plus proche de la vérité, mais l’idée générale qu’ils cherchent à faire passer c’est que quoi qu’il en soit, c’est bien la très grande majorité de nos comportements qui sont aujourd’hui inconscients. Ce point est d’ailleurs un dada de Laborit, ce qui peut expliquer qu’il exagère légèrement sur le chiffre, puisque l’un de ses objectifs principaux est de parvenir à faire sortir l’homme de l’ignorance qu’il a de son déterminisme biologique et de l’impact de l’animal qui est resté en lui, même si ça n’est pas bon pour son orgueil.

 

Ma deuxième remarque préalable, c’est que ce chiffre de 90% ne doit pas, être pris comme une mesure absolue qui se vérifie chez chaque individu. C’est bien évidemment une sorte de moyenne, qui cherche plus à rendre compte d’une réalité générale qu’autre chose. Il est possible qu’on trouve des individus qui présentent un répartition plus équilibrée entre comportements conscients et inconscients, mais on peut d’ores et déjà parier qu’ils seront très minoritaires. Et que leur étude ne pourrait donc pas remettre en cause la théorie générale avancée.

 

L’introduction est terminée, venons-en au corps de ce billet. Pour bien se rendre compte de l’importance de nos comportements inconscients, voyons d’abord d’où ils viennent. En gros on en trouve deux types : nos comportements innés, issus de notre mémoire génétique, ceux qui répondent à nos besoins fondamentaux. Laborit les nomme « réflexes innés ». Et ceux que nous construisons nous-mêmes petit à petit en fonction de nos expériences, de nos sensations lors de tel ou tel événement, et que nous gravons dans notre mémoire affective. Laborit les appelle « réflexes acquis ».

 

Alors d’abord, quid des réflexes innés ? Sur ce point, il faut bien dire qu’il souffre tout de même peu de contradiction. On serait en effet bien présomptueux de se prétendre apte à commander et/ou modifier l’information contenue dans nos gènes. Cette mémoire de l’espèce qu’ils contiennent, et qui commande directement nos comportements lorsque nous avons faim, soif, sommeil, etc. n’est nullement une mémoire sur laquelle nous pouvons agir afin de la détourner de son objectif premier. On remarquera d’ailleurs que c’est tant mieux, puisque cet objectif est d’abord de nous maintenir en vie.

 

Ah, mais j’entends des protestations dans l’assistance. On me dit que pourtant, nous sommes bien capables de nous abstenir de manger pendant plusieurs jours alors que notre organisme nous réclame sa pitance , ou de nous retenir d’aller aux toilettes alors que l’envie s’en fait pressante. J’ose balayer cette objection d’un revers de main en faisant, là aussi, deux remarques. La première c’est que ce type de comportement visant à contenir nos pulsions innées est rare. Oui, oui, je sais, tout le monde l’a fait une fois dans sa vie, voire plusieurs, mais sur l’ensemble des occasions dans lesquelles nous devons répondre à ces pulsions, nous le faisons très majoritairement en satisfaisant notre envie plutôt qu’en la frustrant. Et quelqu’un qui agirait ainsi contre ses envies de façon récurrente, serait soit un type bien barré, soit un chercheur. On n’en croise pas à tous les coins de rue.

 

La deuxième, et la plus importante, c’est que ces refus de répondre aux appels de notre corps ne peuvent évidemment qu’être limités dans le temps. Il n’est pas besoin de développer sur ce point puisqu’il est évident. Et cette limitation dans le temps rend en quelque sorte caduque le raisonnement qui viserait à démontrer qu’on peut dominer sa mémoire biologique, puisque quoi qu’il en soit c’est toujours elle in fine qui prend le dessus.

 

Mais là une deuxième objection est soulevée. On me dit que mon explication est hors-sujet, car peu importe que nous soyons effectivement prisonniers de ces besoins fondamentaux, cela ne nous rend pas moins conscients de leur existence, et lorsque nous mangeons un steak, nous sommes bien conscients que nous le mangeons. Cette objection est plus subtile que la première, je remercie la personne qui l’a soulevée, car elle va nous permettre d’approfondir notre analyse, mais je ne la félicite pas, car si elle avait bien lu mon blog, elle ne l’aurait pas faite.

 

Il y a en effet méprise ici sur la notion d’inné. Car en aucun cas le fait de lever sa fourchette pour porter le morceau de steak à sa bouche ne relève de l’action de notre mémoire génétique. Nous ne sommes pas là dans le cas d’un réflexe inné, mais d’un réflexe acquis, qui provient de l’apprentissage que nous avons fait des techniques permettant de manger. En revanche, ce qui est bien inné, c’est la salive qui nous est venue à la bouche lorsque nous avons eu en tête l’image du steak saignant qui nous attendait dans notre assiette. Ce réflexe atavique est lui issu de fonctionnement biologique dont nous n’avons absolument pas conscience. Nous ne sentons pas en nous nos hormones et nos influx nerveux agir. Tout ce que nous pouvons sentir, ce ne sont que les effets terminaux de leur activité : nous marchons, nous mangeons, etc. Mais le processus qui les engendre nous reste parfaitement impalpable.

 

Venons-en maintenant au plus intéressant : nos réflexes acquis, qu’on peut aussi appeler automatismes acquis. Ces automatismes, ont l’a déjà montré précédemment (cf. lien précédent), sont issus de nos apprentissages, de nos expériences et de la façon dont nous avons intégré celles-ci dans nos parcours personnels. Ils viennent de notre mémoire émotionnelle, par laquelle nous gravons en nous los impressions liées aux événements auxquels nous sommes confrontés. Notons ici que ces événements peuvent être parfaitement bénins, ou perçus comme tel, pas besoin qu’ils sortent de l’ordinaire pour que nous les utilisions ensuite pour sculpter notre mémoire.

 

Ces automatismes acquis vont intervenir dans à peu près tout ce que nous faisons chaque jour. Pour s’en convaincre, il suffit de dérouler le fil d’une journée. Le matin, quand nous sommes encore un peu endormis, ils sont quasiment omniprésents. Ce sont eux qui nous font enfiler nos chaussettes toujours dans le même ordre, mettre la table de la même façon, aller au même rythme, arriver au boulot à la même heure, etc. Dans la journée d’ailleurs, certains de ces automatismes évidents surgissent encore : la pause café, l’heure du déjeuner, les personnes auxquelles on parle en priorité, les exemples sont encore multiples.

 

On les retrouve encore dans un tas de petits détails qui constituent nos tics de comportements ou de langage. On ne les perçoit pas toujours bien, et certains sont parfois un peu étranges, mais ils sont nombreux. Moi par exemple, j’en suis bourré : quand je parle à quelqu’un debout, je croise très souvent les mains derrière mon dos, j’appuie avec un doigt sur l’autre, j’enchevêtre mes ongles alternativement les uns aux dessus des autres, je penche la tête vers la gauche, je lève le sourcil gauche, je me gratte le lobe de l’oreille, bref vous voyez, j’en ai à la pelle (et arrêtez de rire, c’est vexant enfin).

 

Demandez-vous d’ailleurs pourquoi quand vous marchez vous avez telle démarche plutôt que telle autre. Et si vous vouliez en changer, pensez-vous que cela vous serait facile ? Elle est faite de tant de détails qu’il serait à mon avis bien compliqué de parvenir à la transformer complètement. Et pourtant, chacun des détails que vous ne sauriez modifier témoignerait de la profondeur de l’inconscience que vous en avez.

 

Pour terminer sur ces exemples, nous pouvons reprendre la dernière remarque faite par DG dans son commentaire, concernant la réflexion qu’elle a eut pendant le laps de temps de la lecture de mon billet et de la rédaction de son commentaire. DG semble supposer que le seul fait de réfléchir et de penser extrait de ce que l’on désigne par comportements inconscients. Pourtant, même la réflexion, bien qu’elle puisse paraître comme une activité éminemment consciente, recèle elle aussi une grande partie d’éléments inconscients. Il suffit de remarquer que lorsque nous réfléchissons, nous n’arrêtons pas l’activité de nos sens. Nos yeux, nos oreilles, notre nez, tous nos sens restent bien actifs et continuent de recueillir les informations venant de l’extérieur et de les intégrer. C’est ainsi qu’alors que nous philosopherons sur le sens de notre vie, la vue du tableau pendu au mur du salon nous fera songer que peut-être l’art peut constituer un objectif en soi. Pourtant, absorbés que nous serons dans nos pensées, nous ne nous apercevrons pas nécessairement que c’est la vision, quasi subliminale, du tableau en question, qui a amené le mot art dans notre pensée. Et on comprend ainsi qu’il y a bien une part inconsciente qui vient habiter nos réflexions.

 

En fait, pour sortir véritablement de ces automatismes acquis, il faut être capable d’opérer de façon réellement originale par rapport à ce que nous avons appris, et d’imaginer une solution nouvelle pour apporter une réponse à la situation vécue. Pour cela, on utilise les cellules nerveuses contenues dans la masse orbito-frontale de notre cerveau, cellules qui sont purement associatives. Ces cellules nous permettent, à partir des informations enregistrées et liées à différentes choses, de lier ces informations, et d’obtenir par ce travail associatif un résultat original, d’imaginer quelque chose de nouveau. C’est grâce à cette capacité que l’homme a commencé à fabriquer des outils, qu’il est devenu scientifique, en procédant par hypothèse et en faisant des tests.

 

Mais cette faculté, n’est pas si fréquemment mise à contribution. Si l’on la mesure par rapport à ce dont est fait une journée, on s’aperçoit bien que la part où nous l’utilisons est très minoritaire par rapport au reste. Ainsi le chiffre de 90% de comportements inconscients paraît avancé précédemment paraît tout à fait plausible.

 

Je voudrais terminer en indiquant que l’on aurait tort d’être trop méprisant envers ces automatismes acquis. Certes ils ne sont peut-être pas ce qui relève de l’activité cérébrale la plus noble et que nous voudrions chaque jour mettre en avant, mais ils présentent toutefois de grands avantages, que nous allons réhabiliter.

 

Tout d’abord, Laborit souligne qu’une société ne saurait se bâtir sans faire appel à ces automatismes. Lorsqu’elle établit des lois par exemple, elle entend bien que chacun s’y plie, et, lorsqu’une personne est en situation de commettre un larcin, si ses valeurs et ses expériences passées pouvaient provoquer en elle le sentiment d’un malaise corporel devant l’éventualité d’enfreindre la loi, cela permettrait probablement qu’elle ne commette pas ce larcin. D’une manière plus générale, si tous les individus avaient des comportements déliés de tout réflexe acquis, et agissait donc de façon aléatoire, la société qu’ils voudraient former ne le pourrait sur aucune base.

 

Par ailleurs, ces automatismes acquis présentent aussi un grand intérêt dans le fonctionnement de notre cerveau car ils libèrent en quelque sorte de la place pour le reste. Dans de nombreuses interviews ainsi que dans La Colombe assassinée, Laborit développe l’exemple du pianiste qui apprend une partition. Lors d’aborder un passage difficile de celle-ci, le pianiste mobilise toute son énergie et toute sa concentration afin d’en acquérir les subtilités. Ce travail est d’abord pénible, puis, petit à petit, avec l’entraînement et la répétition de cette difficulté, il parvient à la maîtriser avec une facilité grandissante. Que se passe-t-il au niveau de son cerveau ? Et bien il mémorise en fait les détails du passage, et inscrit leur réalisation dans sa mémoire afin de créer des automatismes nerveux. Ainsi, lorsque la difficulté sera parfaitement résolue, et sa réalisation bien automatisée, le pianiste va disposer de l’énergie et de l’attention qu’il a mobilisées pour progresser plus loin dans le morceau et résoudre de nouveaux problèmes. Comme le dit Laborit, ce sont ces automatismes qu’on appelle « le métier ».

 

Certes, il ne permettront jamais que d’être un bon exécutant, et non un créateur. Mais il y a fort à parier qu’il n’existe pas de créateur qui n’ait par ailleurs une compétence forte d’exécutant. C’est le cas chez les musiciens, tous les plus grands compositeurs ayant presque toujours été des interprètes virtuoses d’un ou plusieurs instruments. On pourrait donner bien d'autres exemples pour illustrer ceci, mais je ne m'y étends pas car j'ai à nouveau été un peu long.

 

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13/09/2006

Tremblements et carcasse

medium_medaille.jpgCe matin, alors que j'entamais doucement ma journée en baguenaudant l'oeil au vent sur Internet, j'eus une grande surprise en ouvrant ma messagerie personnelle. En effet, au milieu des spams qui continuent encore d'arriver, et du mail d'un lecteur, irradiait d'une lumière neuve un message qui annonçait des lendemains enchantés, avec des vertes prairies, des coquelicots, et des poèmes de Marceline Desbordes Valmore dedans.

 

Jean-Louis Servan-Schreiber m'écrivait ! Et le titre de son message ne laissait nulle place à l'ambiguité ou à quelconque raillerie de la part d'esprits chagrins, puisqu'il était écrit, en lettres cardinales: "Invitation personnelle"! Comprenant que mon blog sortait enfin de l'anonymat et qu'il recevait là la juste récompense de tant de mois de sueur au service, gratuit, de ses lecteurs, mon sang ne fit qu'un tour (ça lui arrive souvent, oui).

 

Mes autres comparses de lieu-commun sont eux souvent invités aux universités des partis politiques, aux sauteries des ministres, ou encore à des interviews de journalistes. Mais enfin, l'originalité de mon blog venait au grand jour, et le vaste monde des psychologues et autres professionnels des sciences humaines appelait mes interventions de leurs voeux. Raaah, la douce perspective. Mais quel conférence me demandait-on d'animer? Quelle dîner-débat devais-je éclairer de mes lumières? A quelle grand-messe souhaitait-on si ardemment me voir participer?

 

L'esprit encore fébrile, mais le noeud papillon déjà noué, je cliquais sur le titre du message pour découvrir à quelle manifestation tous frais payés la publication de mon blog avait fini par m'ouvrir les portes. Je parcours très rapidement le message et voit qu'il renvoit lui-même vers un autre lien. Argh, le suspens monte, ma tension aussi, je clique, et découvre, enfin, de cette invitation personnelle, tous les détails.

 

Bah.