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14/11/2005

Le visage et le masque

Billet précédent de la série

 

Je poursuis ma lecture de La sagesse de l’amour de Finkielkraut. Je vous avais laissé sur la relation avec l’autre. Sur l’intrigue qui se nouait lorsque l’autre surgissait dans le parc où j’étais resté seul. Sur la double violence que cet autre exerçait sur moi par son intrusion : violence de la paix détruite par la rupture de mon isolement, violence de mon être soustrait à moi-même par le regard de l’autre qui le façonne à sa façon. J’ai déjà évoqué dans certains billets cette notion apprise en gestion du stress : la carte n’est pas le territoire. Autrement dit, la représentation que je me fais du monde n’est pas la réalité de ce monde. Elle n’est en quelque sorte que ma réalité de ce qu’il est, elle n’est que la représentation de ma vérité. C’est de là que vient la violence exercée par le regard de l’autre. De ce qu’il assigne à sa représentation valeur d’identité. Je perçois dans son regard qu’il me vole mon territoire pour le remplacer par sa carte. C’est en cela exactement qu’il me dépossède de moi-même.

 

Mais l’intrusion de l’autre crée une autre intrigue, plus complexe, qui se noue bien plus dans mon propre regard adressé à l’autre (l’autre ne surgit d’ailleurs que lorsque je le vois – il peut toujours être près de moi, tant que je ne l’ai pas vu il n’existe pas et ne fais nulle intrusion,il faut mon regard porté sur lui pour qu’il existe réellement et exerce la pression de sa présence sur moi) que dans celui qu’il porte sur moi. C’est que dès que je l’ai vu, l’autre m’assigne la lourde responsabilité de lui porter attention. Dans l’échange des regards se noue une relation à laquelle je ne peux échapper. Le visage de l’autre m’oblige, il m’assigne la tâche de le considérer. Je l’ai vu et ne peux plus faire marche arrière, je ne peux plus le nier, l’oublier. L’indifférence devient interdite, je suis désormais responsable de son destin. On pourrait à ce titre indiquer que le délit de non assistance à personne en danger se fonde en grande partie sur cette responsabilité dans laquelle la présence de l’autre m’engage.

 

Le visage de l’autre m’assigne donc une mission. Je dois le considérer, c’est-à-dire le prendre en compte, ne pas le traiter comme quantité négligeable, ne pas l’oublier. Il est là, présent et cette présence s’impose à moi comme une requête. Dès lors que l’on a saisi la réalité de cette assignation, on s’aperçoit d’un nouveau problème à résoudre. Finkielkraut cite un apologue extrait du Talmud où un sage dit à son fils : « Comme ce document est mal rédigé ! » Ce à quoi le fils répond : «  Ce n’est pas moi qui ai écrit cet acte, c’est Juda le tailleur. – Pas de calomnie ! » s’exclame alors le sage. Mais plus tard, alors que le même sage dit à son fils : « Comme cet exemplaire est bien écrit ! » son fils répond : « Ce n’est pas moi qui l’ai écrit, c’est Juda le tailleur. – Pas de calomnie ! » rétorque à nouveau le sage. Que faut-il en comprendre ? Le fond de cette petite histoire révèle un élément aussi subtil qu’important à mes yeux. C’est que dès que je qualifie l’autre d’une quelconque façon, je lui fais violence. Parce que, comme je l’ai indiqué au début, je lui assigne la carte que je me fais de lui en lieu et place de son territoire originel. Je le défais de son visage, de sa présence. Et ce faisant, j’esquive tout à coup l’assignation qu’il m’avait donné de le considérer.

 

C’est un point difficile qui mérite plus de précision. On a vu juste avant, que dès lors que l’existence de l’autre m’est connue, en quelque sorte que sa proximité m’est apparue, je me suis vu assigné la mission de le considérer, je suis devenu responsable de son devenir. Tant que je ne suis pas parvenu à le définir, cette assignation va rester intacte, avec la même force. Parce que l’assignation de l’autre provient de ce que je sais qu’il est là, sans pour autant parvenir à le « saisir », c’est-à-dire que je ne parviens pas à le représenter, à en définir les contours. L’autre existe tant qu’il est visage, tant que je reconnais son existence par son visage. Je me souviens d’une question qu’on avait soulevé en cours de philosophie en terminale : qu’est-ce qu’un homme ? En réfléchissant un peu on s’aperçoit qu’il est très difficile d’apporter une définition satisfaisante, qui permette vraiment d’identifier l’homme d’autres êtres vivants. A cette question, Levinas répond : un homme, c’est un visage. Je trouve cette définition excellente, à la fois très simple et très vraie. Dès qu’on voit un visage, on sait qu’on voit un homme.

 

Mais ce visage se dérobe. Son altérité (sa qualité d'être autre) s'exprime dans l'incessante fuite qu'il oppose à ma tentative de le cerner. Il est toujours "en partance", c'est cela la nature du visage. S’il se fige alors il disparaît en quelque sorte sous les traits dont je l’aurais affublé dans mon imagination. Il ne sera plus visage mais représentation du visage. En d’autres termes, lorsqu’il est figé, lorsqu’il est défini, qualifié, l’homme cesse quasiment d’être homme dans nos yeux. Il n’est plus que la représentation que l’on s’en fait. En le qualifiant on le soustrait donc à l’assignation première à laquelle il nous a exhorté. En parlant de l’autre on évite d’avoir à en répondre, on se rend sourd à son appel. Ce n’est plus son être qui existe mais seulement une image de lui, une carte décorée de ces qualités que nous lui avons attribué. En le déterminant de biais et d’inclinations on le soustrait à notre vue, et ce faisant on recouvre la liberté dont il nous avait privé.

 

[J’introduis à ce niveau une petite incise par laquelle je voudrais préciser cette idée de Finkielkraut. Si cette réflexion m’apparaît fondamentalement juste, je crois qu’on peut tout de même l’affiner encore. Dans un ancien billet j’indiquais que si les propos injurieux ou simplement négatifs prétendant définir une personne dans ce qu’elle est, sur la seule base de l’observation de ses actes ou de ses possessions, devaient être rejetés, on ne devait pas pour autant refuser pareillement les paroles positives à notre égard. A la lumière du présent billet, on s’aperçoit qu’on ne peut pas se contenter de cela. Et pourtant l’argumentation de Finkielkraut ne me fait pas vraiment changer de point de vue. Car ce qui compte fondamentalement dans un message de ce deuxième type (jugement positif sur soi), c’est la démarche qui le soutien, qui porte en elle un message autre que le simple qualificatif élogieux prononcé. La démarche, en étant véritablement tournée vers l’autre, envoie en substance un message de considération. Elle dit justement : « je te considère pleinement ». C’est en fait une déclaration d’amour pratique, une invitation à exister en somme. La démarche n'est pas que la porteuse d'un message, elle est message elle-même, et même un message plus fort, plus important que celui dont elle se fait le support, car plus intangible, moins sujet à être corrompu. Dans cette mesure, il me semble tout à fait conciliable de respecter l’idée de Finkielkraut et pour autant d’ « offrir » aux autres nos messages de considération positifs. Je crois que les deux peuvent tout à fait coexister. Ils sont même quasiment une seule et même intention. Je referme là cette parenthèse.]

 

C’est, je crois, exactement ce qui se passe lorsque l’on réduit les gens à leur fonction. J’ai notamment en tête les discours politiques du type Lutte Ouvrière dans lesquels la stigmatisation des patrons est poussée à son paroxysme. Si je ne nie pas une certaine sympathie pour les inquiétudes qui me paraissent légitimes des salariés les plus fragiles, je conteste en revanche totalement la méthode et le fond du discours tenu par les tenants de cette frange de la gauche « révolutionnaire ». Parce qu’elle ne fait rien d’autre que de réduire ces « patrons » (sans distinction d’ailleurs de qualité et de performance pour ceux-ci) à leur fonction. Arlette oublie qu’avant d’être J6M et patron de Vivendi, Jean-Marie Messier est avant tout Jean-Marie Messier. Un homme lui aussi, avec ses contingences, ses doutes, ses reculs, ses envies, ses ambitions, bref avec son altérité, avec son visage. Elle oublie qu’il a un visage qui le fait être profondément similaire à elle.

 

C’est une simplification très grande que de réduire les gens à leur fonction : « tu es un patron, donc tu es un tyran assoiffé de pouvoir et d’argent ». Une simplification terrifiante en réalité qui retire aux objets de ces descriptions la qualité d’êtres humains. Dès lors, on ne s’étonne pas que des totalitarismes puissent naître de telles manifestations. Mais en faisant entrer l’autre dans le piège de notre définition, en le cernant ainsi de nos projections de ce qu’il est, on se piège soi-même également. Car au moment même où je fais porter à l’autre le masque en lequel ma vision l’a transformé et par lequel je remplace son visage, son humanité, je mets le mien. J’attribue à l’autre son masque et en même temps, et par le même geste, je mets le mien. C’est identique, simultané. Car si l’autre porte alors le masque du caricaturé, je porte moi celui du caricaturiste. En retirant à l’autre sa part d’humanité, je me retire la mienne. Je me qualifie en me disqualifiant. Et ainsi je m’ôte à moi-même mon propre visage. Cela rejoint tout à fait une idée que j’ai plus ou moins toujours eu : je me fais à moi-même ce que je fais aux autres. Je veux dire par là que ce que je fais aux autres, le geste que je tends vers eux, je le tends également vers moi. Tant que je considère l’autre en tant qu’homme, alors je me considère en tant qu’homme, je me traite en tant qu’homme. C’est exactement ce que j’avais indiqué à la fin de mon billet d’analyse sur la peine de prison à perpétuité et la peine capitale.

 

Mais il faut poursuivre sur l’analyse des conséquences qu’il y a à retirer à l’autre son visage, à le réduire aux qualificatifs dont on le pare, et en particulier à le réduire à sa fonction. Pourquoi cela peut-il mener au totalitarisme, ou également au racisme et à l’antisémitisme ? Parce qu’une fois que je me suis dégagé de l’assignation que l’autre m’a fait porter par son visage, je me trouve libre de faire de lui ce que je veux. Je ne suis plus responsable de son devenir. Je suis délié, je ne lui suis plus redevable de rien puisqu’il n’est plus homme. Il n’est plus un être mais seulement une image d’un être. Il n’est en quelque sorte plus qu’un étendard, une icône qu’il est loisible de brûler. Kant écrivait : « je ne puis disposer en rien de l’homme en ma personne soit pour le mutiler, soit pour l'endommager, soit pour le tuer » et plus loin «il n’est personne, même le pire scélérat, pourvu qu’il soit habitué à user par ailleurs de la raison, qui, lorsqu’on lui met sous les yeux des exemples de loyauté dans les desseins, de persévérance dans l’observation de bonnes maximes, de sympathie et d’universelle bienveillance, ne souhaite de pouvoir lui aussi être animé des mêmes sentiments » (in Fondements de la métaphysique des mœurs) . Je crois que fondamentalement nous avons tous cette notion en nous. Il est extrêmement difficile de tuer un homme de sang froid, en le regardant dans les yeux. Si un criminologue passe par ici il me contredira peut-être mais je crois que c’est en fait quasiment impossible, en tout cas pour un individu sain d’esprit. Parce qu’on reconnaît l’homme dans le visage qui nous fait face. Mais dès que l’on a effacé ce visage, ne serait-ce que par un travail mental comme celui que j’ai décris plus haut, en le cernant de qualificatif, en le réduisant à une image à une représentation, bref dès qu’on a détruit l’assignation qu’il nous a faite, alors le champ est libre pour l’horreur. La barrière a sauté et tout devient possible. Je ne tue plus un homme, mais un patron, un égoïste, un noir, un juif. Je tue une représentation que j’ai privée de toute réalité humaine.

 

La question du racisme et de l’antisémitisme est un peu pour moi l’aboutissement de cette lecture de Finkielkraut. C’est pour mieux la cerner et parvenir à en comprendre les sources, les mécanismes que je me suis engagé dans ce travail. Je ne l’ai abordée ici que de façon superficielle mais je compte revenir dessus plus tard, une fois ma lecture aboutie.

 

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Tour du monde imaginaire

De retour d’un agréable week-end dans le Morvan et en attendant de récupérer ce soir de nouveaux agrandissements de mes photos américaines (j’ai notamment commandé le panorama du parc Yosémite dans la plus grande taille disponible, l’équivalent panoramique du 50/75), je me prends à rêver d’un nouveau voyage, d’un grand projet qui me mènerait aux quatre coins du globe, en conservant la liberté que j’ai eu lors de mes dernières découvertes, et marqué par quelques « temps forts » qui me trottent dans la tête depuis déjà pas mal de temps.

 

Histoire de partager un peu ce rêve, voici le trajet qui aujourd’hui me tenterait. Le voyage se ferait sur une durée d’un an environ. Evidemment, toutes les occasions d’assister voire de participer à des activités locales particulières seraient bonnes à prendre afin de découvrir autant les gens, leurs modes de vie, que les paysages.

 

Asie.
Premier grand temps fort.
Mon voyage commencerait en Himalaya, où j’ai d’ailleurs failli aller cette année en lieu et place du voyage que j’ai fait aux Etats-Unis. Après coup je ne regrette rien, mais enfin il s’en est vraiment fallu d’un cheveu que je ne parte découvrir les sommets mythiques (et mystiques pour les autochtones) de la grande chaîne himalayenne. L’envie d’y aller reste donc intacte, d’autant que les possibilités sont innombrables. Entre autres attraits je pourrais envisager : un trekking à la découverte de l’Everest, en allant jusqu’au camp de base d’où partent les expéditions pour son ascension (on grimpe facilement à 6000 mètres d’altitude dans une ballade comme ça, super !), ou tour de l’impressionnant massif des Annapurnas (enfin on n’en fait pas le tour complet sinon on y passe l’année, mais l’idée serait de découvrir la grande variété de paysages que cette chaîne montagneuse peut offrir). 3 grandes semaines.

 

Ensuite, suivre avec des locaux le trajet extraordinaire qui mène de Katmandou à Lhassa. La traversée de la frontière, la découverte du massif himalayen dans son versant tibétain. Deux semaines.
Quitter le Tibet pour le Bhoutan, pays dont les paysages sont restés extrêmement préservés de l’influence du tourisme et qui garde encore une politique assez restrictive de ce point de vue (les prix sont assez élevés pour s’y rendre). Deux à trois semaines.

 

Quitter l’Himalaya et par un grand saut vers le nord-est rejoindre la Mongolie et ses immenses plateaux. Découverte de la vie des nomades. 3 semaines.

 

Nouveau saut vers l’est pour rejoindre le Japon. Dans ce pays, je m’intéresse très peu aux villes, mais plutôt aux villages intérieurs, aux montagnes, au Japon traditionnel et paysan. 3 grande semaines.

 

Dernières étapes asiatique : le Vietnam qui m’a encore été très chaudement recommandé récemment et où deux amis se sont installés il y a déjà plus d’un an maintenant. La découverte du pays offre là aussi beaucoup de possibilités : des sites historiques aux villages intérieurs, en passant par les côtes. Un mois.

 

Après l’Asie, hop, direction l’Océanie en commençant par l’Australie. Là je ne sais pas encore ce que je voudrais faire. J’ai deux idées en tête : soit longer la côte est depuis Canberra jusqu’à Brisbane, soit carrément traverser le pays d’ouest en est en partant de Perth pour rejoindre Sidney (en 4x4 ça doit être assez sympa mais je ne sais pas vraiment quelles sont les possibilités matérielles de faire un tel trajet). 3 semaines ou un grand mois.

 

Après l’Australie, la Nouvelle-Zélande. Je crois que c’est surtout l’île nord qui vaut le détour. Là aussi, la découverte du pays la plus chouette serait essentiellement à pieds, par des trek de plusieurs jours à travers les montagnes, les lacs et les forêts de ce joyau du pacifique sud. Un mois.
Amérique.

 

La liaison aérienne depuis la Nouvelle-Zélande me mènerait en Amérique du sud, à Santiago du Chili. De là, soit je rejoindrais le sud de l’Argentine et la Patagonie pour un séjour sur place de deux à trois semaines (le Parc del Paine est je crois extraordinaire), soit je remonterais directement le long de la Cordillère des Andes.

 

Deuxième grand temps fort : à travers le Chili, la Bolivie, et jusqu’au sud du Pérou, découverte de la vallée de la Lune, du désert d’Atacama (le plus aride du monde), des volcans du sud Lipez, du Salar d’Uyuni, avec en point d’orgue l’ascension du Licancabur (6000 mètres d’altitude, ce volcan a une particuliarité étonnante que j’ai apprise dans une émission de Nicolas Hulot : il contient en son sommet au niveau de son cratère et sous une couche de glace, quelques bactéries et autres organismes microscopiques qui sont donc les êtres vivants habitant à l’altitude la plus élevée sur notre planète). Si j’en crois plusieurs témoignages que j’ai déjà entendus ou lus, ce parcours-ci fait découvrir les plus beaux paysages qu’on peut trouver sur Terre. C’était également une des alternatives à laquelle j’avais pensé avant de partir au printemps de cette année. Finir au Pérou par les sites du Machu Pichu et la ville de Cusco. Un mois à un mois et demi.

 

Remonter ensuite en direction du Mexique pour découvrir notamment les anciennes cités précolombiennes, ou encore le Popocatépetl. Mais aussi Mexico, ou d’autres villes comme Oaxaca. Ca peut durer longtemps dans un pays comme ça. Disons 3 semaines mais il y aurait de sacrées frustrations en repartant.

 

Aux Etats-Unis, dans la mesure où j’ai déjà vu une grande partie des plus beaux paysages du sud ouest, mon étape serait sans doute courte. Il y a toutefois le site White Sands  (dans le Nouveau Mexique) que j’aimerais voir, et passer un ou deux jours à San Francisco me plairait beaucoup. Je pourrais en profiter pour me reposer et profiter à nouveau de cette si belle ville. 10 jours.

 

Remonter à Vancouver, et là, entreprendre la traversée du Canada d’ouest en est. Deux possibilités pour ça : la méthode pépère, en voiture, à travers les parcs, les villes, en prenant son temps et en profitant un maximum de chaque site. Ou alors mais je ne sais absolument pas quelles sont les possibilités de réaliser ça, faire une traversée « grand nord », en se joignant à des traineaux façon Nicolas Vanier (bon ok, là je rêve sans doute un peu mais peu être est-il tout de même possible de le faire ne serait-ce que sur une petite partie du trajet, je vais me renseigner tiens). Un mois et demi.

 

Afrique.
Oui je sais, cette transition entre l’Amérique et l’Afrique serait sans doute difficile à supporter. J’aurais dans la configuration évoquée ici déjà 9 mois de voyage « dans les pattes », avec toute la fatigue que cela suppose, et passer alors de l’hémisphère nord à l’hémisphère sud avec une vraie rupture de climat serait pour le moins osé. Mais je ne vois pas bien comment intégrer l’Afrique de façon simple dans ce voyage mais il est absolument immanquable. Et vous avez bien lu « hémisphère sud », car j’arriverai alors au Cap, en Afrique du sud, pour une découverte rapide du pays, avant de remonter jusqu’à la Namibie. Là aussi, d’après mes lectures et quelques témoignages glanés, le pays est fabuleux : ses immenses dunes ocres, sa faune, sa flore, et le grand delta de l’Okavango sont autant de merveilles naturelles immanquables. Un mois.

 

En option, selon mon état physique du moment, je pourrais alors envisager soit un arrêt au Kenya, pour un traditionnel safari, soit un départ pour Madagascar, une île qui me fait rêver depuis longtemps déjà et que je découvrirai de toute façon un jour ou l’autre. 2 semaines ou 3 grandes semaines selon le choix.

 

Enfin, dernier temps fort du voyage, qui me tente presque plus que tout le reste : la traversée du Ténéré (Niger), en suivant une caravane sur la route du sel. Trois semaines à un mois dans le désert, à vivre avec les nomades, au rythme du sable et du soleil, des cahotements des dromadaires, être un nomade… Et ce voyage là, je sais qu’il est possible.

 

En guise d’épilogue, je signale que pour la plupart, ces idées me sont inspirées par le catalogue d’un excellent voyagiste que j’ai découvert en début d’année : Allibert. Je me permets d’en faire la publicité ici, car je trouve ses voyages absolument superbes, parfois un peu effarants même (on trouve des ascensions de sommets de 7000 mètres par exemple…), empruntant toujours des chemins hors des sentiers battus, très proches de la réalité des pays découverts et de leurs habitants.

 

P.S: ce soir ou au plus tard demain dans la journée, je posterai un nouveau billet en liaison avec ma lecture de Finkielkraut.

09/11/2005

L'inquiétude résolue

Les mots trop minces,

trop ténus,

 

la peur si forte,

si sûre d'elle-même.

L'affirmation de soi à travers Finkielkraut et Lévinas

Je redémarre actuellement la lecture d'un livre qui m'avait beaucoup intéressé. Certaines des idées que j'y ai découvertes continuent de me trotter un peu en tête, mais de façon plutôt vague car je n'avais pas pris de note lors de ma première lecture. Cette fois-ci j'ai décidé de le suivre tranquillement, page à page, crayon à la main et cahier sous ledit crayon. Ce livre c'est La sagesse de l'amour d'Alain Finkielkraut. Il y a beaucoup d'éléments qui m'intéressent dans ce livre, et certains que j'aimerais aborder ici, ne serait-ce que pour me forcer à mettre au clair ce que j'en ressors.

 

En premier lieu, et en suivant l'ordre du livre, c'est la question de l'affirmation de soi que je voudrais aborder dans ce billet, vue sous l'angle du livre de Finkielkraut (je précise que l'objet de son livre n'est pas du tout d'analyser la question de l'affirmation de soi, mais sa réflexion me donne matière à réfléchir sur mon sujet, et c'est pour cela que je me permets de la détourner de son but premier). Avant d'avoir lu le livre, voilà, de façon très résumée, la vision que j'ai de cette notion. S'affirmer selon moi, c'est prendre sa place parmi les autres. C'est-à-dire qu'il s'agit à la fois de prendre possession de son territoire propre, sans laisser les autres empiéter dessus, et de respecter celui des autres. C'est un peu "prendre sa place, toute sa place, rien que sa place".

 

La lecture du livre de Finkielkraut me permet de développer mon idée initiale. L'affirmation de soi est un processus dans lequel on doit agir sur deux "relations": soi avec les autres, et soi avec soi. Commençons par la seconde, en déroulant le fil de la démonstration de Finkielkraut. Finkielkraut pour démontrer son propos, se base en grande partie sur l'oeuvre d'Emmanuel Levinas.

 

Il part du drame d'Oblomov, un personnage célèbre de la littérature russe. Oblomov est affecté par une grande paresse. Une paresse qui n'est pas de celle que l'on traîne quotidiennement comme chacun de nos médiocres défauts, comme un trait de caractère commun, partagé par tant d'autres. Non. Sa paresse est hors norme, absolument énorme, démesurée, accablante. Qu'Oblomov délègue la gestion de ses terres ne suffit pas au repos qu'il recherche. Qu'il décide ensuite de ne plus ouvrir son courrier est encore insuffisant. Et quand il décide de rester toutes ses journées cloîtré dans sa chambre, sans même y laisser passer les rayons du soleil pour que ceux-ci n'engendrent pas de désordre, il reste toujours insatisfait dans sa quête d'inactivité et de quiétude absolue. Même dans cette situation, il reste encore trop "de tumulte dans son inaction", "trop d'être dans l'air". Quoiqu'il abandonne des activités humaines habituelles, et mêmes des plus primaires, il reste infailliblement enchaîné à sa propre vie. Il n'a aucun moyen de s'en "débarrasser", de s'en délier. Finkielkraut écrit :"Derrière le "il faut faire qui le submerge chaque matin de ses fastidieuses recommandations, Oblomov perçoit un "il faut être" plus inexorable et plus décourageant encore." Il est attaché à son fardeau, il sent chaque jour la charge de ce "il faut être", et aucune évasion n'est possible.

 

Je crois qu'on peut notamment percevoir l'impact de cette "charge" lorsqu'au contraire on en est délesté: lorsqu'on se sent inexplicablement léger, comme surplombant la foule, ignoré par elle comme un fantôme. C'est un peu le sentiment que j'ai eu dans mon voyage solitaire aux Etats-Unis et avant au Canada: la solitude m'apportait un sentiment de liberté difficile à décrire, très profond, très "primaire" en quelque sorte. J'avais l'impression de vivre une expérience particulière de par cette seule solitude, à l'autre bout du monde, dans un pays que je ne connaissais pas et où d'une certaine façon je n'existais pas.

 

Poursuivons. La rencontre de l'autre change la donne. Finkielkraut rapporte ici une analyse de Sartre (dans L'être et le néant), qui dépeint le tableau presque naïf d'un homme assis seul dans un parc, presque contemplatif. Dans cette description qu'il rapporte je retrouve un peu ce que je viens d'évoquer dans le précédent paragraphe. La félicité de l'évanescence, de se sentir impalpable et soustrait à l'emprise du monde qui nous entoure. L'irruption soudaine d'un nouvel individu dans le parc est alors un choc, et ceci à double titre. D'abord parce qu'il m'enlève de ce doux abandon, il me rappelle à moi, me ré enchaîne à mon être, à mon existence, à mon identité. Il fait retomber sur moi tout le poids de ma vie. Mais il me fait également violence en ce que son regard porté sur moi, à peine m'a-t-il réassigné la charge de mon existence, qu'il tire à lui cette existence pour la façonner selon ses yeux. Il me retire mon être pour en faire ce qu'il perçoit. Il me fait être tel qu'il me voit, et seulement tel qu'il me voit. Ainsi non seulement la charge de mon existence m'est retombée dessus, mais en plus elle ne m'appartient plus en propre, je n'ai plus prise dessus, j'en suis dessaisit. Finkielkraut cite alors Sartre en disant: "Je deviens alors projet de récupération de mon être".

 

L'affirmation de soi est là. C'est la mesure, le dosage complexe entre l'acceptation du regard de l'autre, de sa prise sur moi, du fait qu'il se rend au moins partiellement possesseur de mon être dans la relation que j'ai avec lui, que je m'abandonne donc à ses desseins. Et dans ce vacarme des images et représentations multiples que les autres font coexister de moi, il me faut également savoir affirmer ma propre version de ce qu'est mon être, me ressaisir de moi-même, en un mot: me recentrer. C'est une expression qu'on utilise souvent en gestion du stress. Se recentrer sur soi-même c'est ré-essentialiser ce que l'on est, c'est rappeler le fondement de notre être. C'est ce que l'on fait lorsqu'on entend son enfant se faire dire qu'il est maladroit et qu'on rétorque: "non il s'appelle Damien". On recentre son identité en effaçant les portraits biaisés que les autres ont voulus en faire. Il nous faut alors savoir dessaisir l'autre de notre être, s'en rendre à nouveau possesseur pour rappeler à l'autre notre identité fondamentale, et en passant, se la rappeler à nous-même.

 

J'espère que ce billet ne paraît pas trop fumeux. Je l'ai écris un peu rapidement, sur la base des notes que j'ai prises jusque là. Un autre billet suivra sur un autre sujet que cette lecture soulève, très lié à ce que l'on vient de voir ici.

 

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04/11/2005

Réponse à Elisa et petit "contest"

Elisa a laissé un commentaire que je trouve intéressant sur mon dernier billet consacré à la question du don.  Je voudrais y faire une (assez courte) réponse dans ce billet. Elisa écrit: " Ne faut-il pas également considérer l'importance de la personne a qui l'on fait ce don?" Je préciserais sa remarque en écrivant plutôt : ne faut-il pas considérer l'importance pour nous de la personne à qui l'on fait ce don? Sa remarque est intéressante car elle met en avant un élément essentiel dans ce type de démarche: la sensibilité. En effet il me semble important de savoir mesurer la relation que l'on entretient avec cet autre auquel on adresse son don, pour bien positionner son geste. Et cela nécessite une sensibilité très affûtée.

 

Je trouve assez difficile toutefois de décrire ceci par des mots. Parce qu'on entre ici dans une démarche des plus subtiles et des plus complexes. Si l'on est un(e) amoureux(se) transi(e) par exemple, et que la personne le sait, offrir le livre comme je l'ai fait peut être très difficile car la personne nous reçoit avec un a priori, elle charge notre geste d'un message supplémentaire qui peut être parasite (si son a priori est négatif, on est à mon avis mal barré, il y a du boulot pour enlever le pathos dans notre comportement). A bien y réfléchir, on retrouvera même ceci dans chaque situation où l'on connaîtra l'autre. Ce n'est que le degré, la force de ce message a priori qui va changer, selon la force du lien entretenu avec l'autre.

 

Donc oui, on n’agira pas de la même façon dans ces différents cas. Pour autant, le fondement de notre geste reste le même : l’intention du bien-être de l’autre, l’attention la plus grande, offerte gratuitement. Que l’on s’adresse à quelqu’un de connu ou pas, la démarche part de la même intention, même si on y met sans doute un sentiment plus fort dans un cas que dans l’autre.

 

Par exemple, pour donner un exemple de démarche envers un inconnu, une idée rigolote qui m’a trottée en tête il fut un temps, mais que je n’ai jamais mise en application, est de poster des courriers chez de parfaits inconnus avec des mots sympathiques, des recettes de cuisine agrémentées avec humour, une idée de sortie pour le week-end, bref n’importe quoi qui nous passe par la tête et qu’on trouverait agréable, amusant, bienfaisant pour nous même. Franchement, ce serait assez délire de recevoir quelque chose de ce genre dans notre courrier, non ?

 

J’ai une idée tiens. Je propose un « anonyme mail contest » pour ce week-end ! Libre à chacun d’écrire soit à quelqu’un de connu (proche ou simplement voisin) ou d’inconnu, d’envoyer une recette de cuisine, un bouquin, enfin ce que vous voulez mais toujours de façon sympathique et anonymement, et lundi on se retrouve sur mon blog pour que chacun indique dans un commentaire ce qu’il a fait. Ca vous tenterait ?

 

Add de 17h00: hem bon mon idée ne soulève pas l'enthousiasme des foules. Je sais pas pourquoi je me sens vaguement idiot là... Bon tant pis, à la place je lessiverai mes murs, c'est sympa aussi. ;o)

03/11/2005

Le don

On peut comprendre le sens du mot don de deux façons principales. Il y a d’abord le don comme chose (palpable ou impalpable) que l’on donne à l’autre, par générosité, et également le don comme capacité ou qualité exceptionnelle dont la providence nous a ou non pourvu. Déjà un petit aparté pour signaler cette jolie idée entendue ou lue un jour : cette deuxième catégorie du don ne devient réelle que si elle s’accompagne de la première. En d’autre terme le don de tout génie qu’il soit scientifique ou artistique ne saurait être entier si celui-ci n’est pas utilisé de façon généreuse, s’il n’est pas offert aux autres (quel peintre génial peut-être reconnu comme tel s’il garde ses œuvres dans son garage ?). Ce n’est donc que dans la mesure où il est offert aux autres que ce don là devient UN DON à part entière.

 

Ce qui m’intéresse aujourd’hui, et qui réveille, enfin un peu, mon blog de sa léthargie, c’est la première catégorie de don évoquée plus haut, et encore pas cette catégorie toute entière car à elle seule elle nécessiterait une analyse qui me semble très complexe et longue. Je souhaite surtout m’attarder sur la démarche personnelle que suppose le don, et sur les sentiments que cette démarche nécessitent et provoque à la fois, en souhaitant t’interpeller, oui toi lecteur, pas la peine de regarder derrière ton épaule ;o), sur l’opportunité que tu aurais d’essayer un de ces jours de faire ainsi un don.

 

Je ne vais donc pas du tout me livrer à une réflexion intellectuelle sur le sujet, mais plus à une description de ce qui se passe lorsqu’on fait un don à quelqu’un. Dans ma vision des choses un don est un acte directement et totalement orienté vers un autre, cet autre pouvant être proche ou lointain, connu ou inconnu. Il y a un seul critère à remplir pour que cet acte soit vraiment un don : qu’il soit dirigé vers l’autre (ou les autres) de façon exclusive, à 100%. C’est-à-dire qu’il ne s’accompagne d’aucune intention parasite. Ni d’intérêt personnel pour celui qui donne, ni même d’une attente de retour après le don. Celui qui le reçoit doit ressentir le fait que l’acte accompli l’est pour lui, de façon totale, et qu’il lui est offert de ne pas y répondre, sans que cela ne porte à la moindre rancune, au moindre jugement d’ingratitude. Qu’il ressente en fait que la seule chose qui lui est demandée, c’est d’accepter le geste fait.

 

Pour illustrer un peu mon idée voici deux exemples concrets, vécus ou entendus.

 

Le premier, entendu, est celui d’un professeur qui raconta cette anecdote un jour à ses élèves dans le cadre d’un cours sur la résolution des  conflits. Un de ses amis proches venait de perdre un parent à qui il tenait énormément. Que faire dans pareille situation ? On se sent souvent désarmé, attristé par la douleur de notre ami, et incapable de faire quoi que ce soit qui puisse atténuer sa peine, l’aider à accepter la perte, redémarrer dans sa propre vie. Un peu désemparé, le professeur décida d’écrire un poème à son ami. Il a décrit la scène de l’écriture de ce texte : il s’était vidé, avait mis dans son texte tout ce qu’il pouvait donner d’amour et d’affection à son ami. Le sujet n’en était pas nécessairement la mort ou la vie, l’important n’était pas dans le sujet du poème. L’important était dans la démarche. Son ami avait reçu ce geste comme un trésor. Car il avait senti en le recevant quelle avait été la démarche qui en guidait l’écriture. C’est ça qui lui donnait une valeur si forte.

 

Deuxième exemple, vécu. J’ai eu l’occasion une fois de faire un geste de ce type, pour quelqu’un à qui je tenais beaucoup. Ca ne répondait à aucune occasion, cette personne n’avait pas eu de décès dans sa famille ni dans ses amis, ce n’était pas son anniversaire, ni sa fête. J’avais simplement eu envie de faire quelque chose. Je lui ai donc offert un livre, un simple livre. Petit (un peu plus de 100 pages je crois), pas cher (j’avais eu le choix entre deux éditions aux prix très différents, et j’avais volontairement choisi la moins chère pour que mon geste ne soit pas embarrassé d’un objet dont on percevrait une valeur pécuniaire importante, ce qui je pense aurait été susceptible de « brouiller » le message que je voulais faire passer, et aussi parce que l’image de couverture me plaisait bien), que j’avais emballé dans une feuille de papier Canson et sur la première page duquel j’avais ajouter un petit mot lui souhaitant une vie heureuse, sans pathos. Je le gardais dans mon sac et un jour où je l’ai croisée, j’ai pu le lui donner. Ce fut simple, assez rapide. Juste un : « tiens je voulais t’offrir ça. Ce n’est pas grand chose, juste un petit livre. Voilà » Et hop ! Je suis rentré chez moi. Cette expérience m’a marqué. Ca reste un souvenir très important pour moi, un petit moment à part, un peu magique, un de ceux qui me fondent.

 

Ce que j’aimerais parvenir à faire passer ici, c’est que l’important c’est essentiellement la qualité de la démarche suivie qui fait que le geste se transforme en don. L’objet (si c’en est un d’ailleurs) que l’on offre importe peu.  Ca peut être un livre, un dessin, jouer un morceau de musique, peu importe. Ce qui compte c’est ce que l’on met de soi-même dans sa réalisation. Et à mon sens le geste peut tout à fait rester anonyme, il n’en perd pas sa valeur. Il peut même au contraire en prendre de cette façon. Si l’on se sent heureux de le faire, si on donne de soi-même par cet acte, de façon gratuite, sans espérer autre chose que le bien être de l’autre, alors ce qu’on offre n’en a qu’une plus grande valeur.

 

P.S 1 : j’inscris ce billet dans la catégorie gestion du stress bien que cela soit fort restrictif. La question du don dépasse largement ce cadre.

P.S 2 : le livre que j’offris est Geai de Christian Bobin. J’en conseille la lecture surtout pour les gens un peu fatigués voire neurasthéniques. Il agit comme un petit vent frais et chaleureux à la fois. L’autoportrait au radiateur est très bien aussi.

P.S 3 : si j’ai recours parfois à des exemples personnels, ce n’est nullement dans l’intention de faire de mon blog un espace d’épanchements où je dévoilerais mon intimité. Ce n'est clairement pas mon objectif, et ce n’est clairement pas ce que je recherche dans les blogs. Je ne le fais que dans la stricte limite où certains messages me semblent plus compréhensibles lorsqu’ils sont incarnés de cette façon. Cela humanise un peu les choses, et ça me permet également d’être plus précis dans mes descriptions. Rien d’autre.

02/11/2005

Echardes

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             Rêves gamins

                              frêles et timides

 

                         réveillés

                                    par les ironies à échardes

                                               toujours à échardes

 

 

Ciel bleu, Kandinsky, 1940

27/10/2005

Il est beau mon blog, il est beau !

Depuis quelques temps je suis un peu en panne pour écrire de nouveaux billets de fond sur mon blog. Vous l'avez sans doute remarqué, j'étais plus inspiré et prolofique au début. Il faut dire aussi à ma décharge que la plupart des billets que j'ai posté dans les rubriques Gestion du stress et Réflexions et débats m'ont souvent pris beaucoup de temps (parfois 3 ou 4 heures de travail pour les structurer convenablement), et que je ne peux pas répéter cela éternellement. J'essaie de relancer quelques lectures qui me donneraient un peu de matière pour vous proposer de nouvelles idées, mais ce n'est pas évident. Au passage vous aurez remarquez comme je me voue corps et âme à votre service ;o)

 

Du coup la fréquentation de ce blog, déjà limitée, se réduit de plus en plus (et c'est bien normal). Le constatant avec une certaine tristesse j'ai parcouru d'un oeil vague la blogosphère du jour et j'ai trouvé un truc rigolo qui m'apprend que mon blog aurait quand même une petite valeur (enfin modeste en comparaison à celle que vous trouverez pour les gens que j'ai dans mes liens mais bon).

 

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Vous pouvez faire le test ici: http://www.business-opportunities.biz/projects/how-much-i...

 

P.S: en revanche je note que si mon blog est peu fréquenté, il est bien fréquenté. Vous avez vu les gens qui viennent y déposer un commentaire? La classe. ;o)

25/10/2005

Retour de nostalgie

Ce soir je suis allé récupérer des agrandissements de certaines de mes photos prises lors de mon voyage aux Etats-Unis. Il y en a 15, et chacune d'elle soulève des souvenirs qui me remontent à la gorge, et cette fois-ci en grand, en vraiment grand (j'ai fais faire des agrandissements format A4).

 

J'ai déjà eu du mal à revenir, et les images, les expériences vécues là-bas me reviennent encore régulièrement comme autant d'appel au voyage (j'ai même un petit projet qui grimpe doucement, mais ça ne pourra pas se faire avant quelques temps, deux ou trois ans je pense).

 

J'ai fais un petit kaléidoscope rapidos de ces photos agrandies. L'éclairage n'est pas bon mais avec ces formats difficile de trouver une façon simple de photographier tout en même temps. Donc ça rogne à droite, c'est trop orange, le lustre se reflète dedans, tout ça, mais bon.

 

Moi ça me fait tout de même rêver...

 

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Réflexes et réflexions

Ce texte s’appuie en partie sur une analyse réalisée par Jean Krakowiecki, grand adepte de Laborit s’il en est et fondateur de l’I.R.S - Institut de Recherche sur le Stress. Je profite de ce prologue pour indiquer que pour ma part je ne me défini pas comme un grand adepte de Laborit. Je ne connais ses travaux que de façon (très) partielle, et si je le cite ici, c'est en grande partie pour proposer une réflexion qui a l'intérêt d'être à la fois originale et très argumentée. Concernant Jean Krakowiecki, il est l'expert avec lequel j'ai mis au point le site de gestion du stress en lien dans la colonne de droite. J'ai pris mes distances avec lui après quelques temps de collaboration pour des raisons particulières, mais ses travaux n'en restent pas moins eux aussi interpellant. Mais revenons à nos moutons.

 

Je vous propose aujourd'hui un retour un peu plus précis sur le fonctionnement de notre cerveau tel que Laborit l’a décrit. A la fois biologiste et sociologue, Laborit tenta notamment de découvrir par quelles parties de notre cerveau est commandé tel ou tel comportement. Le cerveau, rappelons-le, peut se décomposer en trois parties principales : le cerveau reptilien, le système lymbique, et le néo-cortex. Petite revue de chacun d’entre eux.

 

Le cerveau reptilien : il est le siège de nos réflexes les plus ancestraux. Cette partie de notre cerveau est essentiellement programmée sur notre instinct. Elle couvre les activités telles que le rut et l’accouplement (à ce propos j’ai toujours trouvé que la drague en boîte ressemblait fortement aux danses amoureuses développées par les animaux), la chasse (qu’on observe encore de façon détournée lorsque nos supermarchés font des « superpromos »), l’établissement de hiérarchies sociales, etc. Il est même possible que l’influence du reptilien s’étendent à d’autres comportements qu’on voudrait croire plus nobles : le respect de la tradition (parée de ses fameuses « valeurs ») qui ne serait qu’obéissance à des rites cérémoniaux, l’établissement de nos convictions, reflet de notre simple soumission au conformisme de notre époque, ou de notre volonté de reconnaissance du groupe auquel on souhaite être rattaché (en fonction des objets gratifiants qu’ils nous propose), etc. La difficulté majeure posée par le cerveau reptilien est que l’influence de celui-ci est majoritairement inconsciente. Ce sont des réflexes quasiment innés qui entrent en jeu, et il nous est bien souvent difficile de les remarquer car nous les « habillons » d’autres éléments, et parfois même nous les maquillons.

 

Le système lymbique : il est le siège des émotions, et de leur expression. Selon Laborit, le système lymbique est celui qui a pour tâche d’assurer notre survie. On a peur devant un danger alors on fuit, pour se protéger, etc.  Le système lymbique est donc ce par quoi nous allons chercher à nous protéger, à protéger notre équilibre biologique notamment. Son action est aussi principalement inconsciente. Ce par quoi nous allons parfois en prendre conscience ce sont nos tremblements de genoux, nos sueurs, nos mains moites, nos battements de cœur accélérés. Mais il est amusant de constater que ce sont ces symptômes qui nous font comprendre dans quel état nous sommes, et que si cette expression biologique de notre état ne nous donnait pas cette information, nous resterions probablement sourds aux chamboulements que nous pouvons être amenés à vivre.

 

Le néo-cortex : il englobe le cerveau reptilien et le système lymbique. Il est la partie la plus développée de notre cerveau et est le siège notamment de l’imagination, de l’anticipation. Lorsque nous réfléchissons, conceptualisons, etc. c’est à lui que nous faisons appel. Laborit souligne un vice majeur dans l’exploitation que nous faisons des capacités qu’il nous donne. C’est que nous avons tendance à l’utiliser pour interpréter et souvent pour justifier nos pulsions primitives, en mettant des explications parfois d’ordre abstrait sur des comportements « primitifs ». En agissant ainsi on va justifier entre autres nos réflexes ancestraux en les parant des habits nobles de la réflexion. Essayez de faire remarquer à un d’jeun dans le vent que lorsqu’il drague il ne fait que répondre à un instinct primal, biologique, et qu’il est alors semblable au pan qui déploie sa queue (ahem). Vous verrez comment il enrobera sa réponse (enfin s’il ne se contente pas de vous insulter).

 

En fait l’élément important que pointe Laborit c’est que cet ennoblissement de nos comportements primitifs inconscients par des explications construites au niveau du néo-cortex nous empêche de mesurer de façon juste l’influence notamment de notre cerveau reptilien sur nos actions. On se ferme alors l’accès à la compréhension de certains fondements de nos attitudes, de nos choix. Difficile d’évoluer correctement dans ces conditions. Et difficile surtout d’apprendre à moins lever la patte pour marquer notre territoire, signaler notre présence, ou être celui qui écrit l’histoire !